Chronique : Droit criminel
- Damien Roets
Professeur de droit privé
Université de Limoges
Doyen honoraire de la Faculté de droit et des sciences économiques - Jérôme Leborne
Qualifié aux fonctions de Maître de conférences
Docteur en Droit
Enseignant contractuel à l’Université de Toulon
La protection pénale de la tortue Cistude
Cass. Crim. 23 nov. 2023, pourvoi n° 22-86.922, inédit
La tortue Cistude (Emys orbicularis) – encore dire « tortue boueuse » ou « tortue bourbeuse » ou « tortue des marais » –, contrairement à ses cousines européennes la tortue d’Hermann (Testudo hermanni) et la tortue grecque (Testudo graeca), est une tortue d’eau douce. Considérée comme étant « quasi menacée » dans le système de cotation de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature, elle est notamment menacée par la régression des zones humides. C’est précisément une telle menace qui était en cause en l’espèce, la propriétaire d’un étang, qui avait connaissance de la présence de tortues cistudes dans et à proximité de celui-ci, n’ayant pas pris les mesures qui s’imposaient pour maintenir un niveau d’eau suffisant au bien-être des tortues à l’occasion de travaux rendus nécessaires par l’existence d’une brèche dans une digue.
Dans l’ordre juridique européen, comme la tortue d’Hermann et la tortue grecque, la tortue Cistude figure, d’une part, à l’annexe II de la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe du 19 septembre 1979 (dite « Convention de Berne »), en tant qu’elle appartient à la catégorie des « Espèces de faune strictement protégées », et, d’autre part, aux annexes II et IV de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, en tant qu’elle est à la fois une espèce animale « d’intérêt communautaire dont la conservation nécessite la désignation » et une espèce animale « présentant un intérêt communautaire et nécessitant une protection stricte ». Dans l’ordre juridique national, elle est listée dans l’arrêté du 8 janvier 2021 fixant la liste des amphibiens et des reptiles représentés sur le territoire métropolitain protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection (qui a succédé à l’arrêté du 19 novembre 2007 fixant la liste des amphibiens et des reptiles protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection) pris en application des articles R. 411-1 et R. 411-3 du Code de l’environnement. Elle est par ailleurs pénalement protégée par l’article L. 415-3-1° du même code qui, entre autres comportements, punit de trois ans d'emprisonnement et de 150 000 d’euros d'amende « le fait, en violation des interdictions ou des prescriptions prévues par les dispositions de l'article L. 411-1 et par les règlements ou les décisions individuelles pris en application de l'article L. 411-2 : a) de porter atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques ; […] c) de porter atteinte à la conservation d'habitats naturels » (les b) et d) du texte incriminent respectivement le fait « de porter atteinte à la conservation d'espèces végétales non cultivées » et le fait « de détruire, altérer ou dégrader des sites d'intérêt géologique, notamment les cavités souterraines naturelles ou artificielles, ainsi que de prélever, détruire ou dégrader des fossiles, minéraux et concrétions présents sur ces sites »). C’est cette qualification pénale qui a valu à la demandeuse au pourvoi à l’origine de l’arrêt ici commenté d’être condamnée, le 14 septembre 2022, par la cour d’appel de Limoges, à 3 000 euros d’amende.
L’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement mobilisé in casu ne se suffit pas à lui-même puisqu’il renvoie aux « dispositions de l'article L. 411-1 et [aux] règlements ou décisions individuelles pris en application de l'article L. 411-2 » (figure de l’incrimination par renvoi poétiquement dit « en cascade »…). Ainsi, en l’espèce, pour identifier le contenu de l’interdit pénal il convient tout d’abord de lire l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement à l’aune de l’article L. 411-1-I dudit code qui dispose notamment que « lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdit[e]s : […] 3° la destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ». Il faut, ensuite, se référer à l’arrêté du 19 novembre 2007 fixant la liste des amphibiens et des reptiles protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection (applicable à l’époque des faits) pris en application des articles R. 411-1 et R. 411-3 du Code de l’environnement. Il faut enfin intégrer le fait que la demandeuse au pourvoi avait fait l’objet d’un arrêté préfectoral (« décision individuelle » au sens de l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement) la mettant en demeure de remettre son étang en eau.
Devant la Chambre criminelle de la Cour de cassation, la propriétaire de l’étang à sec litigieux présentait deux arguments, l’un concernant l’élément matériel du délit, l’autre son élément moral.
