Doctrine et débats : Doctrine

L’animal dans l’ordre public communal

  • Laurence Warin
    Docteure en droit public
    Membre associé de l’Institut Droit et Santé (INSERM UMRS_1145) de l’Université Paris Cité

Résumé :

À l’heure où les enjeux liés à la biodiversité sont omniprésents, l’humain se questionne sur ses rapports à la nature et notamment aux animaux, en particulier dans son principal milieu de vie qu’est la ville. La place de l’animal dans les espaces urbains suscite un intérêt croissant. Or, les fonctions de police administrative, en particulier au niveau local, peuvent concerner de nombreuses situations liées à différentes espèces animales. Il semble que peu d’études se soient intéressées au rôle d’autorité de police administrative du maire dans sa commune, en lien avec la présence d’animaux de toutes espèces. Cet article propose une analyse de la jurisprudence administrative portant sur l’appréhension de l’animal dans l’ordre public au niveau de la commune, face aux pouvoirs de police administrative du maire. On s’aperçoit en effet que la présence d’animaux en ville soulève des questions liées à l’ordre public matériel alors que le juge administratif refuse en revanche d’admettre la question animale dans le cadre de l’ordre public immatériel. Le traitement par le juge de ces questions montre dans quelle mesure la notion d’ordre public peut inclure l’animal, et illustre également les limites du statut juridique actuel de ce dernier.


