Histoire moderne et contemporaine
Dossier thématique : Points de vue croisés

L'odyssée des captifs : les animaux rapportés de l'expédition Baudin (1800-1804)

  • Clotilde Maurau Boitard
    Docteure en Histoire moderne
    Université de Rouen, Membre associé du Groupe de Recherche en HIstoire

 

  1. Une ambitieuse expédition scientifique se prépare à l’aube du XIXe siècle. L’exploration des lointaines terres australes est en effet mise en place sous l’égide du ministère de la Marine française, du Consul et de l’Institut de France remplaçant les académies de l’Ancien régime. Ce projet éclot au cœur de la France post-révolutionnaire. Les sciences naturelles sont alors en pleine recomposition1. Pourtant, ce voyage est le fruit d’une longue tradition, la Monarchie puis l’Etat révolutionnaire ayant aussi organisé de lointaines expéditions scientifiques2. Par ailleurs, depuis quelques années, l’aire Pacifique est l’objet d’enjeux politiques entre les puissances européennes. Dans ce contexte, les navires Le Naturaliste et le Géographe larguent les amarres le 19 octobre 1800, sous le commandement du capitaine Baudin. Ce dernier prenant la tête du Géographe, le capitaine de frégate Hamelin pilote le Naturaliste. Ils sont accompagnés de 19 savants, en particulier René Maugé, aide naturaliste, ou François Péron, zoologiste. Les bateaux ne sont de retour que 3 ans plus tard, les cales chargées et l’équipage renouvelé en grande partie3.
  2. L’objet de cet article n’est pas de retracer ce voyage sourcé par plusieurs récits et de nombreux dessins et déjà étudié4. Des historiens ont en effet analysé les péripéties de ce parcours semé d’embûches, de déconvenues. D’autres se sont concentrés sur les relations parfois déplorables entre les membres de l’équipage : le Commandant Baudin est considéré comme autocratique et ces conditions provoquant de nombreuses désertions5. D’autres ont retracé les avancées en matière de cartographie, astronomie, géologie, minéralogie, botanique... Les conceptions de l’anthropologie naissante ont fait l’objet d’attentions particulières6. Il est question présentement de la vie d’animaux au destin bouleversé par cette exploration. Alors que le mot Voyage provient du mot latin viaticum, c’est-à-dire « ressources et provisions »7, nous nous questionnerons sur le sort de ces provisions si particulières en prolongeant les études déjà établies à ce sujet8. Nous axerons donc notre étude sur le vécu et le point de vue9 de ces passagers à poils ou à plumes rapportés en France, sans oublier les nombreux animaux embarqués morts et pour qui la rencontre avec les explorateurs constitue la fin du voyage.
  3. Nous nous interrogerons sur les motivations des scientifiques à rapporter le vivant sous différentes formes. Nous étudierons notamment les raisons qui poussent les savants à embarquer des animaux vivants alors que leur présence nécessite un fort investissement. Nous nous questionnerons également sur les modus operandi de leur capture. Enfin, nous terminerons sur les conditions de leur interminable périple vers l’Europe. Ces êtres vivants embarqués de force se retrouvent dans une situation paradoxale. Étant par définition acteurs de leur vie, ils sont transformés en simples objets d’étude, sans être maîtres de leurs mouvements.
  4. Les principales sources de cet article sont les récits de participants à l’expédition, notamment celui de François Péron10, de Nicolas Baudin11 et Pierre-Bernard Milius, officier de marine12. J’ai également consulté les journaux de bord de différents marins et savants, numérisés par l’université de Sydney13.

    I. Ramener le vivant mort ou vif ?

    A. Collectionner la vie

    a. Précieuses et fragiles cargaisons

  5. Le 25 mars 1804, le navire, le Géographe, s’approche de Lorient (la corvette baptisée le Naturaliste a jeté l’ancre en France quelques mois plus tôt, en juin 1803). Plus de cent mille échantillons, Naturalia ou artefacts, sont débarqués. François Péron écrit : « Le débarquement de tant d'objets précieux nous occupa près de quinze jours […] »14. Cette cargaison comporte une quantité impressionnante de graines, d’herbiers, d’animaux empaillés ou conservés dans des flacons d’eau de vie, de simples peaux ou squelettes d’animaux appartenant, entre autres, à 2500 espèces inconnues des Européens. Sur le Naturaliste, les objets naturalistes sont contenus dans 54 caisses15. Une partie des pièces de cette collection sont encore conservées16, bien que de nombreux éléments fragiles aient été détruits avant même d’arriver en France. Par ailleurs, au milieu de cet empilement de caisses ordonnées17, des cris sortent des cages, des ombres y bougent. François Péron déclare : « Indépendamment d'une foule de caisses […] nous avions […] une centaine d'animaux vivans, d’espèces rares ou tout-à-fait nouvelles »18. Ces animaux appartiennent à 46 espèces différentes19. Il a, avec son ami dessinateur Alexandre Lesueur, établi un tableau listant ces animaux20. Pourtant, il n’existe pas de recensement exhaustif, beaucoup d’animaux ayant péri durant le voyage ou très vite après leur arrivée.
  6. Aussi diverse que soit cette cargaison, elle possède toutefois une unité. Depuis le début de l’expédition, les membres de l’expédition ont constamment été en quête de trésors, souhaitant les rapporter, coûte que coûte. François Péron rapporte ainsi : « Tout ce qu'il étoit physiquement possible de conserver, ils l'ont rapporté, soit dans l’alcohol, soit empaillé avec soin, soit desséché, soit dans l'eau surchargée de muriate de soude. [...]. L'acquisition des animaux vivans ne leur a coûté ni moins de sacrifices ni moins de peines »21. Les savants sont ainsi des collectionneurs compulsifs aspirant à s’approprier le plus d’objets possible. En découvrant un animal marin, Nicolas Baudin exprime sa joie : « Le plaisir que nous procura la vue de ce zoophyte fit naître le désir de s’en procurer d’autres »22. Ce bonheur s’explique par la beauté de certains de ces animaux. « […] nos collections se sont enrichies de la magnifique Volute onduleuse », se réjouit Francois Péron23.
  7. De surcroît, les savants rêvent d’être les premiers à rapporter des espèces inconnues, rares ou insolites, même si certains êtres sont repoussants, tels des mollusques, inspirant une « espèce de dégoût […] » liée à « des formes bizarres, inconstantes, également difficiles à décrire, à dessiner, à conserver ; des couleurs le plus souvent ternes, obscures et désagréables ; une substance mollasse, visqueuse et dégoûtante au toucher […] »24. Les dirigeants du muséum, en particulier Cuvier et Lamark, ont d’ailleurs expressément demandé d’axer les recherches vers « […] l'observation des organismes inférieurs du plancton que l'on désignait, alors, sous le nom de Mollusques et Zoophytes pélagiens »25.
  8. De ce fait, on assiste à une véritable « course pour la connaissance naturelle »26 et le Graal de ces scientifiques est d’abord le vivant sous toutes ses formes. « La collection naturaliste devient encyclopédique et relève d’une volonté de miniaturiser le monde. « Au travers de son abrégé du monde, le collectionneur rend visible la "totalité" de la Nature »27.

    b. Saisir la diversité des formes du vivant

  9. Ces découvertes servent ainsi à comprendre la complexité de la vie. S’interrogeant sur le climat de la Nouvelle-Hollande, François Péron constate la dimension exceptionnelle de ce continent « comme si l’atmosphère, ainsi que tous les animaux et les végétaux de ce singulier continent, devoit avoir ses lois propres, et se soustraire à tous les principes de nos sciences, à toutes les règles de nos systèmes, à toute l’analogie de nos idées ! »28. Par exemple, le savant relève que les animaux sont davantage blancs à mesure que l’on s’approche de l’Antarctique29. Ces différences méritent d’être étudiées, notamment « […] quelques-uns de ces animaux, trop long-temps négligés par les naturalistes, et qui, par la bizarrerie de leurs formes, la singularité de leur organisation, l'élégance de leurs couleurs et la variété de leurs habitudes, méritent si bien de fixer l'intérêt de tous les hommes éclairés »30. Le savant ne doit pas seulement rapporter le plus d’animaux possible, mais comprendre le fonctionnement de la nature. François Péron constate : « Ainsi tout est lié dans le grand système de la nature […] souvent ces liens merveilleux échappent à nos sens ; mais lorsque nous pouvons arriver à les saisir, ils nous étonnent également et par l'importance de leurs résultats et par leur simplicité »31.
  10. François Péron cherche aussi à saisir les animaux dans leur milieu naturel. Il tente d’ailleurs, au retour de l’expédition, de réaliser une véritable zoographie et n’omet pas de classer les spécimens selon leur lieu de découverte. Il déclare à propos d’animaux marins : « […] lorsqu'il s'agit d'animaux aussi singuliers, aussi peu connus, l'observateur impartial ne doit omettre aucun fait important, alors même qu'il ne sauroit ni le concevoir ni l'expliquer »32. Pourtant, le muséum n’a pas poursuivi cette démarche novatrice33.
  11. Tâchons maintenant d’étudier sous quelles formes les savants rapportent leurs découvertes.