S’agissant de l’élément matériel du délit, la demandeuse au pourvoi estimait que celui-ci n’avait pas été caractérisé par la cour d’appel dès lors que, comme en attestaient divers documents produits, dont un rapport d’expertise, il n’était nullement démontré que la mise à sec de la pièce d’eau avait altéré ou dégradé le milieu particulier des tortues cistudes et que, partant, le doute existant quant à la réalité de l’atteinte devait lui bénéficier. Ce à quoi la haute juridiction répond sèchement en affirmant que « le délit, prévu par le 1° de l'article L. 415-3 du code de l'environnement, d'atteinte à la conservation des habitats naturels ou espèces animales non domestiques, en violation des prescriptions prévues par les règlements ou décisions individuelles pris en application de l'article L. 411-2 du même code, peut être consommé par la simple abstention de satisfaire aux dites prescriptions ». L’assertion est un peu surprenante. En effet, si l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement incrimine le fait de porter divers types d’atteinte au milieu naturel « en violation des interdictions ou des prescriptions prévues par les dispositions de l'article L. 411-1 et par les règlements ou les décisions individuelles pris en application de l'article L. 411-2 », cette violation (ou, dans la terminologie alambiquée ici utilisée par la Cour de cassation, « l’abstention de satisfaire [auxdites] prescriptions ») n’est qu’une composante de l’élément matériel du délit dès lors que, contrairement à ce qui a souvent cours en droit pénal de l’environnement1, elle ne consomme pas à elle seule l’infraction, le texte énumérant quatre types d’atteintes2. Le délit de l’article L. 414-3-1° du Code de l’environnement étant manifestement une infraction de résultat (produit par une action ou, éventuellement, une omission3), le seul constat, en l’espèce, de la violation de l’arrêté préfectoral du 25 avril 2018 ne semble pas pouvoir caractériser son élément matériel.
En ce qui concerne l’élément moral du délit de l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement, la solution retenue, déjà adoptée par le passé4 est moins surprenante, sans être pour autant convaincante. Selon la Chambre criminelle, « une faute d'imprudence ou de négligence suffit à caractériser l'élément moral du délit ». L’emploi de la formulation « suffit à » induit que l’élément moral du délit serait, en somme, au gré des circonstances, à géométrie variable, i.e. faute intentionnelle (dol général) ou faute d’imprudence ou de négligence ; ce qui n’est guère satisfaisant. Si l’on met de côté le cas particulier de la faute de mise en danger de la personne d’autrui5, un délit a pour élément moral soit la faute intentionnelle6, soit la faute d’imprudence ou de négligence7. Admettre qu’une infraction puisse avoir pour élément moral, selon les cas, la faute intentionnelle ou la faute d’imprudence ou de négligence paraît contraire à l’exigence constitutionnelle8 et conventionnelle9 de clarté et de précision des textes d’incrimination inhérente au principe de la légalité des délits et des peines. De plus, le caractère protéiforme de l’élément moral du délit de l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement fait problème en ce que les peines encourues sont, en toute hypothèse (faute intentionnelle ou faute d’imprudence ou de négligence, donc) les mêmes : trois ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende.
Aux fins de protéger efficacement les espèces animales non domestiques protégées (ainsi, d’ailleurs, que les espèces végétales non cultivées protégées et les sites d’intérêt géologique protégés), l’article L. 415-3-1° du Code de l’environnement pourrait être utilement réécrit. Pour ce qui est de l’élément matériel du délit, la référence aux « décisions individuelles » devrait être supprimée pour ne pas laisser à penser que la répression est conditionnée par la prise d’un arrêté préfectoral individuel (le texte d’incrimination et la jurisprudence de la Cour de cassation sont, sur ce point, ambigus…) – quitte à faire du non-respect d’un tel arrêté une infraction autonome10 –. Par-delà cette suppression, et s’agissant, cette fois, de l’élément moral, le texte devrait comporter deux qualifications autonomes (dans deux alinéas) pour distinguer selon que l’atteinte a été commise intentionnellement (quel que soit le mobile de l’atteinte) ou par imprudence ou négligence, les peines encourues dans le premier cas étant plus sévères que dans le second11. De lege lata, il n’est en effet ni rationnel ni juste de sanctionner des mêmes peines les atteintes volontaires et les atteintes involontaires à une espèce animale non domestique.