1. Il y a plus de deux cents ans, à la fin des années 1820, l'ancien conseiller d'État Joseph-Marie de Gérando définissait l'ordre public comme une notion associant la paix, la sécurité publique et les bonnes mœurs1. À cette époque, et bien avant la décision Société Les Films Lutetia rendue par le Conseil d’État en 19592, la moralité publique constituait un domaine fondamental de l’ordre public3. Le XIXème siècle a été témoin de la pérennité du modèle d'ordre public administratif napoléonien4.
2. Au même moment, la loi Grammont du 2 juillet 1850 relative aux mauvais traitements exercés envers les animaux domestiques a mis en place des amendes et des peines de prison pour « ceux qui [auraient] exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques ». Elle visait explicitement « les faits qui, par leur gravité et leur publicité, attaquent la moralité publique », ce qui revenait donc à protéger la sensibilité des humains – et non celle des animaux eux-mêmes – face à la violence affichée en public5. Elle offre ainsi un exemple ancien du lien entre la moralité publique et le mauvais traitement envers les animaux.
3. L’ordre public n’est défini à proprement parler par aucun texte. Ses contours sont flous et ne s’arrêtent pas à la trilogie municipale bien connue de l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales6. Plusieurs définitions ont été proposées au fil du temps. On peut retenir par exemple celle donnée par le commissaire du gouvernement Genevois en 1980 : « L’ordre public comprend tout ce qui concourt au maintien de la paix publique »7. La sauvegarde de l’ordre public est un objectif de valeur constitutionnelle8. Nous nous fonderons ici sur la distinction classique entre l’ordre public matériel et immatériel, bien qu’elle soit sujette à discussion9.
4. L’animal, en raison de son individualité et de sa sensibilité, est au cœur de débats juridiques et philosophiques10. Pour autant, il ne bénéficie pas de la personnalité juridique, mais il est reconnu comme un être vivant doué de sensibilité depuis l’adoption de l'article 515-14 du Code civil par la loi n° 2015-177 du 16 février 2015. Il doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce (art. L. 214-1 du Code rural et de la pêche maritime). Il est interdit de priver des animaux domestiques, des animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité, d'eau ou de nourriture, de s’abstenir de les soigner, de les exposer à des conditions climatiques extrêmes contre lesquelles ils ne peuvent se protéger ou de les placer dans un environnement inadapté (art. L. 214-3 du Code rural)11. Le droit pénal apporte à l’animal une certaine protection12. Il est protégé des atteintes à son intégrité physique et sexuelle, à travers notamment le délit de sévices graves et d’actes de cruauté prévu par l’article 521-1 du Code pénal et le délit d’atteinte sexuelle (art. 521-1-1, al. 1 du Code pénal). Le délit d’atteinte volontaire à la vie d’un animal a été créé par la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 (art. R. 655-1 Code pénal). La raison d’être de cette loi récente n’est pas anodine : lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes.