    B. Imiter la vie ?

    a. Raconter et dessiner la vie

  12. Les « dessins et les observations zoologiques sont une partie essentielle de la collection »34. Les voyageurs rapportent régulièrement les spectacles vivants qui se présentent à eux, notamment sur mer. Certains lieux sont impropres à la vie, d’autres peuplés de multiples créatures, et le navire traverse ces différents mondes. Des animaux, oiseaux ou poissons apparaissent, certains disparaissent aussitôt, d’autres suivent le navire pour glaner quelques restes tels les albatros et autres oiseaux des mers. Un jour, François Péron est ébloui par un troupeau de baleines : « […] qui s'avançoient vers nous avec toute la rapidité dont ces animaux sont capables. Jamais un pareil spectacle ne s'étoit offert à mes regards... »35. Une autre fois, marins et savants observent fascinés une mer phosphorescente et incandescente lié à la présence « d'une innombrable quantité d'animaux qui, soulevés par les vagues, entraînés par elles, nageoient à diverses profondeurs […] »36. Parallèlement, des dessinateurs sont chargés de représenter animaux, plantes et populations rencontrés. Charles-Alexandre Lesueur est notamment reconnu pour la valeur artistique de ses dessins. Recruté en tant qu’aide-canonnier, il devient officiellement dessinateur à la suite de départs divers37. François Péron loue la symbiose qui se noue entre eux : « Mon ami M. Lesueur fut toujours mon collaborateur et mon compagnon ; ce que je m'appliquois à décrire avec soin, il le dessinoit ou le peignoit lui-même avec cette exactitude et cette habileté qui lui ont mérité tant d'honorables suffrages. Tous nos travaux, toutes nos observations se faisoient sur des animaux vivans […] »38.
    Ornithorynque, Ornythorynchus - Tasmanie et Australie Charles-Alexandre Lesueur Aquarelle, gouache et crayon sur vélin 24,4 x 38,8 cm MHN Le Havre, inv. 80033
  13. Bien que ces récits publiés et dessins soient des constructions théâtralisées et artistiques39, les savants revendiquent leur exactitude. François Péron déclare ainsi retranscrire la vie des animaux de terres australes « d'après une méthode uniforme et absolue » et toujours après observations sur les animaux vivants40. Il insiste aussi sur l’importance de la représentation de ces animaux, pour certains inconnus des Européens : « D'ailleurs le doute, pour être repoussé lorsqu'il s'agit de ces êtres extraordinaires qui semblent se refuser à nos idées antérieures, a besoin d'être combattu par l'inspection immédiate de ces objets eux-mêmes. II étoit donc indispensable de les reproduire en nature »41. Pourtant, les peintres tuent souvent les modèles qu’ils immortalisent. Ainsi, des Malais baptisant les membres de l’équipage ont appelé Charles-Alexandre Lesueur « oran mati bonrou [l'homme tueur d'oiseau] »42. Car l’animal mort est omniprésent durant l’expédition.

    b. L’animal mort, base de la collection du vivant

  14. Les animaux sont également souvent tués durant l’expédition, pour être dessinés, disséqués, empaillés ou conservés dans l’alcool et parfois mangés par l’équipage. Pierre-Guillaume Gicquel, un officier, raconte ainsi qu’après avoir tué des albatros dont on a retiré de leur « estomac des mollusques, des tetes de médeuse et des seches ou Encornets, on les a ecorchés pour Les empailler et dissequer, La chair a eté servie sur la table. Cetait un Exelent plat pour nous en ce moment »43. De même, Nicolas Baudin raconte avoir tué, disséqué, empaillé et mangé un albatros44. Ainsi, les différentes utilisations de l’animal mort se complètent souvent mais, parfois, se télescopent. Un jour, un marsouin est péché. Une querelle s’en suit. Nicolas Baudin raconte : « Au lever du soleil, les pintres les naturalistes et les anatomistes ne manquerent pas de venir faire une visite au marsouin pris la véille et l’inconvénient qui en resultat fut que tous voulurent le travaillier au meme moment de sorte que les dessinateurs qui le vouloient placé sur le ventre et dans une position propre a en prendre les formes ne pouvoient saccorder avèc les anatomistes qui le vouloient sur le dos pour l’ouvrir »45.
  15. Les taxidermistes sont, pour leur part, particulièrement gourmands en vies animales alors qu’ils ont besoin de cadavres frais46. La fabrication et la conservation d’un animal mort nécessite ensuite des compétences complexes47. La difficulté est accrue, les empailleurs devant travailler sur des navires étroits et mouvants, ce qui explique l’embarquement de spécialistes à bord, tel René Maugé48). La peau est conservée « grâce au dépeçage, au tannage, au bourrage et montage »49. Les taxidrmistes mettent ensuite l’animal en scène comme étant vivant. La « visualisation des spécimens naturels est maximisée par différentes procédures, depuis la préparation des objets jusqu’à leur mise en scène pour donner l’illusion du vivant »50. Mais cette illusion n’a-t-elle pas mérité son nom ?

    c. La vie insaisissable ?

  16. Les acteurs de l’expédition témoignent constamment de la perte de ce qu’ils pourchassent, étant soumis aux aléas d’un voyage difficile. Ainsi, Nicolas Baudin rapporte que des naturalistes en expédition sur un rivage avaient été contraints d’abandonner leurs récoltes du jour51. Plus généralement, les savants ne parviennent pas toujours à saisir ce qu’ils s’accaparent. Nicolas Baudin raconte avoir emporté dans la « grande chambre » un animal marin phosphorescent capturé vivant. L’équipage admire « la lueur brillante » qui luit avant de s’éteindre avec la vie de l’animal52. Les savants détruisent ce qu’ils cherchent à s’approprier et ce par le simple fait de vouloir se l’accaparer. François Péron fait un constat assez similaire : « Cette phosphorescence active des animaux […] est tellement dépendante de l'organisation et de la vie, qu'elle s'exalte, s'affoiblit et s'éteint avec elle, pour ne plus se reproduire après la mort »53.
  17. La transformation de l’animal mort en spécimen naturaliste permet néanmoins de prouver l’existence de formes animales inédites. Nicolas Baudin se félicite ainsi de la capture d’un petit poisson « de l’espece des cofres de la plus grande beaute et de la forme la plus extraordinaire ». Il précise : « Je pense meme que si la plus part des origineaux que nous avons mis dans leaudevie pour les concerver vienent a se décomposer qu’on aura peine a croire quil puisse exister des animaux vivants dune forme semblable a ceux que nous avons rencontre et dont les dessins colories ont êté pris avec la plus grande exactitude »54. Pour faire face aux contestations quant à la véracité de leurs observations, « […] les naturalistes essayent de rapporter de ces voyages des animaux vivants ou conservés dans de l’alcool ou dans l’eau surchargée de muriate de soude, empaillés ou desséchés »55.
  18. Pourtant, la conservation des animaux morts est délicate. L’alcool, notamment, ternit les couleurs vivantes et éclatantes des animaux56. Le dessinateur a la possibilité, pour sa part, de reproduire au mieux ces couleurs vivantes. François Péron explique que Charles-Alexandre Lesueur représente les animaux marins, non sous formes de dépouilles, mais quand ils sont « beaux », c’est-à-dire vivants57. Néanmoins, le dessin reconstitue difficilement le mouvement et les modifications. À propos d’un petit animal marin péché, Nicolas Baudin explique : « Le dessin que jen donne nest pas parfait parce que cet animal change si subitement de forme quil est impossible den saisir une […]»58. Quand cela est possible, les naturalistes tentent donc de ramener des animaux et des plantes vivants, l’objectif n’étant pas seulement leur étude, mais aussi leur utilisation.