Quoi qu’il en soit, l’arrêt rendu par la Chambre criminelle le 14 novembre 2023 dans la présente affaire révèle que, à l’instar du droit pénal animalier « pur », pour être porteur de sens, le droit pénal animalier « environnemental » mériterait d’être techniquement mieux conçu – autrement dit, d’être pris au sérieux…
D. Roets
Le cumul des qualifications de divagation d’un animal dangereux et des blessures involontaires à la personne
CA Chambéry, 21 juin 2023, n° 21/00444, JurisData, n° 2023-017154
On sait peu de choses de cet arrêt rendu par la Cour d’appel de Chambéry dont seul le résumé est publié au JurisData. Il permet, néanmoins, de rappeler que le droit animalier n’est pas un droit visant uniquement à la protection pour les animaux, celle-ci étant déjà (très) relative, il se compose également d’un ensemble de règles dites contre les animaux12. Très tôt, il est vrai, le droit pénal a considéré l’animal comme un être vivant doué de dangerosité avant de le protéger, bien plus tard, comme un être vivant doué de sensibilité, sensibilité qui n’a pas pour autant empêché le nouveau Code pénal de déployer parallèlement une lutte intensive contre la bête. La protection de l’animal a pu, quand même, exercer une certaine influence, car il faut reconnaître que le paradigme du droit moderne n’est plus tout à fait celui du droit historique contre la dangerosité animale. Moralement irresponsable sur le plan juridique, l’animal est, en conséquence, pénalement irresponsable de ses actes ou de sa dangerosité, partant, il ne peut jamais être qualifié ni condamné comme auteur ou complice d’une infraction. En tant qu’être approprié, il est placé sous la responsabilité de son propriétaire ou de son gardien qui est, et en est, juridiquement responsable. Dès lors, l’animal est assimilé à un « moyen »13 de l’homme de commettre une infraction. Autrement dit, le droit pénal punit, non pas l’animal dangereux, mais la personne défaillante ou celle qui ferait un « mauvais usage » de son animal. Il ne s’agit donc pas, comme cela l’était au temps de l’ancien Code pénal, d’une protection « pure » contre l’animal lui-même mais, désormais, d’une protection « indirecte » contre la personne au comportement dangereux, et ce, par l’intermédiaire de l’animal.
Rangée dans le Titre Deuxième « Des contraventions contre les personnes » (du Livre Sixième « Des contraventions ») du Code pénal, au plan formel, la place de l’incrimination de la divagation animale est en effet révélatrice de l’objectif principal de garantir la sécurité des personnes, la lutte contre l’animal en est en quelque sorte l’accessoire. La divagation animale constitue, au plan substantiel, une contravention de la 2e classe (150 € d’amende) sanctionnée par l’article R. 622-2. Elle est, a priori, une infraction formelle, c’est-à-dire que la loi pénale sanctionne la divagation de l’animal indépendamment de la réalisation d’un résultat, car à elle seule la divagation est estimée comme suffisamment dangereuse. À y réfléchir, sa véritable nature est peut-être davantage celle de l’infraction-obstacle puisqu’elle a vocation à réprimer un comportement dangereux susceptible de causer un dommage, encore relativement éloigné (tandis qu’avec les infractions formelles la causalité est quasi immédiate et la survenance du résultat matériel presque certain), dont l’éventuelle survenance peut caractériser une autre infraction, notamment une atteinte aux personnes. Le cas échéant, l’infraction-obstacle pourra être cumulée avec l’infraction de résultat (ce qui n’est pas possible si l’infraction formelle est consommée). En ce sens, la divagation animale est, pourrait-on dire, une « contravention-sûreté ».
La formule utilisée par le nouveau Code pénal « susceptible de présenter un danger », signifie que l’animal n’est pas intrinsèquement dangereux, il peut être dangereux. Cette formule sous-tend le changement de paradigme en la matière : il ne s’agit plus de lutter contre l’animal dangereux en divagation, il s’agit de lutter contre la dangerosité de l’animal en divagation. Faisant office de « jugement de principe », un Tribunal de police en 1998 a précisé que l’article R. 622-2 sanctionne « la seule possibilité de l’animal de causer un dommage à la personne, indépendamment du caractère intrinsèquement dangereux ou féroce de l’animal »14. Une décennie après, cette conception de l’incrimination sera reprise par la Cour d’appel de Grenoble dans un arrêt du 3 novembre 2009 lequel énonce que la contravention « s’applique, indépendamment du caractère intrinsèquement dangereux de l’animal, à celui qui est susceptible de présenter un tel danger ». Il faut donc comprendre que l’animal n’est pas dangereux pour ce qu’il est mais pour ce qu’il fait. Encore que, le danger n’étant qu’une éventualité, il faudrait dire : l’animal n’est pas dangereux pour ce qu’il est mais pour ce qu’il peut faire en divagation. La dangerosité de l’animal étant factuelle, plus précisément circonstancielle, tout animal est potentiellement concerné. Tout dépend alors de l’appréciation souveraine, in concreto, des juridictions du fond. En pratique, c’est bien souvent la réalisation d’un dommage qui permet de démontrer la dangerosité de l’animal, situation paradoxale que M. le Professeur Damien Roets a relevée dans cette revue15, remettant ainsi en cause l’intérêt de l’infraction sachant que celle-ci est théoriquement indépendante du résultat (ce qui renforce au passage l’idée de l’infraction-obstacle). Tel est d’ailleurs le cas en l’espèce, « les chiens doivent être considérés comme des chiens dangereux au vu de leur comportement lors de l’attaque ». Le résumé de l’arrêt ne donne pas plus d’éléments sur « le comportement » lors de l’attaque hormis, on le verra plus loin, que l’un des trois chiens du propriétaire condamné a mordu la victime, résultat final de la divagation. La dangerosité de l’un pourrait avoir eu pour effet de recouvrir ou de présumer celle des autres, sauf à considérer que l’attaque est en elle-même la manifestation de leur dangerosité.