5. À notre époque où la sensibilité de la société vis-à-vis de la souffrance animale est en progression13, un autre mouvement de fond surgit sur les scènes médiatique et juridique : la prise de conscience de la crise climatique et du déclin de la biodiversité. Cette mise en mouvement influe sur le contentieux administratif14, ainsi que sur le législateur, qui prend acte de cette crise. L’article L. 110-1 du Code de l'environnement dispose que « […] les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. […] Leur connaissance, leur protection, [...] la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu’ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Plus spécifique au contexte communal, la végétalisation des façades et toitures est désormais autorisée et encouragée dans les communes, sous réserve des dispositions du décret n° 2022-1653 du 23 décembre 2022 qui encadre l’application de l'article L. 152-5-1 du Code de l’urbanisme créé par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 dite « Climat et Résilience ». Par ailleurs, dans le cadre des plans locaux d'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durable (PADD), prévu par l'article L. 151-5 du Code de l'urbanisme, est une opportunité pour les collectivités d’aménager une place pour la biodiversité même en milieu urbain15.
6. Le maire, intervenant à l’échelon local et garant de l’ordre public sur le territoire de sa commune en tant qu’autorité décentralisée de police administrative générale16, est au premier rang des évolutions de la société. Actuellement, beaucoup d’élus locaux ne restent pas insensibles aux questions de retour de la biodiversité en ville ainsi qu’au rôle qu’ont les animaux dans ce retour. À Paris où certains pouvoirs de police administrative générale municipale sont dévolus au préfet de police (art. L. 131-1 et L. 131-2 du Code de la sécurité intérieure), la présence de lapins de garenne sur l’esplanade des Invalides a été perçue comme un risque d’« atteinte grave à la sécurité publique » et l’espèce a été classée comme étant susceptible de causer des dégâts. Plusieurs arrêtés ont été adoptés par le préfet en vue de la destruction des lapins, puis annulés par la justice administrative. Le dernier arrêté a été adopté le 10 janvier 202417 et, contrairement aux précédents, il n’a pas pour objet la destruction des spécimens concernés, mais leur capture puis leur introduction sur un domaine de la commune de Bréau.
7. Les prochains développements auront pour objectif de montrer en quoi l'animal, être vivant doué de sensibilité, a fait irruption dans l'ordre public communal depuis longtemps, et que sa place y est, aujourd'hui, questionnée. Nous verrons en effet que l’animal peut être appréhendé par l’ordre public de différentes façons. Dans une partie du contentieux, nous constaterons que l’animal est perçu avant tout comme un objet susceptible d’occasionner des troubles à l’ordre public matériel dans la commune (I). Plus récemment, la question de la protection de l’animal est à l’origine de plusieurs jurisprudences où l’invocation de l’ordre public immatériel a été discutée et rejetée par le juge administratif (II).

I. L’animal saisi par l’ordre public matériel communal

8. L’animal, bien que reconnu comme un être sensible depuis 197618, est appréhendé en droit de la police administrative avant tout comme un objet source de risques de troubles à l’ordre public, à l’image des incontournables pigeons. Ces derniers sont les « indésirables » de nos villes en raison de leurs déjections sources d’insalubrité publique, voire de leurs roucoulements intempestifs, nuisant à la tranquillité publique19. Si l’on observe l’ordre public communal dans sa conception matérielle et extérieure, le maire a une compétence large face à l’animal au titre de ses pouvoirs de police administrative générale qu’il détient en vertu de l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales (A) et au titre de certaines compétences de police spéciale qui lui sont attribuées (B).

