Actualité juridique : Jurisprudence

Sommaire de jurisprudences

  • Delphine Tharaud
    Professeure de droit privé
    Université de Limoges
  • Brigitte Des Bouillons
    Docteure en droit
    Université de Rennes 1

I. Les animaux au sein des relations contractuelles

A. Les contrats

  • La vente

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

  • Bail rural

Cass. Civ. 3e, 7 septembre 2023, n° 21-18.611

Bail rural (non) – Usage des biens

Une SCI a donné à bail à M. P. des boxes, des paddocks, un manège, une carrière, une allée de cavalerie et des selleries par l’intermédiaire de deux conventions qualifiées par les parties de baux commerciaux. Le locataire demande la requalification des contrats en baux ruraux devant le tribunal paritaire des baux ruraux. Le liquidateur de celui-ci reprend l’instance et conteste la décision n’ayant pas accédé à la demande de requalification. Le cœur de l’arrêt porte sur l’usage des biens objets des baux. En effet, les conventions excluaient toute autre activité que l’usage d’écurie d’élevage et de propriétaire. N’était ainsi pas mentionnée l’activité d’entraînement d’équidés, activité pourtant développée par le locataire après la conclusion des contrats. Pour le liquidateur judicaire, les lieux permettaient un tel usage et supposaient ainsi d’accepter l’existence d’une activité agricole. Cette dernière devant alors être contractualisée par le biais d’un bail rural. Cependant, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel qui s’en est tenue à une lecture littérale des deux conventions excluant toute activité non mentionnée dans celles-ci, appuyée par un contrat antérieur visant explicitement l’interdiction faite au locataire d’avoir une activité de centre équestre. Cependant, la cassation est obtenue sur un autre point. En effet, les juges du fond ont condamné le locataire à payer des dommages et intérêts à la SCI pour résistance abusive en demandant la requalification en bail rural lorsqu’il s’est agi de payer les loyers à la suite de la délivrance d’un commandement de payer. Au titre de l’article 1240 du Code civil, la Cour de cassation estime que ces motifs sont impropres à caractériser une résistance abusive. En effet, même si leur jugement a été infirmé par la Cour d’appel, les premiers juges avaient donné gain de cause au demandeur.

D. Tharaud

Cass. Civ. 3e, 30 novembre 2023, n° 21.23-951

Fermage – Haras – Modalités de calcul du loyer

Une SCI a donné à bail à une femme des parcelles et des bâtiments à usage d’habitation et à usage de prise de pension de chevaux et cours d'équitation. Ce contrat a été requalifié par un arrêt irrévocable en bail rural. Par la suite, la locataire a demandé au tribunal paritaire des baux ruraux de fixer le fermage concernant les bâtiments d’exploitation. La juridiction a alors ordonné une expertise, laquelle devant tenir compte des usages professionnels et des minima et maxima applicables dans les départements voisins des Yvelines, département dans lequel se trouvent les biens. Le rapport de l’expert fixe une valeur locative pour des bâtiments de haras en se référant à un arrêté du préfet du département du Calvados. La locataire conteste alors la somme qu’elle doit verser à la SCI. La Cour de cassation rappelle le pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond quant à la détermination de la qualité des lieux (ici, la présence de 28 box aménagés et aérés disposés en U autour d’une réserve destinée à stocker le matériel rend la qualification de haras pertinente). Par ailleurs, le barème élaboré par le préfet du Calvados est cohérent avec celui des Yvelines. Le pourvoi de la locataire qui visait à contester ces modalités de calcul est donc rejeté.

D. Tharaud

B. La responsabilité contractuelle

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

C. Le droit du travail / les relations de travail

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

II. Les animaux protégés

A. Espèces protégées

Cass. Crim., 14 novembre 2023, n° 22-86.922

Tortue cistude – Zone Natura 2000 – Étang – Mise en eau – Destruction d’habitat d’espèce protégée