Si l’animal a pu se montrer dangereux, c’est parce qu’il était en état de divagation. L’état de divagation conduit à la dangerosité animale, elle provoque en quelque sorte la dangerosité. En d’autres termes, la divagation constitue d’une certaine manière le stade initial de la dangerosité animale. Juridiquement, la divagation est le versant négatif de la surveillance, en ce sens où elle s’entend comme un défaut de surveillance de l’animal par son gardien16. Le défaut de surveillance pénal s’apprécie normalement selon les critères du juge civil, soit l’usage, le contrôle et la direction de l’animal. La caractérisation du défaut a néanmoins varié dans le temps, comme s’il y avait eu des degrés de défaut : la jurisprudence pénale est passée d’un défaut strict17 à un défaut souple18, si bien qu’aujourd’hui la réunion des trois critères n’est plus exigée pour constituer la divagation. Aussi, la tenue en laisse n’est pas un fait significatif : la divagation est caractérisée, alors même que l’animal est tenu en laisse, lorsque celle-ci est trop longue pour le maîtriser19 ; inversement, l’absence de laisse n’emporte pas nécessairement divagation si le maître reste en mesure d’exercer le contrôle de l’animal à distance, par portée de voix ou de tout instrument permettant son rappel20. Le critère de la surveillance effective s’est ainsi imposé sur tous les autres pour déterminer la divagation21. Cette surveillance effective permet au demeurant de distinguer la divagation de l’excitation animale que l’article R. 623-3 du Code pénal punit d’une contravention de la troisième classe (450 € d’amende). Dans le cadre de l’excitation, le gardien de l’animal le laisse attaquer ou poursuivre une personne alors qu’il avait les moyens de l’en empêcher. Ici, le gardien possède la surveillance effective ; à défaut, l’animal est en divagation. En résumé, dans le cas de l’excitation le gardien s’abstient d’exercer les pouvoirs qu’il possède sur l’animal22, dans le cas de la divagation le gardien ne possède plus ces pouvoirs. Le cumul des qualifications apparaît dès lors impossible. Dans l’arrêt commenté, il s’agit bien d’une divagation car les chiens du prévenu ont attaqué un autre chien « alors qu’ils se trouvaient à plus de cent mètres de lui et qu’il a mis une minute 30 pour arriver sur place ». En les laissant errer, le gardien a effectivement perdu la surveillance et le contrôle de ses chiens.