    C. Exploiter la vie

  19. L’expédition est constamment marquée par une volonté d’exploiter les terres, les hommes et les animaux découverts et observés, non sans rivalité avec l’Angleterre59. Par exemple, Milius évoque la possibilité d’étendre le commerce et l’esclavage dans les régions australes60.

    a. Exporter le mode d’exploitation de la nature

  20. Alors qu’ils observent les mœurs et les formes d’échanges commerciaux des peuples autochtones, les explorateurs s’intéressent aussi aux relations entre habitants de ces régions et les animaux. François Péron a ainsi pour ambition d’étudier les « mœurs des animaux », mais aussi « les noms qu'ils reçoivent des naturels, les usages divers auxquels ceux-ci les font servir, les méthodes de chasse ou de pêche qu'ils emploient pour se les procurer […] »61. De surcroît, il souhaite améliorer la productivité de ces sociétés en y appliquant un mode économique européen. En effet, bien qu’en recherche de l’inconnu, les explorateurs conservent leur relation utilitaire au vivant. François Péron, encore, utilise ainsi la notion d’« incommodes ou nuisibles »62. Il vante également les bienfaits de la "civilisation", de la vie sédentaire et la domestication : « Déjà ne croit-on pas voir les diverses espèces de Kanguroos, devenues domestiques, pulluler autour de sa cabane ! Le Casoar, qui, plus facilement encore, se prête aux soins de l'homme, va lui présenter journellement sa chair abondante et délicate, ses œufs volumineux et de très-bon goût »63. D’ailleurs, les explorateurs admirent la colonie anglaise de Sydney64.
  21. Au-delà de la volonté d’étendre l’emprise européenne au bout du monde, les explorateurs ont pour mission de ramener en France plantes et animaux à exploiter, bien que les « instructions officielles » aient été assez vagues à ce sujet65.

    b. Importer des formes de vie à exploiter

  22. Durant l’expédition, plantes et animaux sont perçus à l’aune de leur utilité, non pas seulement à court terme, les voyageurs devant renouveler leurs vivres durant l’expédition, mais à long terme. Dans un rapport, François Péron s’exclame : « Eh ! plusieurs de ces végétaux étrangers ne doivent-ils pas nous intéresser pour les produits utiles qu’ils peuvent nous fournir»66. Les végétaux peuvent en effet procurer remèdes et matières premières pour des meubles luxueux67. Cette volonté suppose non pas l’importation de quelques spécimens, mais des projets d’acclimatation et de domestication. Pour ce faire, il est nécessaire de transporter vers la France les êtres vivants68. Ce dessein est constamment présent à l’esprit des savants tentant de ramener les animaux par paire. Ainsi, quand un jeune kangourou meurt accidentellement à bord du navire, François Péron se console rapidement en se rappelant que la perte n’est pas si conséquente du fait qu’ils n’avaient capturé qu’un seul individu. Par conséquent, ils n’auraient pu le « naturaliser », ni perpétuer sa descendance69. Les explorateurs parviennent, à plusieurs reprises, à capturer des animaux en groupe tel le wombat que François Péron souhaite domestiquer70. Ces opossums sont en effet « cinq sur Le Naturaliste et au moins deux sur Le Géographe. Seuls trois des cinq individus du Naturaliste sont arrivés en France71. Ces derniers ont peu vécu par la suite et ne se sont pas, a priori, reproduits72. Ces deux exemples révèlent la difficulté de rapporter ces êtres vivants. Tâchons de comprendre quels moyens mobilisent les explorateurs pour parvenir à leurs fins.

    II. Comment rapporter le vivant ?

    A. Capturer (mort ou vif) la vie

  23. Tout en collectant animaux et plantes directement dans leurs milieux naturels, les explorateurs acquièrent souvent des animaux et autres objets auprès des habitants.

    a. Commerces

  24. Nombre d’animaux vivants débarqués en France ont en réalité été achetés ou offerts. Ainsi, le Lemur catta rapporté dans le Géographe et appartenant à une espèce endémique de Madagascar, a été acheté à l’île Maurice73. On n’en sait guère davantage à propos de ce petit primate, mais on peut supposer qu’il était déjà familiarisé avec les humains, ayant nécessairement voyagé (soit à près de 1 135 km de son lieu d’origine, Madagascar).
  25. Les récits témoignent régulièrement de ces échanges avec la population locale. Par exemple, François Péron rapporte d’un petit mammifère, le Dasyure : « […] j'en reçus un individu vivant, en échange de quelques bagatelles que j'offris à un sauvage qui se disposoit à le tuer pour le manger »74. Le négoce s’établit aussi régulièrement avec des Européens installés sur ces terres. Un général fournit des « spécimens »75. Un pigeon a été « Donné par un officier hollandais »76. Les relations avec les autorités locales sont souvent déterminantes. Durant le retour en 1803, au cap de Bonne-Espérance, Pierre-Bernard Milius demande au gouverneur général Janssens « […] de faire prévenir les habitants des campagnes que j’achèterais tous les animaux qui me seraient présentés. J’espérai par ce moyen faire une récolte précieuse pour la ménagerie de Paris »77.

    c. Parties de chasse

  26. Les scientifiques font preuve d’une avidité insatiable à la vue de tout animal et plus généralement de tout objet curieux. Cette ardeur est renforcée par les jours monotones sur le voilier où rien de particulier ne se passe78. La vie quotidienne de l’équipe est ainsi une quête continuelle, sur mer ou sur terre, lors d’incursions régulières sur la rive. Pourtant, ils observent également les conséquences d’une guerre continuelle contre les animaux, en particulier les phoques chassés pour « les fourrures et l’huile […] ; cette destruction continuelle aura bientôt réduit considérablement le nombre de ces animaux »79.
  27. Les voyageurs chassent aussi pour se nourrir. François Péron décrit ainsi l’arrivée d’une troupe de dauphins qui s’approchent du navire. Fasciné par le spectacle de ces gracieux animaux marins, il déclare néanmoins « […] nous ne songeâmes plus qu'à leur faire une guerre meurtrière »80. Il considère cette pêche comme miraculeuse, permettant, selon lui, de soigner le scorbut qui sévit à bord. Oiseaux, kangourous et phoques sont également mangés régulièrement, leurs peaux étant aussi préparées comme écrit plus haut. Parfois, la violence ne s’explique pas réellement. Leschenault déclare à propos des pingouins : « les matelots souvent cruels sans raison et sans utilité abusèrent de la confiance de ces animaux, en en détruisant un grand nombre »81.
  28. Il arrive que ces chasses soient improvisées à la suite d’opportunités. Certains animaux près des hommes sont ainsi saisis à la main, comme Levillain le raconte à propos d’oiseaux s’approchant du navire « Dans le fort du mauvais temps, un oiseau […] est venu se faire prendre à la main »82. A contrario, des battues sont véritablement planifiées et organisées, telle la chasse au crocodile menée par Charles-Alexandre Lesueur et François Péron83. À l’aide d’instruments multiples embarqués sur les navires84, les chasses sont multiformes. Elles peuvent s’apparenter à une cueillette pour certains animaux, notamment des animaux marins85. D’autres fois, un véritable combat se forme entre hommes et animaux et l’expédition se transforme en massacre. Évoquant les kangourous, Leschenault écrit ainsi « […] nous vinmes troubler leur retraite, et jetter au milieu deux la terreur, on en tua beaucoup »86. Fusils et chiens sont de la partie. Pleurant la perte de son canidé, Levillain s’exclame « […] Cette perte est considérable sous beaucoup de rapports, particulièrement pour la zoologie, car comment avoir des quadrupèdes sans chien, comt se procurer une pièce de gibier des marais, comt […] se procurer un des oiseaux tombés à l’eau […] »87.
  29. Face aux hommes, beaucoup d’animaux sauvages se défendent ou fuient. Nicolas Baudin écrit ainsi à propos d’un oiseau planant autour du navire ; « Nous contions qu’il venoit se faire prendre mais apres setre bien fait voir il disparut »88. Des pélicans chassés dans une anse sont particulièrement méfiants et les explorateurs rentrent bredouilles. Francois Péron suppose alors « […] une telle défiance nous parut être le résultat de la chasse continuelle que leur font les habitans[…] »89. La réaction des animaux devient ainsi un objet d’étude naturaliste. D’ailleurs, tout en étant combattue, il arrive que cette résistance fasse l’objet de l’admiration des explorateurs.