La propriétaire d’un étang situé dans une zone classée Natura 2000 et accueillant une population de tortues cistude a effectué des travaux afin de réparer une brèche mais ne l’a pas remis en eau. Après mise en demeure, elle est poursuivie pour destruction d’habitat d’espèce protégée. Après une relaxe, un appel fructueux a été formé par le ministère public et les parties civiles. Devant la Cour de cassation, la propriétaire conteste sa culpabilité sans succès. En effet, après avoir rappelé que la tortue cistude d’Europe appartient à la catégorie des espèces protégées, la Cour constate que la propriétaire n’a pas remis en eau l’étang malgré plusieurs mises en demeure et qu’elle ne justifie d’aucune impossibilité technique pour cela. La Cour rappelle également que le délit d’atteinte à la conservation des habitats naturels ou espèces animales non domestiques (art. L. 415-3 du Code de l’environnement) peut être consommé par la simple abstention de satisfaire aux prescriptions établies et qu’une faute d’imprudence ou de négligence suffit à caractériser l’élément moral de ce délit.

D. Tharaud

Conseil d'État, 10 juillet 2023, n° 465654, n° 466825

Ours brun – Tirs d’effarouchement renforcé – Femelle en gestation – Ourson – Effets négatifs (non)

Rejet des deux requêtes de l’Association One Voice et de l’Association Sea Shepherd demandant au Conseil d’État d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 juin 2022 de la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire relatif à la mise en place de mesures d'effarouchement de l'ours brun dans les Pyrénées pour prévenir les dommages aux troupeaux.
Si la Haute juridiction a censuré à plusieurs reprises les arrêtés ministériels organisant les mesures d’effarouchement renforcé comme étant insuffisantes pour assurer le maintien de l’espèce dans un état de conservation favorable (CE, 4 février 2021, Association Ferus – Ours, Loup, Lynx, n° 434058 ; 31 octobre 2022, Association One Voice et a., n° 454633, 455273), plus récemment encore en annulant l’arrêté, en tant qu’il ne prévoit pas de mécanisme encadrant la mise en œuvre du dispositif d’effarouchement renforcé auprès des femelles en gestation et des femelles suitées, accompagnées de jeunes oursons (CE, 31 octobre 2022, Association One Voice et a., n° 454633, 455273), il n’en va pas de même de l’arrêté contesté ici. En effet, pour les juges du Conseil d’État, il ressort des éléments versés au dossier par le ministre que la mise en œuvre de ces tirs d’effarouchement n’a eu aucun effet négatif particulier pour l’animal, comme d’éventuels dommages auditifs, ou sur la situation des femelles en gestation ou suitées dont le nombre de femelles a sensiblement augmenté en 2019 et 2020, enfin qu'aucune séparation entre une femelle et son ourson n'a été constatée justifiant l’annulation.

B. des Bouillons

B. Chasse et pêche

CE, 13 novembre 2023, n° 459252

Fichier national du permis de chasser – Fédération nationale des chasseurs – Décret – Abstention – Absence de délai raisonnable – Astreinte

L’article L. 423-4 du Code de l’environnement, dans sa rédaction résultant de l’article 13 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l’Office français de la biodiversité, prévoit la création « d’un fichier national du permis de chasser constitué du fichier central des titres permanents du permis de chasser géré par l’Office français de la biodiversité et du fichier central des validations et autorisations de chasser géré par la Fédération nationale des chasseurs » avec un régime à aménager par décret, fichier qui n’a toujours pas été pris.
Saisi par l'association pour la protection des animaux sauvages, ASPA, le Conseil d’État annule la décision implicite de la Première ministre refusant de prendre le décret, considérant que les difficultés alléguées ne sont pas de nature à justifier une abstention qui s'est prolongée au-delà d'un délai raisonnable, plus de quatre ans depuis la promulgation de la loi du 24 juillet 2019, et enjoint à la Première ministre de prendre le décret dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