A. L’animal, objet d’application des pouvoirs de police administrative générale du maire dans sa commune

9. La diversité des espèces animales qui coexistent avec l’être humain dans ses activités agricoles (a) ou plus généralement dans toutes les activités qu’il conduit dans son espace de vie majoritairement urbain20 (b) sont autant d’occasions de questionner comment la notion d’ordre public peut accueillir l’animal.

a) L’appréhension de l’animal des campagnes par l’ordre public communal

10. Autrefois, la présence de bestiaux aux abords des habitations pouvait s’expliquer notamment par une nécessité de recyclage des déchets car les animaux se nourrissaient des détritus. De nos jours, le regard a changé, la présence des animaux eux-mêmes étant perçue d’une part comme une cause d’insalubrité, en raison notamment de leurs déjections21 ; d’autre part, comme un risque pour la sécurité des personnes et des biens. C’est ce qui se produit par exemple avec l’irruption de sangliers dans plusieurs villes de France et de façon de plus en plus habituelle ces dernières années22.
11. En ce qui concerne les bovins, leur circulation au milieu de l’espace fortement anthropisé qu’est la ville ou le village suscite un certain nombre de cas contentieux liés à des troubles à l’ordre public. Cela peut concerner en particulier des considérations de sûreté, laquelle est associée à la commodité du passage dans les rues (1° de l’article L. 2212-2 CGCT). Dans une décision rendue en 199723, le Conseil d’État a jugé qu’un arrêté adopté par un maire pour réglementer la circulation des véhicules et des troupeaux sur un emplacement situé sur la place du village n'excédait pas, eu égard à la destination et à l'aménagement des lieux publics concernés, les mesures qui pouvaient légalement être prises dans l'intérêt des piétons et de la conservation de ces lieux. Le maire avait, par cette mesure, interdit de façon permanente la circulation « à tout véhicule ou troupeau d'animaux sur la place du village et les espaces verts et, plus particulièrement, sur la partie constituée par du sable compact ». Le juge a suivi son commissaire du gouvernement qui considérait que la mesure était proportionnée aux buts poursuivis car elle laissait possible la circulation sur les parties goudronnées. En dépit du caractère permanent de l’interdiction, elle n'excédait donc pas les mesures que le maire pouvait légalement prendre dans l'intérêt général. Le fait que les habitants du lieu concerné fassent passer leurs troupeaux sur la place depuis des temps immémoriaux n'a pas été jugé comme étant de nature à affecter la légalité de la mesure de police, car les bêtes de la requérante conservaient un accès direct à son exploitation par l'arrière de celle-ci24. L’animal d’élevage est appréhendé ici dans le cadre d’un ensemble global de nuisances liées aux activités agricoles. En effet, la présence de véhicules lourds (tels que des tracteurs) apparaît tout aussi déterminante que celle des animaux.
12. De façon similaire, vingt ans plus tard, la divagation de bovins est perçue comme une menace, cette fois pour la sécurité publique. Ainsi, le juge a rappelé que le dépôt, dans un lieu désigné, du bétail en état de divagation sur le territoire municipal fait partie des mesures que le maire peut prendre en application des dispositions du 7° de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales, alors même que la divagation du bétail affecte aussi d'autres communes25. Cet alinéa 7 prévoit que la police municipale comprend notamment le soin d'obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par la divagation des animaux malfaisants ou féroces. Ainsi, si l’autorité de police administrative municipale ne prend pas les mesures nécessaires pour mettre un terme aux dégradations, nuisances et risques pour la sécurité publique causés depuis de nombreuses années par le bétail divaguant librement sur son territoire, elle commet une faute de nature à engager la responsabilité de la commune26.
13. Le juge administratif demeure constant, en reconnaissant à nouveau, plus récemment, la carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police dans une affaire où des accidents avaient été causés par la présence d'une vache divaguant sur la voie publique27. Le seul motif que la commune ne comporte ni éleveur ni troupeau sur son territoire et qu'elle avait aménagé un lieu de dépôt pour le bétail divaguant, alors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis que ce dépôt avait été effectivement utilisé ou que d'autres mesures avaient été prises pour obvier au danger provoqué par la divagation d'animaux sur les voies de circulation de la commune, ne permet pas d'écarter la carence du maire. Là aussi, les juges du Palais royal s’appuient sur le 7° de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales susmentionné, disposition qui autorise le maire à organiser le dépôt, dans un lieu désigné, du bétail en état de divagation28. Si l’on pouvait avoir un doute sur la possibilité d’un caractère « malfaisant ou féroce »29 à propos du bétail mentionné dans la décision précédente, il est ici précisé que les animaux divaguant sur la voie publique sont des vaches, peu connues pour leur dangerosité, contrairement aux taureaux. Le juge adopte une vision extensive du caractère « malfaisant ou féroce » afin d’y faire entrer l’espèce bovine30. On constate à travers ces jurisprudences que le juge administratif adopte une approche pragmatique de la question de l'animal dans la commune. Le juge tient compte de l’usage qui est fait de l'animal par l'homme dans une situation donnée.
14. Beaucoup plus largement, la présence et l’élevage d’animaux posent d’autres questions de sécurité publique. Ainsi, en ce qui concerne la circulation de certains véhicules lourds de livraison de fourrage, nécessaire pour nourrir des cheptels, le juge des référés du Conseil d’État a reconnu l’existence d'une atteinte grave à une liberté fondamentale, la liberté d'entreprendre, en raison d'un arrêté du maire d'une commune interdisant la circulation des véhicules dont le poids total roulant autorisé est supérieur à 3,5 tonnes sur une voie rurale menant à une exploitation agricole, où des ovins et des poulinières devaient être nourris, ce qui nécessitait la livraison régulière de fourrage31. Sur un autre versant de la question, l’élevage d’animaux pose aussi des problèmes de troubles anormaux de voisinage32.
15. Loin d’être cantonnée au milieu rural, l’agriculture connaît une renaissance aujourd’hui avec sa déclinaison urbaine : « l’agriculture “débarque” en ville, sous des formes plus ou moins inédites », sous l’instigation principale des communes33. Ainsi, « alors que les villes ne cessent d’“avaler” les surfaces agricoles et donc d’envahir les campagnes »34, la frontière s’efface entre ruralité et espace urbain. Ce qui laisse entrevoir de futures questions liées à la présence d’animaux, domestiques mais aussi sauvages, en ville35.