    B. Résistances animales

    a. Des héros sacrifiés

  30. Lorsque les savants pourchassent les animaux, ils observent leur comportement. Les kangourous, proies faciles, tentent coûte que coûte de s’échapper. François Péron raconte ainsi une battue. Les marsupiaux sont particulièrement habiles pour fuir les mains et les balles : « Dans les buissons impénétrables […], ces animaux pouvoient braver impunément l’adresse de nos chasseurs […] ». Ces derniers comprennent alors que ces animaux empruntent un dédale invisible, couvert par la végétation. « Dès cet instant, leur ruine fût assurée […] ». François Péron relève le « courage véritablement admirable » des femelles, blessées, mais défendant leurs petits. Elles ne renonçaient qu’en cas d’épuisement total : « […]elles s'arrêtoient, en s'accroupissant sur leurs pattes de derrière, l'aidoient avec leurs pieds de devant à sortir du sac maternel, et cherchoient en quelque sorte à lui désigner les lieux de retraite où, plus aisément, il pouvoit espérer de se sauver […] ». Dès qu’elles le pouvaient, elles appelaient leur nourrisson « par une espèce de grognement qui leur est propre ; elles le caressoient affectueusement […] ». Le savant admire ces animaux bien qu’il persiste à les pourchasser : « Les mêmes preuves d'intelligence et d'affection se reproduisoient d'une manière plus touchante encore, de la part de ces pauvres mères, lorsqu'elles se sentoient mortellement atteintes : tous leurs soins se dirigeoient vers le salut de leur nourrisson ; bien loin de chercher à se sauver, elles s'arrêtoient sous les coups du chasseur, et leurs derniers efforts étoient donnés à la conservation de leurs petits... »90. Le registre du texte appartient à l’émotion. Il reconnaît des sentiments aux kangourous et semble ému par leur bravoure et leur souffrance, qualifiant les femelles kangourous, non sans une pointe d’anthropomorphisme, de « pauvres mères ». Dans une certaine ambivalence, il devient le témoin des derniers actes de ces êtres tout en étant à l’origine de leur destruction. La chasse est ainsi un moyen d’obtenir des corps, vivants ou morts, mais aussi d’observer les animaux dans leurs derniers instants de liberté et souvent de vie.
    Kangourou Macropus Fuliginosus (Demarest, 1817), Charles-Alexandre Lesueur Entre 1804 et 1809 Aquarelle, gouache et crayon sur vélin 25,7 x 40,3 cm Le kangourou fuligineux appartient au groupe des grands kangourous gris. Il vit dans le sud de l’Australie. L’expédition en rapporta des Terres Australes. MHN Le Havre, inv. 80057
  31. De même, Nicolas Baudin considère la « sensibilité » des albatros : « Comment dépeindre ici les marques de la douleur, de son désespoir à la vue des efforts impuissants de son malheureux frère que l’homme impitoyable vient de saisir à l’hameçon ? Comment ne pas admirer ses transports et son dévouement généreux pour secourir celui qui l’implore… Trompé par son indiscrète sensibilité, il devient audacieux, il voltige, il court autour du malheureux que le fatal appât a trompé. Il se presse contre lui, il s’efforce, il veut l’arracher à la mort... il l’a reçoit lui-même […] »91. S’il considère ce sort injuste, les hommes ne renoncent pas à leurs proies qu’ils observent sous toutes les coutures.

    b. Les survivants

  32. Lors de ces battues et pêches, des proies agonisantes sont en effet souvent attrapées. Leurs réactions sont alors analysées. Le Villain déclare après avoir péché des animaux luminescents : « Alors nous nous emparons du filet et, peu de moments après, nous avons le plaisir d’avoir à bord plusieurs de ces animaux qui, lorsque nous les laissions un moment tranquilles, la lumière diminuait et, de suite, reprenait la première vigueur lorsque nous les touchions de nouveau »92. Les comportements et réflexes de l’animal sont ainsi considérés comme un sujet d’étude naturaliste. Les mouvements d’un squale étêté sont ainsi décrits précisément par François Péron : « Le 25 novembre, on prit un squale [...] qui nous fournit un nouvel exemple de l'irritabilité prodigieuse de ces poissons. En effet, depuis plus de dix minutes, on lui avoit coupé la tête, arraché le cœur et tous les viscères, lorsque, pour le laver à la pompe, on voulut le traîner sur l'avant du vaisseau. L'animal, qu'on tiroit alors par la queue, se mit à faire des efforts si violens, il soulevoit son tronc avec tant de foi ce et de vivacité, que plusieurs personnes faillirent en être renversées »93.
  33. Par ailleurs, des animaux viables sont aussi capturés. François Peron raconte ainsi qu’un manchot est saisi vivant par un matelot « avec la main, sans que l'animal parût s'en effrayer »94. De même, Pierre-Bernard Milius rapporte que débarquant sur l’île Rottenest en juin 1801, il découvre une colonie de « loup marin », autrement dit des phoques. Ils tirent à bout portant et laissent « des traces sanglantes de leur arrivée sur les bords tranquilles de cette île […] ». La chair de ces animaux constitue alors le repas de l’équipage durant plusieurs jours. L’officier précise néanmoins en avoir pris « un jeune vivant que nous portâmes à bord »95. Que devient ce jeune ? D’autres officiers rapportent cet épisode. Jacques Saint Cricq narrant cette expédition tait tout simplement cet épisode96. Quant à Victor Couture, il rapporte succinctement que les marins descendus sur l’île « ont rapporté 5 ours marins dont un vivant »97. En revanche, Stanislas Levillain évoque plus précisément la vie d’un phoque à bord : Cet animal « paroit assez courage[ux] car celuy qui étoit vivant à bord, lorsqu’on l’agacoit trop il cherchoit a se lencer sur les jambes de ceux qui l’inquietoient & reelement chacun fuyoit devant luy – on a usé du moyen indiqué par Mr Fleurieu dans son Vge de Le Md pour tuer cet amphibie, en leurs donnant de gd coups sur le bout du nez […] »98. L’animal a ainsi fini probablement mangé et la peau empaillée. Les explorateurs ont néanmoins l’ambition de rapporter le plus possible d’animaux vivants. Le marin Joseph Breton, de retour en France à bord du Naturaliste, comptabilise les précieux trophées à bord : « Nous embarquâmes, des caisses de botanique minéralogie, zoologie, &c ; 67 bailles de plantes 4 casoars ; 2 hombacs ; 2 signes noirs ; 1 oie du détroit de Basse ; 2 kangourou ; 2 chiens des naturels du pays ; & beaucoup de perroquets & autres oiseaux pour la ménagerie »99.
    Embarquons avec ces animaux et hommes à bord des corvettes.