B. des Bouillons

CE, 6 décembre 2023, n° 468959

Grand tétras – Chasse – Suspension (oui) – Ensemble du territoire

Rejet de la requête de la Fédération des chasseurs demandant au Conseil d’État d’annuler l’arrêté du 1er septembre 2022 du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires suspendant la chasse au grand tétras, en France métropolitaine, pour une durée de cinq ans.
L’arrêté du 1er septembre 2022 a été pris en exécution de la décision n° 453232 du 1er juin 2022 du Conseil d’État, statuant au contentieux annulant pour excès de pouvoir, à la demande de France Nature Environnement Midi-Pyrénées et autres, le refus implicite de la ministre de la transition écologique opposé à leur demande de suspendre la chasse au grand tétras sur le territoire métropolitain pour une durée de cinq ans, et enjoignant au ministre chargé de la chasse de prendre un arrêté avant le 15 juillet 2022.
Le Conseil d’État ne retient pas le moyen tiré d’un vice de procédure, le Conseil national de la chasse a bien été consulté et son avis n’a pas été vicié du fait de la décision du Conseil d’État ordonnant la suspension de la chasse dans sa décision de juin, ni le moyen tiré de l’erreur d’appréciation. En effet, l’arrêté attaqué a été adopté à la suite de sa décision du 1er juin 2022, et si la chasse du grand tétras n’était pas interdite du fait notamment de son inscription à la partie B de l’annexe II de la directive du 30 novembre 2009, la gravité de la situation de cette espèce en mauvais état de conservation imposait de s’abstenir de tout prélèvement sur l’ensemble du territoire pendant une durée assez longue.

B. des Bouillons

TA Marseille, 13 octobre 2023, n° 2308906.

Tétras-lyre – Perdrix bartavelle – Prélèvements – Espèces quasi-menacées – Absence de participation du public

Suspension de l’exécution de l’arrêté du 15 septembre 2023 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a fixé à 73 le nombre maximum d’individus de l’espèce tétras-lyre et à 162 le nombre maximum d’individus de l’espèce perdrix bartavelle susceptibles d’être prélevés pour la campagne de chasse 2023/2024, répartis selon trois régions bioclimatiques (Alpes internes du nord, Alpes internes du sud et Préalpes du nord).
Le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille a considéré que l’exécution de la décision en litige porte une atteinte grave et immédiate aux intérêts de l’association One Voice et que le tétras-lyre et la perdrix bartavelle figurent à l’annexe I (espèces à conserver) et à l’annexe II (espèces chassables) de la directive susvisée. Ces espèces sont classées « quasi-menacées » sur la dernière liste rouge des oiseaux nicheurs de France métropolitaine.
En outre, le juge relève qu’eu égard à sa nature, son objet et sa portée, particulièrement son incidence directe et significative sur l’environnement, l’arrêté devait être précédé d’une phase de participation du public prévue à l’article 7 de la Charte de l’environnement, que la méconnaissance de cette procédure préalable est de nature à faire naître un doute sérieux sur sa légalité.

B. des Bouillons

TA Marseille, 13 octobre 2023, n° 2308731

Perdrix bartavelle – Perdrix rochassière – Tétras-lyre – Prélèvements – Espèces vulnérables

Suspension de l’exécution de l’arrêté du 14 septembre 2023 par lequel le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a fixé, pour la saison cynégétique 2023/2024, les attributions potentielles minimales et maximales pour les autorisations de prélèvement de galliformes de montagne au sein du département, en ce qu’il autorise le prélèvement de 35 perdrix bartavelle et rochassière dans les régions bioclimatiques « Alpes interne du sud » (17), « Alpes maritimes et méridionales » (17) et « Préalpes du sud orientales » (1) et les prélèvements de 45 tétras-lyre dans les régions bioclimatiques « Alpes interne du sud » (18), « Alpes maritimes et méridionales » (18) et « Préalpes du sud orientales » (9).
Dans cette seconde ordonnance, le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille, prenant en compte les données statistiques de ces espèces pour 2023, leur caractère vulnérable, la réduction de leur aire de distribution géographique, ainsi que leur indice de reproductibilité en déclin, a considéré que cet arrêté autorisant la chasse du tétras lyre et de la perdrix bartavelle méconnaissait l’objectif de leur conservation défendu par l’association One Voice.