S’il y a défaut de surveillance, c’est parce qu’il y a originellement une faute. En principe, en tant que contravention, l’infraction est matérielle, ou pour le dire plus concrètement, l’intention est présumée. Dès lors, la constatation de la divagation d’un animal au comportement dangereux devrait suffire à constituer l’infraction et, en conséquence, à condamner le gardien défaillant. Toutefois, il ressort de la jurisprudence que le comportement fautif du gardien est recherché par les juges. Pour autant, on peut difficilement le leur reprocher car la formule employée par le texte, « laisser » divaguer, suppose une négligence du gardien, pouvant s’interpréter comme la répression d’une faute d’imprudence23. C’est donc une « contravention non intentionnelle ». En sus, quand la divagation a effectivement causé un dommage, la divagation ou la faute source de la divagation est susceptible de constituer en tout ou partie l’élément moral des atteintes involontaires à l’intégrité de la personne dont la qualification dépendra du seuil de l’incapacité totale de travail de la victime et du degré de la faute, simple ou aggravée, commise par l’agent. La faute du gardien de l’animal est cette fois réprimée pour ses conséquences. La divagation de l’animal apparaît bien comme une infraction-obstacle dont le résultat est également sanctionné lorsqu’elle ne parvient pas à faire obstacle. Le cumul des qualifications peut tout de même sembler critiquable. Certes, outre l’élément matériel, les intérêts sont distincts : d’un côté, on protège la sécurité, de l’autre, l’intégrité des personnes. Il n’en demeure pas moins que la divagation est sanctionnée deux fois, d’une part, en tant que contravention et, d’autre part, en tant que faute constitutive des blessures involontaires. Depuis son arrêt retentissant du 15 décembre 202124, la Cour de cassation interdit le cumul des qualifications dans deux situations. Dans la première, l'une des qualifications, telles qu'elles résultent des textes d'incrimination, correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre, qui seule doit alors être retenue25. À compter du moment où la divagation correspond à la faute des blessures non intentionnelles, seules ces dernières pourraient (devraient ?) être retenues. Cependant, la divagation, plus particulièrement le défaut de surveillance, résulte d’une faute simple ou d’imprudence. Elle ne suffit pas alors à constituer la faute délibérée laquelle se caractérise par la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement (art. 121-3, al. 4, C.P.). C’est probablement pourquoi en l’espèce, le propriétaire des chiens est également condamné du chef de blessures involontaires par violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité. La morsure subie par la victime tentant de sauver sa chienne attaquée, est en lien direct (relevons ce lien de causalité discutable) et certain avec la faute commise par le prévenu qui a laissé volontairement deux de ses chiens hors de son champ visuel et, lorsque le troisième a cassé sa laisse, il ne s’est pas inquiété et est resté sans réaction pendant une minute. Ainsi, le défaut de surveillance délibéré auquel s’ajoute la passivité du propriétaire face au comportement des chiens, permettent, selon les juges, de caractériser la faute délibérée des blessures (là encore ceci est discutable, à la lecture du résumé de l’arrêt on a du mal à voir quelle obligation particulière prévue par la loi ou le règlement est violée). La contravention de divagation ne correspond pas (elle ne constitue pas) à l’élément moral du chef de blessures involontaires par faute délibérée, ici le cumul se justifie, du moins il ne devrait pas être interdit.
On comprend, à l’aune de ce cumul, la nécessité de réécrire l’article R. 622-2. Le texte doit être reformulé de façon à recentrer l’incrimination sur la cause de la divagation, à savoir la faute d’imprudence du gardien, et reléguer la dangerosité de l’animal à sa place de conséquence et à sa nature circonstancielle. Aussi, le nouvel article R. 622-2 devrait incriminer le fait, par le gardien d’un animal, par imprudence ou négligence, de le laisser divaguer de manière à exposer autrui à un danger, et alors même qu’il n’en est résulté aucun dommage, est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 2e classe. En revanche, incriminer la divagation par faute délibérée, ce serait prendre le risque, vu l’arrêt du 15 décembre 2021 de la Cour de cassation (supra), de ne plus pouvoir cumuler (du tout) la divagation et les blessures involontaires à la personne humaine. C’est peut-être d’ailleurs ce qui explique que les juges d’appel, malgré qu’ils aient établi un lien de causalité directe, ce qui aurait dû les conduire à caractériser une faute d’imprudence, se soient reportés sur la faute délibérée découlant normalement d’une causalité indirecte (selon les distinctions de l’article 121-3 alinéa 3 et 4 du Code pénal), afin de ne pas entraver le cumul des infractions (la divagation aurait été absorbée par la faute d’imprudence des blessures involontaires) et de punir plus sévèrement le comportement dangereux du gardien de l’animal.