    III. Se faire mener en bateau

    A. Le voyage sans fin

    a. Conditions de survie humaines et animales

  34. Cette longue expédition est difficile pour tous les êtres vivants qui en sont. Les humains subissent ainsi de nombreuses épreuves100. De nombreuses tensions éclatent à bord, en partie à cause de la rudesse de l’environnement101 et beaucoup de membres de l’équipage meurent ou désertent. L’expédition prend parfois les allures d’un « Voyage en enfer »102. Le trajet et les escales font alterner épisodes dangereux et périodes ennuyeuses alors que beaucoup de savants ne sont pas habitués aux rudes conditions de ce type de voyage au long cours. Ils se distraient alors avec l’étude des marins. La compagnie d’animaux réconforte aussi les voyageurs. Levillain regrette ainsi la disparition accidentelle de son chien : « Hélas, je ne puis retenir mes larmes. […] Il faut avoir vu un animal pareil pour éprouver ce qu’on sent de douleur lorsqu’on est séparé de celui auquel on était attaché […] »103. Certains marins possèdent aussi d’autres types d’animaux, tel un dénommé Lefevbre, propriétaire d’un singe malade du scorbut104. Cette pathologie grave sévit en effet régulièrement à bord des navires ne pouvant stocker suffisamment de provisions fraîches105. François Péron se plaint régulièrement de l’apparition de ce mal « […] le terrible scorbut avoit commencé ses ravages, et les salaisons pourries et rongées de vers auxquelles nous étions réduits depuis plusieurs mois, précipitoient chaque jour l'affreux développement de ce fléau »106. Les animaux subissent tout autant ces carences, d’autant plus que beaucoup ont des besoins spécifiques. Si le jeune phoque évoqué supra n’avait pas été tué, sa survie aurait été, dans tous les cas, compromise : les blanchons ont de très forts besoins énergétiques. Alors que les animaux sauvages ont des alimentations liées à l’écosystème dans lequel ils vivent, on leur offre, une fois à bord, un régime alimentaire peu varié, reposant en grande partie sur des céréales, souvent cuites et sous forme de pain, à l’exception des carnivores, nourris de viande. Voici le récapitulatif des nourritures fournies à certains des animaux à bord107 :
  35. En revanche, nous ignorons quel type de viande mangent les lionnes et les chats sauvages ou si on leur fournit de la viande salée ou fraîche. Quant aux lémuriens, on leur distribue des fruits (sans autre détail) mais ils ne sont probablement plus frais au bout de quelques jours sans escale. De ce fait, les animaux voient leur régime alimentaire transformé. Néanmoins, quand cela est possible, on leur fournit une alimentation appropriée. Henry Freycinet rapporte qu’en mai 1803, une chaloupe rapporte du « bois de chauffage qui nous est necessaire et des branches de Casuarina pour nos Kangouroux108. De même que pour les plantes109, un personnel est dédié aux soins des animaux. Les instructions sont claires : « Notre collection d’animaux vivans / est nombreuse et sans doute assez intéressante pour mériter quelqu’attention de votre part. Il me parait semblerait nécessaire pour assurer / d’avantage leur conservation pendant le / long voïage qu’ils ont a faire d’envoyer un / des garçons de la ménagerie qui, plus à ce genre de travail […] »110
  36. Pourtant, hommes et animaux cohabitent dans un lieu sans échappatoire. Les navires offrent en effet un espace limité. Le Géographe a, par exemple, une longueur de 124 pieds soit 37 m, alors que 133 personnes embarquent en octobre 1800111. Hommes, animaux, plantes, caisses, cordes occupent le pont. Des animaux destinés à être mangés sont embarqués, tels des cochons achetés à Sydney112. Des rats déambulent et attaquent des bourgeons de plants113. Cette promiscuité induit des problèmes hygiéniques et sanitaires. Bougainville se désole : « Tout le dessus du gaillard depuis la gde chambre jusqu’au gd mât étoit obstrué par les objets, et les animaux repandoient une odeur insupportable »114. L’atmosphère est rance, comme dans l’ensemble de la flotte du début du XIXe siècle. La nuit règne une forte humidité, l’eau de mer étant difficile à sécher. Alternent des périodes de sécheresses et de pluie, de froid et de chaleur excessive. Examinons maintenant la localisation des animaux à bord.

    b. Prison flottante

  37. Une grande partie des animaux sauvages sont encagés, gardés comme de précieux objets. Certains bénéficient toutefois d’une liberté relative. Les cervidés, cervus axis, sont ainsi installés simplement sur le « gaillard d’arrière »115. Par ailleurs, les chats sauvages, les deux dingos peuvent se mouvoir dans l’ensemble du bateau mais, aux dires de Frédéric Cuvier qui récupère la femelle canidé, seule survivante (le mâle ayant succombé sous les coups), elle finit le voyage enfermée une grande partie de la journée. L’animal a en effet multiplié les larcins à bord et a également développé un comportement agressif116.
  38. Une majorité des animaux sont en réalité confinés en cage et exposés aux intempéries sur le gaillard d’arrière. Francois Breton rapporte : « Tout le gaillard d'arriere, n'était que parcs ou cages pour ces animaux117. De même, François Péron précise dans un recensement la place de certains animaux. On apprend ainsi que les lémuriens sont au « gaillard d’arrière vis-à-vis l’écoutille du poste des aspirants ». Un kangourou y est enfermé « du côté de bas-bord ». On retrouve aussi sur le gaillard arrière deux larus (« oiseau, groupe des goélands ») et un colombidé « Columba coronata Lin». Quelques mètres plus loin, la panthère est enfermée sur le gaillard d’avant118. Ces informations soulèvent beaucoup de questions quant au ressenti de ces animaux enfermés. Comment les lémuriens cohabitent dans une cage ? Comment ces animaux arboricoles peuvent-ils se mouvoir dans cette prison étroite ? Comment les kangourous se déplaçant par bond sont-ils enfermés dans une cage ? Comment vivent-ils, seuls dans une cage (le kangourou vit au sein de petits groupes) ? Quel effet produisent les odeurs des uns et des autres ? Comment réagissent-ils au bruit de la panthère enfermée à proximité, au chat sauvage passant devant la cage, aux cris des marins ?
    « Voilier sur le Géographe » Charles-Alexandre Lesueur 1800 ou 1801 Crayon graphite sur papier 15 x 9,5 cm Ce matelot coud des voiles sans doute endommagées. Il est assis sur une caisse contenant des volailles, réserve de nourriture MHN Le Havre, inv. 13025
  39. Il arrive que certains hommes se soucient de la place attribuée aux animaux. Ainsi, lorsque Pierre-Bernard Milius prend le commandement du Géographe, à la suite de la disparition de Nicolas Baudin, il note : « M. Baudin avait logé des kangourous et les plantes sous le gaillard d’arrière […] J’ai cru devoir changer ces dispositions parce qu’elles pouvaient nuire à la conservation de ces divers objets ». Il démonte les cages et les installe sous les passavants qui « élevés de quatre pouces au-dessus du pont, permettaient d’entretenir la propreté et facilitaient en même tems la circulation de l’air »119. Les kangourous, animaux de taille conséquente, prennent une place significative, d’autant que les explorateurs parviennent à les capturer en nombre 120. Ces arrivages nécessitent des aménagements. Des chambres d’officiers sont démolies et des parcs sont construits pour les marsupiaux121. Ces agencements n’empêchent pas la mort fréquente de ces passagers.
    « Lesueur sur le Géographe » Charles-Alexandre Lesueur 1800 ou 1801 Crayon graphite sur papier 9,4 x 15 cm MHN Le Havre, inv. 13032