B. des Bouillons

TA Grenoble, 18 octobre 2023, n° 2306162

Tétras-lyre – Perdrix bartavelle – Plans de chasse individuels – Quotas

Suspension de l’exécution des 115 « plans de chasse individuels » attribués par le président de la fédération départementale des chasseurs de la Savoie aux ACCA le 13 septembre 2023 et permettant le prélèvement de 313 à 404 tétras-lyres et de 159 à 219 perdrix bartavelle.
La première donnée est le « quota » fixé et la seconde « l'attribution maximale » qui implique un décompte, sur les attributions ultérieures, de ce qui excède le quota annuel. Saisi par les associations One Voice et Aspas, le juge des référés observe que ces décisions sont susceptibles de porter atteinte à l'objectif de conservation des deux espèces visées. Par suite, la condition d'urgence, prévue par les dispositions précitées de l'article L. 521-1 du Code de justice administrative, doit être considérée comme remplie.

B. des Bouillons

TA Pau, 27 septembre 2023, n° 2202115

Perdrix grise – Prélèvements – Participation du public

Annulation de l'arrêté du 15 septembre 2022 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques fixe le prélèvement maximal autorisé de la perdrix grise de montagne dans le massif montagnard pour la campagne de chasse 2022-2023.
L’arrêté attaqué doit être regardé comme ayant une incidence directe et significative sur l'environnement, ce qui imposait systématiquement une participation du public préalable. Le non-respect par le préfet des Pyrénées-Atlantiques de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 123-19-1 du Code de l'environnement préalablement à l'édiction de l'arrêté attaqué a privé le public, et notamment les associations de défense de l'environnement, d'une garantie.

B. des Bouillons

CE, 28 juillet 2023, n° 44564 ; TA Versailles, 11 août 2023, n° 2305958 et TA Caen, 24 novembre 2023, n° 2201342 - 2201597

Blaireau – Vénerie sous terre – Période de chasse – Période de chasse complémentaire – Atteinte au bon état de la population

Rejet de la requête de l’Association AVES France, de l'Association pour la Protection des Animaux Sauvages et de l'association One Voice demandant au Conseil d'État d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la ministre de la transition écologique et solidaire sur leur demande tendant à l'interdiction de la vénerie sous terre du blaireau et d'enjoindre au ministre d'interdire la vénerie sous terre du blaireau et d'abroger l'article R. 424-5 du Code de l'environnement et les articles 1, 3, 4, 5 et 6 de l'arrêté du 18 mars 1982 relatif à l'exercice de la vénerie, afin d'en exclure le blaireau.
Pour le juge, les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 424-5 du Code de l'environnement, permettant au préfet d'autoriser une période de chasse complémentaire par vénerie sous terre du blaireau à compter du 15 mai, ne sont pas : « par elles-mêmes de nature à porter atteinte au bon état de la population des blaireaux ni à favoriser la méconnaissance, par les chasseurs, de l’interdiction légale de destruction des petits blaireaux ».
Pour autant cet arrêt du Conseil d’État ne fait pas jurisprudence. La destruction des blaireaux ne s’étend pas à tous les départements français. On relève plus d’une dizaine de décisions prises par les juges des référés de tribunaux administratifs statuant dans un sens opposé, à l’instar des deux décisions citées ci-dessous.
À la suite d’un recours de la LPO et One Voice, le juge des référés du Tribunal administratif de Versailles vient de suspendre en urgence la période complémentaire de vénerie sous terre autorisée du 15 juillet au 16 septembre 2023 dans le département francilien, considérant que « l’exercice de la vénerie sous terre, pendant la période complémentaire instituée par […] l’arrêté en litige du 15 juillet 2023 au 16 septembre 2023, parait susceptible de causer la mort de petits blaireaux ».
Par un jugement du 24 novembre 2023, le Tribunal administratif de Caen saisi par l’ASPAS et AVES annule l’arrêté préfectoral du 16 mai 2022 autorisant deux périodes complémentaires de vénerie sous terre du 1er juillet 2022 au 15 septembre 2022 et du 15 mai 2023 au 30 juin 2023 dans l’Orne. Cet arrêté avait fait l’objet d’une suspension en juillet 2022.