J. Leborne
Les frontières de l’action civile des associations de protection animale
Cass. Crim., 28 novembre 2023, pourvoi n° 22-87.559
Les associations se constituant partie civile dans un procès pénal « concurrencent désormais largement le ministère public, dans sa fonction d’accusation et de défense des intérêts de la collectivité »26. L’action civile devant les juridictions répressives s’étant aujourd’hui tellement étendue, elle suscite en doctrine27 des craintes qu’elle n’aboutisse, en pratique, à une « privatisation du procès pénal »28. Toutefois, pour certains contentieux, ces groupements peuvent être « d’utiles contrepoids à l’inertie des parquets »29. C’est précisément le cas en justice pénale animalière où le rôle des associations de protection animale est « indispensable tant il est difficile de considérer le ministère public comme représentant les intérêts des animaux »30. La loi du 1er février 199431 a codifié l’action civile des associations de protection animale au siège de l’article 2-13 du Code de procédure pénale. Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et dont l’objet statutaire est la défense et la protection des animaux peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions réprimant les sévices graves ou actes de cruauté et les mauvais traitements envers les animaux ainsi que les atteintes volontaires à la vie d’un animal prévus par le Code pénal. Depuis, on ne compte plus le nombre d’affaires signalées par les associations de protection animale au Parquet32. On ne compte plus le nombre de jurisprudences rendues possibles grâce à l’action civile des associations de protection animale33. Le rôle des associations dans la justice pénale animalière34 est, disons-le franchement, crucial. Ce sont peut-être elles, en réalité, qui bâtissent la justice pénale animalière tellement leurs interventions sont déterminantes pour l’application de la loi pénale35. Elles ont, en plus, cette spécificité de représenter l’animal en sa qualité d’individu. En effet, le propriétaire de l’animal n’est pas le mieux placé36 pour le représenter car il y a un risque de confusion des intérêts protégés entre l’animal pour lui-même et l’animal en tant qu’élément du patrimoine37. L’action pourrait tourner à la réparation du dommage causé au patrimoine ou au préjudice moral pour la perte de l’animal, soit une réparation au profit du propriétaire, alors que la suppression de la condition d’existence d’un préjudice, direct ou indirect, aux intérêts défendus par l’association induit que l’association agit pour l’intérêt personnel de l’animal, donc pour l’animal lui-même38. Pour autant, l’action civile de l’association n’est pas incompatible avec celle du propriétaire (art. 2 C.P.P.) qui est davantage dans une démarche réparatrice ou éventuellement vindicative. Le cumul des actions civiles est dès lors possible car elles ne défendent pas les mêmes intérêts.
Encore faut-il que l’infraction reprochée entre dans le périmètre d’action des associations. En vertu du principe d’interprétation stricte de la loi, une association n’est recevable à se constituer partie civile pour des infractions autres que celles expressément visées par l’article 2-13 du Code de procédure pénale39. Ont ainsi été jugées irrecevables les constitutions de partie civile pour les atteintes involontaires à l’animal sanctionnées par le Code pénal40, les contraventions relatives à la privation de nourriture, d’eau ou de soins du Code rural41, ou encore, pour la législation relative aux conditions d’abattage des animaux réprimées par le même code42. L’arrêt de la Cour de cassation du 28 novembre 2023 vient étendre cette liste. En l’espèce, la prévenue a été poursuivie pour le délit de détention d’animal malgré interdiction judiciaire et pour les contraventions au Code rural et de la pêche maritime de détention d’équidé sans déclaration, privation de soin à animaux par son détenteur, maintien d’animaux dans un environnement pouvant être cause de souffrance, détention de chiens non identifiés et acquisition d’équidé sans envoi de sa carte d’immatriculation. Le juge de premier degré l’a déclarée coupable des chefs susvisés et a déclaré irrecevables les constitutions de partie civile de plusieurs associations de défense des animaux. La prévenue, le ministère public et les quatre parties civiles jugées irrecevables ont fait appel du jugement. La Cour d’appel de Caen a rendu un arrêt infirmatif le 31 octobre 2022. Elle a estimé la constitution des quatre parties civiles irrecevable sur le fondement de l’article 2-13 mais recevable sur le fondement de l’article 2 du Code de procédure pénale, aux motifs que ce texte leur permettait de demander réparation d’une atteinte portée à l’intérêt collectif qu’elles défendaient et qui entrait dans leur objet social, et partant, a déclaré la prévenue entièrement responsable du préjudice subi par les associations. La Cour de cassation profite du pourvoi formé par la prévenue pour établir une distinction entre l’article 2 et l’article 2-13 du Code de procédure pénale selon la finalité de l’action. Sur le fondement du premier article, une association ou une fondation dont l’objet statutaire est la défense et la protection des animaux ne peut exercer les droits reconnus à la partie civile que si elle justifie d’un préjudice présentant un caractère direct et personnel. Autrement dit, l’association doit se constituer partie civile sur le fondement de l’article 2 lorsque l’action à vocation à réparer un préjudice qu’elle aurait directement subi. Le préjudice lui est direct et personnel, l’action est pour elle-même. La réparation de l’atteinte portée aux intérêts collectifs qu’elle a pour mission de défendre ne peut être sollicitée que dans les conditions prévues par le second article. Ainsi, l’association doit se constituer partie civile sur le fondement de l’article 2-3 quand elle agit pour défendre les intérêts de l’animal. L’atteinte est portée à l’animal, l’action est pour l’animal. En l’espèce, l’action civile des associations avait bien pour finalité la réparation des atteintes portées aux animaux, la constitution de partie civile était alors soumise aux conditions de l’article 2-13. Or, les infractions reprochées à la prévenue ne figurent pas dans l’énumération limitative du texte. En conséquence, les constitutions de partie civile étaient irrecevables, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel.