    B. Le voyage sans retour

    a. La faucheuse en embuscade

  40. « The livestock had a very difficult time on board: of the 50+ live birds on Le Géographe noted when she arrived in Timor for the second time […], only 14 survived the journey to France […] »122. Ces conditions de voyage rendent en effet la vie de ces animaux précaire et la mort rode constamment. Les marins et savants ont conscience de la fragilité des vies animales et végétales. Henri Freycinet déclare ainsi : « Le Comd.t a fait mettre aux environs de notre aiguade un Verra, une truie, deux poules et un Coq vivants : je doute fort que Ces animaux puissent s’y conserver long-temps »123. Et le décompte est souvent macabre. François Breton constate que « Depuis le pt Jackson, il était mort un hombac les deux kangourous & des oiseaux : un des chiens était blessé »124. Le cheptel est renouvelé lors des escales, par exemple : « En arrivant à l'île de France[…] On y prit 2 biches du Bengale ; 2 pintades, & 1 mouton à 4 cornes »125.
  41. Étudions le kangourou, animal emblématique. Comme indiqué supra, ils sont nombreux à bord. Dans une lettre à Jussieu, Nicolas Baudin est assez optimiste à propos de leur sort. Il écrit « Les quadrupèdes, comme kangourous, émious et umbats sont en très bon état et je crois que je les conserverai étant bien accoutumés à bord […] »126. Pourtant, le taux de survie ne semble pas si important et beaucoup de ces animaux périssent rapidement après leur capture. François Péron déclare : « Pendant notre séjour sur l'île Bernier, nous saisîmes plusieurs de ces jeunes kanguroos; mais la plupart; trop foibles sans doute, ne survécurent pas long-temps à leur captivité. Un seul y résista et s'apprivoisa […] ». On apprend par ailleurs que ce dernier périt d’un accident127. Ce type d’événement est supposément courant pour ces animaux, tant les navires sont inadaptés pour eux. Ces lieux encombrés sont en effet une succession de pièges. Jean-Marie Maurouard raconte le triste sort de deux de ces marsupiaux : « Pendant la nuit beaucoup de pluie les deux kangourous étaient sur le pont le plus petit voulant se cacher a tombé dans la barre du gouvernail et est mort peu de tems après »128. Le kangourou est en effet un animal qui se dissimule volontiers(129). Le second meurt peu de jours après : « Le kangourou qui restait abord est mort à 18h, il avait été mis dans la batterie il a été jeté par le roulis d’un bord et de l’autre, et avait hier soir, lors qu’on l’a apporté sur le gaillard, la tête […] toute abimée des coups quil sétoit donnés pendant la nuit il a été mis sous le gaillard, et a tombé dans l’entrepont où il est mort. Lors qu’on lui a dépouillé on lui a trouvé la tête et le corps tout en sang preuve certaine que c’est au peu de soin qu’on a eu que sa mort doit être attribuée »130.
  42. Toutefois, rien ne se perd et les corps des animaux décédés sont souvent traités pour être sauvegardés. « Pour éviter toute perte, le squelette des animaux morts pendant la traversée sont conservés. Ces éléments sont souvent empaillés »131, tels les chats sauvages et les écureuils volants, morts durant la traversée132. Ceux qui survivent deviennent des trophées scientifiques à haute valeur ajoutée.

    b. Objets de sciences et de spectacle en Europe

  43. Les animaux sont un objet d’attraction dès leur embarcation sur les navires. Bougainville raconte son escale sur l’Île-de-France (Île Maurice, aujourd’hui) : « Pendant tout nôtre séjour à Port N.O. il y eut une gde affluence de curieux qui venoient voir les animaux singuliers que nous rapportions, et que le capitaine hamelin avoit beaucoup vantés à terre […]»(133). Si les animaux sont fraîchement capturés, on peut s’interroger sur ce que provoquent à ces animaux les allées et venues devant leurs cages, les regards prolongés sur eux, les mains qui tentent de les saisir, etc.
  44. Une fois arrivée en France, le voyage des animaux est loin d’être terminé. Ils ont à affronter un climat différent et de nouveaux déplacements vers la Capitale ou Malmaison. Un maki meurt dès son arrivée à Lorient, tout comme probablement le mouton à quatre cornes134. Quant à une hyène, il semble qu’elle prenne la clé des champs quelques heures avant d’être retrouvée et recapturée facilement135. François Péron se charge personnellement du transfert des collections du Géographe136. De surcroît, du personnel expérimenté est présent pour soigner des animaux : « Geoffroy Saint-Hilaire rapporte qu’à bord et pendant le voyage de Lorient à la Malmaison, le gnou et le zèbre furent soignés par un chasseur à cheval de l’armée des Indes, aux ordres de Decaen, renvoyé en France pour cause de maladie. Et d’ajouter que ledit chasseur faisait ce qu’il voulait de ces deux animaux »137.
  45. En réalité, les animaux et les collections font l’objet d’une forte rivalité entre l’institution du Muséum et Joséphine de Beauharnais, férue de compagnie animale et d’histoire naturelle138. L’affaire prend même une dimension politique, le ministre de l’Intérieur interférant en faveur de l’impératrice fraîchement couronnée en mai 1804139. De ce fait, la collection se divise : « Some of the livestock which were part of the instructions were transported to Empress Joséphine’s estate. The others ended up in the Jardin des Plantes in the grounds of the MNHN »140. En tous les cas, les animaux se retrouvent institutionnalisés et marchandisés. L’expédition Baudin préfigure ainsi le trafic et l’essor des zoos du XIXe siècle141.

Conclusion

  1. Tout en appartenant à un monde de circulation, le destin des animaux capturés par les explorateurs de l’expédition Baudin est d’abord un voyage sans retour, voyage vers la mort, voyage vers un continent inconnu, voyage vers une vie derrière les barreaux quand ils survivent et qu’ils deviennent de pièces précieuses de collections. Cette exploitation est à mettre en parallèle avec la volonté des Européens de dominer les populations dites "Indigènes". En suivant la vie (et la mort) de ces animaux capturés, nous avons ainsi exploré l’envers du décor de la découverte scientifique. Durant ce voyage aux conditions difficiles, les savants recherchent coûte que coûte des formes inédites du vivant. Ils tentent de les observer, de les comprendre et percer leur mystère, de les dessiner, de les raconter, de les rapporter. Pourtant, l’objet de leur quête disparaît souvent dans leurs mains souvent destructrices, le vivant s’échappant par sa capture. Les réactions constantes des animaux nous invitent ainsi à réfléchir sur le statut des êtres animés dans les sociétés humaines, étant objets de science, objets de domestications, mais avant tout des créatures vivant pour elles-mêmes.

 

Mots-clés : voyage scientifique ; capture ; taxidermie ; ménagerie ; histoire des animaux ; histoire naturelle ; histoire maritime

Keywords : scientific travel ; capture; taxidermy ; menagerie ; animal history ; natural history ;Keywords : scientific travel; capture; taxidermy; menagerie; animal history; natural history