B. des Bouillons

TA Châlons-en-Champagne, 27 octobre 2023, n° 2302392 ; TA Bordeaux, 27 octobre 2023, n° 2305791 ; TA Pau, 3 novembre 2023 n° 2302712, 2302726 et 3 novembre 2023, n° 2302711, 2302725

Vanneau huppé – Pluvier doré – Alouette – Piégeage traditionnel – Capture – Fins scientifiques – Mauvais état de conservation de l’espèce

Saisi en référé par l’Association LPO et l’Association One Voice, le juge des référés du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne suspend l’exécution de l'arrêté du 13 octobre 2023 du préfet des Ardennes autorisant à des fins scientifiques la capture dans le milieu naturel de 500 vanneaux huppés et de 15 pluviers dorés à l'aide de filets. Après avoir rappelé la décision du Conseil d'État du 24 mai 2023 n° 459400 ordonnant l’abrogation des arrêtés de 1989 encadrant les pratiques de piégeage traditionnel d’oiseaux sauvages, illégales au regard du droit européen, le juge considère que l'arrêté litigieux emporte des effets qui portent une atteinte suffisamment grave et imminente à la protection des espèces animales et à l'environnement que l'association One Voice et la Ligue pour la protection des oiseaux ont pour objet de défendre, en raison notamment du mauvais état de conservation de l'espèce.
Dans le même sens le Tribunal administratif de Bordeaux a suspendu les arrêtés préfectoraux autorisant la capture « expérimentale » de 6 000 alouettes des champs à l’aide de pantes (filets horizontaux) ou de matoles (cages tombantes) dans les départements de la Gironde et du Lot-et-Garonne.
A contrario, par deux ordonnances, le Tribunal administratif de Pau a rejeté les demandes de suspension des arrêtés préfectoraux autorisant la capture « expérimentale » de 500 alouettes dans les départements des Landes et des Pyrénées Atlantiques, à l’aide de pantes. Le juge a considéré que l’expérimentation contestée ne concernait pas la chasse à proprement parler mais la capture temporaire à titre expérimental d’une quantité infime d’oiseaux qui doivent être ultérieurement relâchés. Une telle étude qui porte sur les effets particuliers d’un mode de chasse, par la capture des alouettes au moyen de pantes et de matoles, n’est pas contraire aux objectifs de la directive, ni à la jurisprudence de la Cour de justice, ni à celle du Conseil d’État qui ne posent pas d’interdiction générale et abstraite des chasses traditionnelles.

B. des Bouillons

TA Grenoble, 24 octobre 2023, n° 2306528

Lièvre brun – Lièvre variable – Marmotte – Période de chasse – Urgence (non)

La condition de l’urgence n’étant pas caractérisée, le juge des référés rejette les recours formés par l'association Justice animaux Savoie (AJAS), l'association Aves France, l'association One voice, l'association France nature environnement (FNE) Savoie, l'association Animal cross et l'association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS), demandant la suspension de l'arrêté du préfet de la Savoie du 30 juin 2023 relatif à l'ouverture et à la clôture de la chasse durant la campagne 2023-2024 dans le département en tant qu'il n'a pas interdit la chasse à la marmotte et aux lièvres brun et variable, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.

B. des Bouillons

TA Guadeloupe, 1er décembre 2023, n° 2301413 et 2301415

Colombe à croissant – Pigeon à cou rouge – Période de chasse – Référé – Caractère provisoire – Caractère exécutoire

Faisant écho à la requête de la ligue pour la protection des oiseaux (LPO), l’association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS), l’association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles (ASFA), l’association TO-TI-JON et l’Association des Mateurs Amicaux des Z’Oiseaux et de la Nature aux Antilles (AMAZONA), le Tribunal administratif, pour la seconde fois de la saison de chasse 2023-2024, suspend les arrêtés n° 971-2023-11-07-00004 du 7 novembre 2023 du préfet réglementant la chasse à la colombe à croissant, au pigeon à cou rouge et aux limicoles en Guadeloupe et à Saint Martin. Une occasion pour lui de rappeler que le caractère provisoire des décisions du juge des référés qui n’ont pas l’autorité de la chose jugée au principal, sont néanmoins exécutoires et qu’en vertu de l’autorité qui s’attache à toutes décisions de justice, sont obligatoires. Appliquée à l’espèce, la suspension des arrêtés préfectoraux n°971-2023-11-07-00004 du 7 novembre 2023 à laquelle il n’a pas été mis fin, ne permettait pas au préfet de reprendre la même décision de réouverture de la période de chasse au 8 novembre 2023 sans qu’il ait remédié au vice que le juge avait pris en considération par ses ordonnances du 25 septembre n° 2301087 et 2301099. Ce faisant les arrêtés du 7 novembre ont directement méconnu l’autorité qui s’attache aux ordonnances.