En effet, la loi EGALIM du 30 octobre 201843 n’a élargi les prévisions de l’article 2-13 du Code de procédure pénale qu’aux articles L. 215-11 et L. 215-13 du Code rural. La loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale44 a omis d’actualiser l’article qui parle encore des « sévices sexuels » alors qu’ils ont été absorbés par les « atteintes sexuelles » par la même loi. En application du principe d’interprétation stricte de la loi pénale que la Cour de cassation applique ici rigoureusement, les associations ne devraient plus pouvoir agir pour des faits à caractère sexuel – ce sont désormais des atteintes sexuelles – tant que le législateur n’aura pas corrigé cette lacune. L’article exclut ainsi les nouveaux délits d’atteintes sexuelles et de proxénétisme animalier ainsi que les délits d’enregistrement et de diffusion d’images violentes issus de ladite loi. Il ne mentionne pas non plus les atteintes involontaires à l’animal, ni les contraventions du Code rural. Enfin, restent toujours exclues toutes les infractions du Code de l’environnement, notamment les atteintes à la conservation d’espèces animales protégées. Et que l’on cesse de dire que la protection de l’animal et la protection de l’environnement sont deux choses différentes car non seulement il n’y a aucune incompatibilité, au contraire, elles sont complémentaires et solidaires, mais surtout, l’action civile des associations de protection animale a été instituée… par la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature45, laquelle se compose au surplus d’un chapitre II consacré à « la protection de l’animal ».
L’effectivité de la protection pénale de l’animal est donc dépendante de la réforme indispensable de l’article 2-13 du Code de procédure pénale. Il y a deux manières de faire. La première, à court terme, est d’étendre la liste aux infractions du Code rural et du Code de l’environnement. La seconde, à plus ou moins long terme, est de renouveler la protection pénale pour l’animal46 et de modifier en conséquence l’article 2-13 du Code de procédure pénale.
J. Leborne
- 1 V., par ex., art. L. 521-21-I-2° Code env.
- 2 V. supra.
- 3 Sur cette catégorie d’infractions sui generis, v. J.-H. ROBERT, Droit pénal général, 6ème édition refondue, PUF, 2005, p. 207.
- 4 Dans le même sens, v., déjà, Crim. 1er juin 2010, pourvoi n° 09-87.159, inédit et Crim., 18 oct. 2022, pourvoi n° 21-86.965, publié au Bulletin.
- 5 Art. 121-3, al. 2, CP.
- 6 Art. 121-3, al. 1er, CP.
- 7 Art. 121-3, al. 3, CP.
- 8 Cons. cons., décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981.
- 9 Cour EDH, 25 mai 1993, Kokkinakis c/ Grèce,.
- 10 Pour un exemple, mutatis mutandis, v. l’article L. 223-5 I et III du Code de la route.
- 11 Pour un exemple dans le Code pénal, v. l’article 226-22 dont le premier alinéa punit de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende « le fait, par toute personne qui a recueilli, à l'occasion de leur enregistrement, de leur classement, de leur transmission ou d'une autre forme de traitement, des données à caractère personnel dont la divulgation aurait pour effet de porter atteinte à la considération de l'intéressé ou à l'intimité de sa vie privée, de porter, sans autorisation de l'intéressé, ces données à la connaissance d'un tiers qui n'a pas qualité pour les recevoir » et dont le deuxième aliéna dispose que « la divulgation prévue à l'alinéa précédent est punie de trois ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende lorsqu'elle a été commise par imprudence ou négligence ».
- 12 J.-P. MARGUENAUD, F. BURGAT et J. LEROY, Le droit animalier, PUF, 2016, p. 89 et s.
- 13 J. PRADEL et M. DANTI-JUAN, Droit pénal spécial, Cujas, 8e éd., 2020, p. 745, n° 1130.
- 14 T. pol., Saint-Girons, 20 avril 1998.
- 15 D. ROETS, « La dangerosité animalière et l’article R. 622-2 du Code pénal », RSDA, 2012, n° 1, p. 86, spéc. p. 87.