  • 1 Spary, Emma C. Le Jardin d’utopie. Traduit par Claude Dabbak, Paris, Publications scientifiques du Muséum, 2005.
  • 2 La Pérouse Jean-François de Galaup, Brossard Maurice de, Dunmore, John (Édts scientifiques), Le voyage de Lapérouse : 1785-1788 : récit et documents originaux, Paris, Imprimerie Nationale, 1985 ; Entrecasteaux Joseph-Antoine Bruni d’, Voyage de dentrecasteaux envoyé à la recherche de la Pérouse publié par ordre de sa Majesté l’Empereur et Roi sous le ministère de S. E. le Vice-Amiral Decrès, comte de l’Empire. Rédigé par M. de Rossel, ancien capitaine de vaisseau. Paris, l’imprimerie impériale, 1808 ; Laissus Yves. « Les voyageurs naturalistes du Jardin du roi et du Muséum d'histoire naturelle : essai de portrait-robot. ». In: Revue d'histoire des sciences, tome 34, n.3-4, 1981. p. 259-3 ; Pierre – Yves Beaurepaire, Les Lumières et le Monde : Voyager, explorer, collectionner, Paris, Belin, 2019.
  • 3 Australie / Le Havre, l’intimité d’un lien (1801-2021), catalogue de l’exposition au Muséum d’histoire naturelle du Havre du 5 juin au 7 novembre 2021,le Havre, éditions du Muséum d’histoire naturelle du Havre, p. 13 : carte représentant l’itinéraire des deux corvettes.
  • 4 The Baudin Legacy Project avec notamment une bibliographie en date de novembre en ligne à l’adresse https://baudin.sydney.edu.au/wp-content/uploads/2019/07/Baudin_Bibliography_Nov_2015.pdf
  • 5 Alain Brachon, « L’expédition Baudin », Bulletin de la Sabix, n.69, 2022, p. 17 : « Tous les témoignages concordent sur la nature entière, autoritaire et glacée, rancunière, de son caractère »
  • 6 Jean-Luc Chappey, « François Péron et la question de la civilisation aux antipodes », Annales historiques de la Révolution française, n.375, 2014, p. 139-159
  • 7 https://www.cnrtl.fr/etymologie/voyage
  • 8 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux embarqués vivants sur les vaisseaux du voyage de découvertes aux Terres australes », Michel Jangoux (dir), Portés par l’air du temps. Les voyages du capitaine Baudin, Bruxelles, édition de l’université de Bruxelles, Études sur le 18e siècle, n.38, 2010, p. 265-281
  • 9 Éric Baratay, Le point de vue animal. Une autre version de l’histoire, Paris, Le Seuil, collection L’Univers historique, 2012
  • 10 François Péron, Voyage de découvertes aux Terres Australes, exécuté par ordre de sa Majesté, l’Empereur et Roi, sur les corvettes le Géographe, le Naturaliste et la goëlette le Casuarina, pendant les années 1800, 1801, 1802, 1803 et 1804, Imprimerie Impériale, 3 vols et atlas, Paris, vol. I, 1807 et vol. II, [complété par Louis de Freycinet], 1816
  • 11 Nicolas Baudin, Mon voyage aux terres australes, Paris, Imprimerie Nationale, 2001)
  • 12 Pierre-Bernard Milius, Voyage Aux Terres Australes – Un Officier de Marine de L'expédition Baudin Découvre L'Australie Et La Tasmanie : 1800-1804, Le Havre, Société Havraise d'Etudes diverses et le Muséum d'Histoire Naturelle du Havre, 1987
  • 13 https://baudin.sydney.edu.au/journals/
  • 14 François Péron, Voyage, op. cit., vol 2, p. 313
  • 15 Léonie Boissière, La collection du vivant et les voyageurs-naturalistes au XVIIIe siècle. Récoltes, observations, découvertes et enjeux de l’expédition Baudin (1800-1804), Mémoire de Master 2 en Sciences Historiques, sous la direction de M. Pierre-Yves Beaurepaire, université de Nice Côte d’Azur, 2021, p. 371
  • 16 Stephen M. Jackson, Justin J. F. J. Jansen, Gabrielle Baglione & Cécile Callou, « Mammals collected and illustrated by the Baudin Expedition to Australia and Timor (1800-1804): A review of the current taxonomy of specimens in the Muséum national d’Histoire naturelle and the illustrations in the Muséum d’Histoire naturelle du Havre », Zoosystema, 2021-n.43
  • 17 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 53-63 - Ordonner et scénographier les règnes de la Nature
  • 18 François Péron, Voyage, op. cit., vol 2, p. 313
  • 19 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 371
  • 20 Charles Alexandre Lesueur, « Tableau général des animaux vivants qui se trouvent à bord du Géographe le 17 Pluviôse an XII », Archives du Muséum d’histoire naturelle du Havre 21006.
  • 21 François Péron, Voyage, op. cit., vol 1, p. V-VI
  • 22 Nicolas Baudin, Mon voyage, op. cit., p.133
  • 23 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 302
  • 24 Ibid., p. 485
  • 25 André Maury, « L’œuvre zoologique de Charles-Alexandre Lesueur, peintre naturaliste havrais (1778-1846), Recueil des Publications de la Société Havraise des Études diverses, 1961, p.7
  • 26 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 513
  • 27 Ibid., p. 509
  • 28 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 39
  • 29 Ibid., p. 217
  • 30 Ibid., p. 42
  • 31 Ibid., vol 2, p. 121
  • 32 Ibid., vol 1, p 106
  • 33 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 363 ; Michel Jangoux, « Les naturalistes du voyage de découvertes du capitaine Baudin : contexte, présentation et bilan scientifique », Bulletin de la Sabix, 2022, n.69, p. 93-110
  • 34 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 387
  • 35 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 108
  • 36 Ibid., p. 488
  • 37 Michel Jangoux, « Les naturalistes du voyage […] », op. cit.  p. 95
  • 38 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 486
  • 39 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 514
  • 40 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. VII
  • 41 Ibid., p. 14
  • 42 Ibid., vol 2, p. 257 ; André Maury, « L’œuvre zoologique […] », op. cit., p. 7 : « Chasseur, aussi adroit que talentueux dessinateur, Lesueur contribua dans une grande mesure à l'augmentation des collections d'Oiseaux et de Quadrupèdes, que non seulement il recueillait, mais préparait lui-même »
  • 43 Pierre-Guillaume Gicquel, Journal et autres documents, octobre 1800-février 1802, Archives nationales de France (ANF), série Marine, 5JJ55, p. 221
  • 44 Nicolas Baudin, Mon voyage, op. cit. ; p. 136
  • 45 Id., Journal de mer, volume 1, octobre 1800-février 1801, ANF, série Marine, 5JJ 36, p.84
  • 46 François Péron, voyage, op. cit., vol 2, p. 382
  • 47 Ibid., p. 373-392 : Chapitre XXXIX, Fragment d’un mémoire de MM. Péron et Lesueur sur l’Art de conserver les animaux dans les Collections zoologiques
  • 49 48=Kury Lorelaï. « Les instructions de voyage dans les expéditions scientifiques françaises (1750-1830) », Revue d'histoire des sciences, tome 51, n.1, 1998. p. 87 : « Pour ce qui est des animaux, les procédures de conservation sont beaucoup plus compliquées que pour les végétaux et exigent en général des connaissances et des "habiletés de dissection" qui demandent un apprentissage préalable » Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 208
  • 50 Dorothée Rusque, Le dialogue des objets : fabrique et circulation des savoirs naturalistes : le cas des collections de Jean Hermann (1738-1800), thèse en histoire sous la direction d’Isabelle Laboulais, université de Strasbourg, 2018, p. 28
  • 51 Nicolas Baudin, mon voyage, op. cit., p. 242
  • 52 Ibid., p. 133
  • 53 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 41
  • 54 Nicolas Baudin, Journal, op. cit., p. 214
  • 55 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 206
  • 56 Jacqueline Bonnemains, « Biographie de Nicolas-Martin Petit, un des artistes de l’expédition aux Terres Australes (1800-1804) du commandant Nicolas Baudin », Recueil des Publications de la Société Havraise des Études diverses, 1986, p. 9 ; François Péron, voyage, op. cit., vol 2, p. 384 : « Les liqueurs alcooliques[…] sont […] susceptibles d'altérer les couleurs des animaux »
  • 57 Ibid, vol 1, p. 490
  • 58 Nicolas Baudin, Journal, op. cit., p. 190
  • 59 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 457-475 : Les collections naturalistes politiquement investies : Les rivalités franco – britanniques dans le Pacifique
  • 60 Pierre-Bernard Milius, voyage, op. cit., p. 24 : « […] le commerce […] y consisteroit en esclaves, chevaux, buffles, cire, bois sandal, ris, .etc ».
  • 61 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p IV
  • 62 Ibid., p. 121).(63 =Ibid., p. 467)(64 = Pierre-Bernard Milius, voyage, op. cit., p. 42
  • 63 Ibid., p. 467
  • 64 Pierre-Bernard Milius, voyage, op. cit., p. 42
  • 65 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 265 : « De façon étonnante, ni le commandant Nicolas Baudin ni les naturalistes l’accompagnant n’avaient reçu d’instructions officielles leur demandant de ramener vivants en France des animaux des Terres australes »