B. des Bouillons

  • Santé animale

Cass. Civ. 2e, 9 novembre 2023, n° 22-11.570

Élevage cunicole – Assurance – Maladie - Infertilité

Un élevage de lapins a été confronté à l’infertilité de ses animaux reproducteurs au mois de janvier 2017. Il a effectué une déclaration de sinistre auprès de son assurance le 1er septembre 2017. Cette dernière refuse sa garantie en se fondant sur la tardivité de la déclaration de sinistre et l’absence de prise en charge des décès d’animaux causés par des maladies. Le premier moyen, fondé sur une dénaturation des dispositions contractuelles sur les conditions de la déclaration des sinistres, obtient l’écoute des juges du Quai de l’horloge puisque la compagnie d’assurance a mis en œuvre une perte totale de garantie alors que l’article pertinent parlait, hors la situation d’un cas de force majeure ou fortuit, d’une indemnité proportionnée aux dommages causés par la déclaration de sinistre tardive. Concernant le second moyen portant sur la question de l’exclusion des garanties lorsque les dommages subis par les animaux ont pour cause une maladie, la Cour de cassation accueille également le moyen. Rappelant sous la forme d’un principe qu’en matière d’exclusion de garantie c’est à l’assureur de rapporter la preuve de la réunion des conditions de fait de celle-ci, la Cour de cassation estime que l’assureur ne pouvait se retrancher uniquement derrière le fait que l’infertilité des 40 lapins concernés n’étaient pas en bonne santé, même si aucune cause n’avait pu être identifiée. En accueillant cette argumentation, alors que l’assureur ne démontrait pas que les dommages avaient pour cause une maladie, les juges de la Cour d’appel ont inversé la charge de la preuve.
L’arrêt est donc cassé. Après cette conclusion judiciaire, il reste à noter que le contrat portait sur l’élevage de volailles auxquels semblent donc être associés les lapins dans le cadre des contrats proposés par la compagnie d’assurance concernée.

D. Tharaud

TA Grenoble, 16 novembre 2023, n° 2202515

Bouquetin – Brucellose – Euthanasie – Abattages indiscriminés – Mesures plus douces

L’exécution de l’arrêté n° DDT-2022-0450 du 17 mars 2022 du préfet de la Haute-Savoie autorisant la capture de bouquetins et leur euthanasie en cas de séropositivité ainsi que des abattages indiscriminés sur l’ensemble du massif du Bargy et dans le massif de Sous Dine et des Aravis (jusqu’à 170 individus en 2022 puis 20 individus par an jusqu’en 2030), avait été suspendue en urgence une première fois par une ordonnance du 17 mai n° 2202516 puis une seconde fois par l’ordonnance du 15 juin n° 2303127, à la suite du recours de l’ASPAS, FNE AURA, FNE 74, AVES, Animal Cross, LPO et One Voice. Pour le juge des référés, il existait un doute sérieux quant à la légalité de la décision, qui avait écarté toute autre solution permettant la sauvegarde de l’espèce protégée.
Le Tribunal administratif de Grenoble confirme les deux ordonnances et annule l’arrêté n° DDT-2022-0450 du préfet de Haute-Savoie du 17 mars 2022. Ces dispositions qui ont pour objet de lutter contre l’apparition d’un foyer de brucellose dans un cheptel bovin du Grand Bornant entraînant l’abattage de tout le troupeau, ont été prises malgré l’avis défavorable du Conseil national de la protection de la nature (CNPN) ainsi que l’avis de l’ANSES, retenant d’autres scenarii permettant de réduire la prévalence de la brucellose tout en limitant l’impact sur les bouquetins, espèce protégée. De même, les mesures de bio-sécurité visant à réduire le risque de transmission aux cheptels domestiques n’ont pas été suffisamment mises en œuvre ni évaluées.