- 16 J.-Y. MARECHAL, « Fascicule 20. Art. R. 622-2 : contraventions contre les personnes (2e classe) – Divagation d’animaux dangereux », JurisClasseur Code Pénal, 2021, n° 13.
- 17 En ce sens où le juge exigeait un défaut total de surveillance pour caractériser la divagation (M. REDON, « Animaux », Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, 2022, n° 21 ; Cass. crim., 8 novembre 1867 ; T. Béziers, 8 juillet 1981).
- 18 J. LEROY, « Divagation d’animaux dangereux (art. R. 622-2. C.P.). Eléments constitutifs. Blessures involontaires. Non assistance à personne en péril », RSDA, 2013, n° 2, p. 48, spéc. p. 49.
- 19 CA Pau, 2 octobre 1991, JurisData, n° 1991-044360 ; CA Poitiers, 2 février 2007, JurisData, n° 2007-330206.
- 20 CA Douai, 23 octobre 2008, JurisData, n° 2008-373278 ; CA Paris, 26 janvier 2009, JurisData, n° 2009-375277.
- 21 CA Paris, 24 septembre 1990, JurisData, n° 1990-024416 ; CA Nancy, 25 mars 1999, JurisData, n° 1999-045071 ; CA Douai, 18 janvier 2006, JurisData, n° 2006-301192.
- 22 J.-Y. MARECHAL, « Fascicule 20. Art. R. 623-3 : contraventions contre les personnes (3e classe) – Excitation d’animaux dangereux », JurisClasseur Code Pénal, 2010, n° 10.
- 23 G. ROUSSEL, « La protection de l’homme face à l’animal, être doué de dangerosité », in F.-X. ROUX-DEMARE (dir.), L’animal et l’homme, Mare & Martin, coll. Droit privé & sciences criminelles, 2019, p. 293-301, spéc. p. 296.
- 24 Cass. crim., 15 décembre 2021, n° 21-81.864.
- 25 Considérant 29, ibid.
- 26 X. PIN, « La privatisation du procès pénal », RSC, 2002, n° 2, p. 245.
- 27 J. LARGUIER, « L’action publique menacée (À propos de l’action civile des associations devant les juridictions répressives) », D., 1958, p. 29.
- 28 X. PIN, « La privatisation du procès pénal », op cit.
- 29 Ibid.
- 30 J.-P. MARGUENAUD, F. BURGAT, J. LEROY, Le droit animalier, PUF, 2016, p. 218.
- 31 Art. 16, Loi n° 94-89 du 1er février 1994 instituant une peine incompressible et relative au nouveau code pénal et à certaines dispositions de procédure pénale, JORF, n° 27, 2 février 1994, p. 1803.
- 32 I. DEMESLAY, « L’action des refuges et des associations de défense des animaux », in F.-X. ROUX-DEMARE (dir.), L’animal et l’homme, Mare & Martin, coll. Droit privé & sciences criminelles, 2019, p. 317-330.
- 33 C. LACROIX, « L’article 2-13 du CPP relatif à l’action civile des associations de protection, 20 ans après (Pour une nouvelle optimisation de la défense de l’animal victime ?), RSDA, 2013, n° 1, p. 339, spéc. p. 342.
- 34 C. DARNAULT, « Le rôle des associations locales dans l’effectivité de la protection juridique de l’animal », in O. LE BOT (dir.), Les mutations contemporaines du droit de l’animal, DICE Éditions, coll. Confluence des droits, 2023, p. 299-314.
- 35 Ibid.
- 36 Il y a, plus radicalement, incompatibilité lorsque le propriétaire de l’animal est l’auteur des infractions reprochées envers l’animal.
- 37 J.-P. MARGUENAUD, « La personnalité juridique des animaux », D., 1998, n° 20, p. 205.
- 38 J.-P. MARGUENAUD, F. BURGAT, J. LEROY, Le droit animalier, op cit.
- 39 Cass. crim., 24 octobre 2000, n° 99-87.682.
- 40 Cass. crim., 22 mai 2007, n° 06-86.339.
- 41 Cass. crim., 30 mai 2012, n° 11-88.268.
- 42 Cass. crim., 13 mars 1984, JurisData, n° 1984-701781.
- 43 Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine, durable et accessible à tous, JORF, n° 253, 1 novembre 2018, texte n° 1.
- 44 Loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, JORF, n° 279, 1 décembre 2021, texte n° 1.
- 45 Art. 14, Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, JORF, n° 162, 13 juillet 1976, p. 4203.
- 46 J. LEBORNE, La protection pénale de l’animal, Mare & Martin, coll. Bibliothèque des thèses, 2024 (à paraître).