  • 66 François Péron, Non daté, Fonds Muséum, AJ/15/569, f° 426 ; Paul postiau et Michel Jangoux, « Les récoltes botaniques de l’expédition Baudin aux Terres australes (1801-1803) », Portés par l’air, op. cit., p. 249
  • 67 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 391 et 402
  • 68 Kury Lorelaï. « Les instructions […] », op. cit., p. 86 : « Le texte insiste sur la primauté des plantes utiles […]. Il en est de même pour les animaux. […]s'il y a lieu, de chercher les manières de les élever et de les domestiquer »
  • 69 François Péron, Voyage , op. cit.,vol 1, p. 117
  • 70 Ibid., vol 2, p. 14
  • 71 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 272 )
  • 72 Ibid, p. 273 ; Étienne Geoffroy Saint-Hilaire et Frédéric Cuvier, Histoire naturelle des mammifères, avec des figures originales enluminées, dessinées d’après des animaux vivants, Paris, Lasteyrie, 1819, pl. 57
  • 73 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 276
  • 74 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 301
  • 75 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 377
  • 76 Ibid., p. 385.
  • 77 Marie-Haude Arzur, Animaux à bord, Paris, Glenat Hommes Et Océans, 2014. p. 23
  • 78 Nicolas Baudin, Mon voyage, op. cit., p. 131-132
  • 79 Théodore Leschenault, Extrait du journal, mai 1801–avril 1802, ANF, série Marine, 5JJ56, p. 177
  • 80 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 323
  • 81 Théodore Leschenault, Extrait, op. cit., p. 178
  • 82 Stanislas Levillain, Journal, juin-septembre 1801, ANF, série Marine, 5JJ52, p. 13
  • 83 Anne Lombard-Jourdan, « François Péron et Charles Lesueur à Timor. Une chasse au crocodile en 1803 », in Archipel, 1997 n°54, p. 81-121
  • 84 Michel Jangoux, Le voyage aux terres australes du commandant Baudin. Genèses et préambules (1798-1800), Paris, PUPS, collection Histoire maritime, p. 427
  • 85 André Maury, « L’œuvre zoologique […] », op. cit., p. 10 : « Chaque dragage aussi, remontait du fond de l'océan des formes nouvelles dont Péron faisait sur le vivant, la description zoologique avant de les mettre en bocaux, alors que Lesueur les représentait avec la plus grande exactitude »
  • 86 Théodore Leschenault, Extrait, op. cit., p. 37
  • 87 Stanislas Levillain, Journal, op. cit., p. 11).
  • 88 Nicolas, Baudin, Journal, op. cit., p. 11
  • 89 François Péron, voyage, op. cit., vol 2, p. 141
  • 90 Ibid., vol 1, p. 116-117
  • 91 Nicolas Baudin, Mon voyage, op. cit., p. 218
  • 92 Stanislas Levillain   : Notes sur les divers dessins, Archives du Muséum du Havre, ref. 14040 ; Michel Jangoux, « Les naturalistes du voyage de découvertes du capitaine Baudin : contexte, présentation et bilan scientifique », Bulletin de la Sabix, 2022, n°69-1, p. 93-110
  • 93 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 210-211
  • 94 Ibid., p. 359
  • 95 Pierre-Bernard Milius, voyage, op. cit., p.11
  • 96 Jacques Saint Cricq, Journal, septembre 1800- décembre 1802, ANF, série Marine, 5JJ48, p. 26
  • 97 Victor Joseph Couture, Journal, octobre 1800–décembre 1802, ANF, Série marine, 5JJ57, p. 20
  • 98 Stanislas Levillain, Journal, op. cit., p. 17
  • 99 François–Désiré Breton, Journal, septembre 1800 – mai 1803, ANF, série Marine, 5JJ5, p. 223
  • 100 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 166-190 : Un voyage dramatique et meurtrier
  • 101 Ibid., p. 513
  • 102 Jean Bourgoin, Étienne Taillemite, « L’expédition Baudin en Australie – 1800-1804 » in XYZ, n°91, 2e semestre 2002, p. 39
  • 103 Stanislas Levillain, Journal, op. cit., p. 10-11
  • 104 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 340
  • 105 Romain Malbranque, La prévention du scorbut au cours des grandes expéditions maritimes du XVe au XVIIIe siècle, Université de Rouen, Thèse de Pharmacie, 2014
  • 106 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 324
  • 107 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit.
  • 108 Henry Freycinet, Journal, septembre 1802 - août 1803, ANF, série Marine, 5JJ34, p. 76
  • 109 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 395
  • 110 Manuscrit INV. 22052, Le Havre, Muséum d’histoire naturelle, dans collection du vivant p. 590) ; Jean Fornasiero & JohnWest-Soob, « Voyages et déplacement des savoirs. Les expéditions de Nicolas Baudin entre Révolution et Empire », Annales historiques de la Révolution française, Juillet-Septembre 2016, N.385 ; Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 59
  • 111 Michel Jangoux, Le voyage, op. cit., p. 79 et 81
  • 112 Henry Freycinet, Journal, op. cit., p. 17 ; Jacques Saint Cricq, Journal, op. cit., p. 63
  • 113 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 397
  • 114 Hyacinte Hipolyte Philippe Potentin de Bougainville, Journal et autres documents, 1795-1803, ANF, 155 AP6, p. 7
  • 115 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 274
  • 116 Ibid
  • 117 François – Désiré Breton, Journal, op. cit., p. 22
  • 118 François Péron, Liste des animaux vivants qui se trouvaient à bord du Géographe, 9 février 1805, Archives du Muséum d’histoire naturelle du Havre, 21012 ; Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 385
  • 119 Pierre-Bernard Milius, voyage, op. cit., p. 5
  • 120 François Michel Ronsard, Journal nautique (tome 2), novembre 1802-mai 1803, ANF, série Marine, 5JJ30. L’auteur note à 4 reprises la capture de kangourous entre 18 janvier et 10 février 1803, p. 94 : « […] il est venu a bord 7 kangourous vivants » ; p. 95 : « […] a 9h. le Commandant est arrivé de terre (…) Il a raporté trois kangourous vivants » ; p. 96 : « Nous avons […] trouve une prodigieuse quantité de kangourous, et quoiqu’on ait peu chassé, l’équipage en a presque toujours eu pour ainsi dire a discretion » ; p. 112 : « […]on a rapporté a bord un kangourou de la petite espece et deux opossomes vivants[…] »
  • 121 Ibid., p. 95 : «  […] et on s’est occupé a démolir deux autres chambres sous le gaillard » ; p. 97«  […]nous avons de même embarqué vingt kangourous, pour les loger on a démoli les offices et cinq chambres » ; p. 104 : « On démoli deux chambres a tribord, pour loger les kangourous qui etoient sur le pont, et que l’eau qui embarquoit faisoit perir » ; Henry Freycinet, Journal, op. cit., p. 67 : « Nos Chasseurs ont pris une grande quantité de Kangouroux vivants que le Comdt espere conserver à bord. On demolli En consequence les chambres des Naturalistes pour faire en place des parcs à ces animaux
  • 122 Justin J.F.J. Jansen, The ornithology of the Baudin expedition (1800-1804), Published by author, Grave, Netherlands, 2018, p. 47
  • 123 Henry Freycinet, Journal, p. 67
  • 124 François – Désiré Breton, Journal, op. cit., p. 23
  • 125 Ibid., p. 245
  • 126 Nicolas Baudin, Lettre à A.-L. de Jussieu, 31 mai 1803, Paris, Archives du Muséum national d’histoire naturelle, Ms 2126, f.17-18
  • 127 François Péron, voyage, op. cit., vol 1, p. 117
  • 128 Jean-Marie Maurouard, Journal historique (cahier 9 bis), novembre 1802-Janvier 1803, ANF, série Marine, 5JJ56, p. 3
  • 130 129 = Sarah Debin, Gestion et pathologie en captivité des kangourous, wallabies et wallarous du genre Macropus, thèse vétérinaire sous la direction de Jacques Ducos de Lahitte, Universite de Toulouse, 2006, p. 26 Jean-Marie Maurouard, Journal historique (cahier 9 bis), novembre 1802-janvier 1803, ANF, série Marine, 5JJ56, p. 6
  • 131 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 377
  • 132 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 271
  • 134 133 = Hyacinte Hipolyte Philippe Potentin de Bougainville, Journal, op. cit., p. 62 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 277
  • 135 Ibid., p. 274
  • 136 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 443
  • 137 Michel Jangoux M., Christian Jouanin & Bernard Métivier, « Les animaux […]», op. cit., p. 273
  • 138 L'impératrice Joséphine et les sciences naturelles : [exposition, Rueil-Malmaison], Musée national des châteaux de Malmaison et Bois-Préau, 1997
  • 139 Léonie Boissière, La collection, op. cit., p. 425-456 : Joséphine collectionneuse privée des sciences de la nature
  • 140 Justin J.F.J. Jansen, The ornithology, op. cit., p. 47
  • 141 Eric Baratay, Elisabeth Hardouin-Fugier, Zoos, Histoire des jardins zoologiques en Occident (XVIe – XXe siècles), Paris, La Découverte ; Eric Baratay, « "Ramenez-les vivants !" : de la savane au zoo », Chemins d'étoiles, Paris, Transboréal, 2006, p.82-89, Violette Pouillard, Histoire des zoos par les animaux : impérialisme, contrôle, conservation, Ceyzérieu : Champ Vallon, 2019
 

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