B. des Bouillons

  • Cause animale

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

III. Les animaux, êtres sensibles

A. L’alimentation animale (aspects sanitaires)

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

B. Maltraitance, actes de cruauté

CE, 20 octobre 2023, n° 470965

Cirques – Animaux non domestiques – Projet de loi (non) – Contrôle juridictionnel (non) – Irrecevabilité

Rejet de la requête présentée par le collectif des cirques pour obtenir du Conseil d'État l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet née du silence gardé par la Première ministre sur sa demande de soumettre au Parlement un projet de loi tendant à ce que soit conféré aux représentants de l'État, le pouvoir d'annuler les actes pris par les communes réglementant la tenue de spectacles itinérants incluant des espèces d'animaux non domestiques et tendant à ce qu'une circulaire soit adressée aux préfets sur l'accueil des cirques.
Le refus du Gouvernement de soumettre un projet de loi au Parlement, en application des dispositions de l'article 39 de la Constitution, touche aux rapports entre les pouvoirs publics constitutionnels et constitue une décision insusceptible de tout contrôle juridictionnel. Les conclusions dirigées contre un tel refus ne peuvent dès lors qu'être rejetées, elles sont irrecevables comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

B. des Bouillons

C. Euthanasie, bien-être animal

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

IV. Les animaux, être aimés

Cass. Civ. 1e, 5 juillet 2023, n° 22-18.750

Séparation – Chevaux – Dépôt – Frais de conservation – Restitution

L’affaire avait déjà été évoquée dans ces mêmes sommaires de jurisprudence et par la même autrice (RSDA, 2021-1, p. 251-252). Celle-ci introduisait l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 24 mars 2021 (n° 19-20.962) par ces mots : « Si la restitution d’un animal après la séparation d’un couple peut être douloureuse, elle peut aussi être matériellement délicate lorsqu’il s’agit de chevaux ». Qu’il nous soit permis ici de les reprendre en y ajoutant que l’amour des animaux peut conduire manifestement à l’obstination ! Les faits à l’origine de cette longue bataille judiciaire sont pourtant simples : l’union entre une femme et un éleveur de chevaux s’est achevée au bout de 11 ans. La rupture a été assortie d’une demande initiée par la première en vue de la restitution de 2 juments et de leurs 4 poulains (qui ont largement dépassé ce stade de développement en 2023…). Après une cassation à son bénéfice, la demandeuse forme à ce nouveau stade de la procédure un pourvoi concernant l’arrêt de la Cour d’appel de renvoi. Cette dernière, chargée de l’indemnisation de la femme considérée comme propriétaire des juments et des foals, n’a en effet pas admis toutes les demandes formulées par Mme Y. Deux points sont alors discutés. D’une part, la propriétaire des équins sollicitait une indemnisation relative à la violence de la rupture. La Cour de cassation valide l’analyse des juges du fond qui ont rejeté cette demande au motif qu’elle était nouvelle et n’avait pas de lien avec l’arrêt rendu par la Cour de cassation en 2021. Ainsi, le préjudice aux violences subies lors de la rupture n’entretient pas de lien avec le dommage moral et les pertes d’exploitation occasionnées par la privation des animaux. Autrement dit, la privation d’animaux ne peut être comprise comme une violence lors de la rupture. D’autre part, la question des frais de conservation des animaux ayant été tranchée lors d’un précédent arrêt de 2019 et ce point n’ayant pas fait l’objet d’une cassation lors de l’arrêt de la Haute juridiction en 2021, Mme Y. ne peut demander la restitution de ces sommes devant la Cour d’appel de renvoi.

D. Tharaud

CE, 20 novembre 2023, n° 489253

Cheval – Maladie –Droit de propriété (oui) – Vie privée (oui) – Lien affectif (oui) – Abattage (oui)

Rejet de la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 10 octobre 2023 ordonnant à Mme B. de faire procéder elle-même, par le vétérinaire de son choix, à l’abattage de l'équidé « Plaisir des fleurs » atteint d'anémie infectieuse avant le 22 octobre 2023, et précisant en outre que son défaut d'exécution pourrait faire l'objet de la sanction pénale prévue à l'article R. 228-1 du Code rural et de la pêche maritime.
Si le juge admet que l'arrêté litigieux porte atteinte au droit de propriété de Mme B. ainsi qu’au droit au respect de sa vie privée, du fait du lien affectif particulier établi avec ce cheval, il résulte de l'instruction que l’atteinte que cet arrêté porte aux libertés fondamentales mentionnées ne peut être regardée comme manifestement illégale, compte tenu du risque de propagation de la maladie avéré.

B. des Bouillons

V. Les animaux, causes de troubles

A. La responsabilité civile

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

B. La responsabilité administrative

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

C. La santé humaine

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

D. Les animaux dangereux

  • Imprudence – Négligence

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

  • Dégâts causés par les animaux

CE, 20 novembre 2023, n° 489082

Animaux sauvages – Espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (non) – Renard roux – Martre des pins – Corbeau freux – Fouine – Étourneau sansonnet – Geai des chênes

Rejet de requête de l'Association pour la protection des animaux sauvages demandant au juge des référés du Conseil d’État de suspendre l'exécution de l'arrêté du 3 août 2023 pris pour l'application de l'article R. 427-6 du Code de l'environnement et fixant pour trois ans la liste des « espèces susceptibles d'occasionner des dégâts » (Esod).
L’examen des différents motifs de l’arrêté par le juge que sont la présence et l’état de conservation de l'espèce en cause dans les départements où sa destruction est autorisée, l’importance de sa contribution aux équilibres écologiques ou à d'autres intérêts publics, les conditions et limites posées par l'arrêté à sa destruction, la nature et l’ampleur des atteintes que l'espèce serait susceptible de causer en l'absence d'exécution de l'arrêté, ne permettent pas d’affirmer que les conditions de l’urgence sont remplies pour le renard roux, la martre des pins, le corbeau freux, la fouine, l’étourneau sansonnet, le geai des chênes, six espèces visées par l'arrêté contesté.

B. des Bouillons

TA Lille, 10 juillet 2023, n° 2005453

Renard – Battue administrative – Élevages avicoles – Dommages (non) – Santé publique (non)

Annulation par le Tribunal administratif de Lille de l’arrêté préfectoral du 9 juillet 2020 autorisant des battues administratives de destruction de renards sans limite de nombre, par tirs de jour et/ou de nuit entre le 15 juillet 2020 et le 31 mars 2021 sur le fondement des dispositions de l’article L. 427-6 du Code de l’environnement, sur tout le territoire du département du Pas-de-Calais.
Cet arrêté était motivé par le fait que le renard était classé comme espèce susceptible d’occasionner des dégâts, qu’il était présent de manière significative sur le territoire du département et qu’il était nécessaire de réguler sa population pour prévenir les dommages aux élevages avicoles et aussi, dans l’intérêt de la santé publique, eu égard notamment aux risques de transmission de l’echinococcose alvéolaire, des sarcosporidiese et de la néosporose.
Au vu des pièces produites au dossier par l’Association de protection des animaux sauvages (ASPA), le Groupe ornithologique et naturaliste du Nord-Pas-de-Calais (GON), le Groupement pour la défense de l’environnement de Montreuil-sur-Mer et du Pas de Calais (GDEAM) et la Ligue pour la protection des oiseaux du Pas-de-Calais (LPO 62), le juge relève qu’il existe peu d’éléments permettant d’imputer aux renards les dégâts occasionnés aux élevages avicoles, et estime non fondés les risques sanitaires que présenteraient les renards pour les humains et les cheptels.

B. des Bouillons

TA Grenoble, 19 octobre 2023, n° 2102343

Sanglier – Cerf – Daim – Chevreuil – Blaireau – Battue administrative – Sécurité routière – Erreur d’appréciation

Annulation de l’arrêté du 5 janvier 2021 de la préfète de la Charente autorisant la destruction de grands animaux, par battue administrative du 5 janvier 2021 au 31 décembre 2021 sur le territoire de 14 communes.
Saisi par l'association Charente Nature, l'association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) et l'association Animaux heureux du Châtelard, le tribunal a considéré qu’en ordonnant la destruction des grands animaux (sangliers, cerfs, daims, chevreuils) et de blaireaux pour un motif de sécurité routière, la préfète de la Charente avait commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 427-6 du Code de l'environnement.

B. des Bouillons

  • Retrait

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

E. Les animaux nuisibles

Aucune jurisprudence pour ce numéro.

     

    RSDA 2-2023

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