b) La confrontation de l’animal et de l’ordre public communal

16. De façon assez classique, les compétences de police administrative générale du maire peuvent ici s’articuler, sous certaines conditions, à celles du préfet.
17. En 1991, le Conseil d’État a rendu une décision concernant des élevages d'abeilles présents dans la partie urbanisée d’une commune36. Le maire de la commune de Fagnières avait pris un arrêté prononçant l'interdiction de l'implantation de ruchers dans les zones urbaines de la commune et enjoignant de les déplacer en dehors de ces zones avant une date butoir. Sans relever explicitement la présence de circonstances locales particulières, les juges du Palais royal ont confirmé que cet arrêté relevait bien de l'exercice du pouvoir général de police du maire, en complément des dispositions édictées en matière de police des ruches d'abeilles par l'arrêté du préfet de la Marne du 6 mai 1927. Les juges ont précisé que ces mesures prises par le maire n’étaient légales qu'autant qu'elles étaient nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens. En l’espèce, eu égard aux inconvénients que pouvaient susciter les élevages d'abeilles présents dans la partie urbanisée de la commune, ils ont jugé que ces dispositions n’étaient pas excessives. Il est permis de penser qu’aujourd’hui, une telle affaire serait tranchée différemment, au regard du danger d’extinction notable qui menace les abeilles actuellement.
18. En présence d’animaux dits « nuisibles » tels que les rats, les enjeux de sécurité peuvent se mêler à ceux du bon ordre et de la salubrité publique. Dans un arrêt rendu en 1992, la Cour administrative d’appel de Nancy a reconnu la responsabilité du maire d'une commune pour carence dans ses missions de police administrative générale, en raison, dans le quartier du requérant, du développement, entre autres, de dépôts sauvages d'ordures et de ferrailles, de l'abandon de détritus et d’épaves de véhicules sur la voie publique, de la prolifération de rats et autres animaux nuisibles, de la divagation des chiens, chèvres et poules, de bruits et tapages nocturnes répétés, d'implantation sans autorisation de caravanes servant d'habitations permanentes et dont les occupants troublaient le repos des riverains37. Ici, les animaux présents sont perçus par le juge comme faisant partie d’un ensemble de « nuisances affectant le quartier ». La police étant étatisée dans cette commune, le juge d’appel a précisé que le représentant de l'État dans le département était compétent pour réprimer les atteintes à la tranquillité publique et au bon ordre quand il se fait occasionnellement de grands rassemblements d'hommes, mais que le maire était bien compétent pour prendre les mesures nécessaires en vue de prévenir les autres risques de trouble à l'ordre public, c’est-à-dire « le bon ordre, la santé, la sécurité et la salubrité publiques »38.
19. Au fil du temps, les mesures d’interdiction du maire sont inlassablement scrutées par le juge administratif. Sans surprise, une mesure de police administrative n’étant légale que si elle est adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi39, le maire ne peut pas prendre un arrêté interdisant de manière générale et absolue les aboiements et hurlements des chiens de garde sur tout le territoire d’une commune40.
20. Dans une affaire concernant la circulation de chevaux sur la plage d’une commune, les juges du Conseil d’État ont opéré un contrôle de proportionnalité pour déterminer si la mesure d’interdiction des chevaux entre deux points kilométriques, adoptée par le maire, ne portait pas une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie ni à la liberté d'aller et de venir41. Il en résulte que cette mesure, qui s'appliquait dans une bande littorale de sable blanc bordée notamment d'hôtels, était motivée à la fois par le danger que présentait pour les riverains et les usagers de la plage le passage des chevaux, et par les désagréments provoqués par les déjections provenant des animaux. La préservation de la tranquillité publique vise en principe à maintenir des conditions de vie paisible sur le territoire de la commune, ce qui inclut la prévention de certaines gênes, telles que « les bruits, les disputes ou rixes, les attroupements de personnes ou encore les rassemblements nocturnes »42, et non spécifiquement les animaux. Si l'arrêté attaqué interdisait la pratique des randonnées équestres sur une importante partie du rivage de la commune et faisait obstacle à ce que l'activité du requérant, qui exploitait une entreprise de location de chevaux, continue à s'exercer dans cette zone, cette interdiction ne s'appliquait ni sur les autres parties du rivage, ni sur le reste du territoire de la commune. Ainsi, « eu égard aux risques et aux inconvénients pour la sécurité et la tranquillité des riverains et des usagers de la plage provoqués par la circulation des chevaux dans cette zone fréquentée par les touristes », le maire n'a, dans les circonstances de l'espèce, porté une atteinte excessive ni à la liberté du commerce et de l'industrie ni à la liberté d'aller et de venir.
21. Plus récemment, la protection de l’ordre public contre les menaces créées par la présence d’animaux dans la commune n’a pas pour autant permis de reconnaître un risque d’atteinte au droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé tel que protégé par l’article 1er de la charte de l’environnement du 1er mars 2005. En cohérence avec les strictes conditions de reconnaissance de ce droit en tant que liberté fondamentale protégée par la procédure de référé de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative43, le Conseil d’État a jugé que les désagréments occasionnés par la grève des éboueurs – y compris la recrudescence des rats – ne constituent pas une situation d'urgence impliquant qu'une mesure visant à sauvegarder le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé doive être prise dans un délai de quarante-huit heures44.

B. L’animal, objet d’application des pouvoirs de police administrative spéciale du maire dans sa commune

22. L’animal est aussi appréhendé par quelques polices spéciales dédiées aux animaux, dont certaines sont confiées au maire en tant qu’autorité de police administrative dans sa commune.
23. Il s’agit d’une part de la police des animaux dangereux ou errants, prévue par les articles L. 211-11 à L. 211-28 du Code rural et de la pêche maritime, et d’autre part de la police de la circulation, laquelle, en vertu de l'article L. 2213-4 du Code général des collectivités territoriales, permet au maire d’« interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques ». Ainsi, un maire a récemment fermé une route de sa commune pendant un mois afin de préserver les batraciens pendant leur période de reproduction, et éviter qu’ils ne soient écrasés par les automobiles passant par là45. De façon similaire, un autre élu local a fait installer des panneaux de signalisation indiquant le passage de loutres sur un secteur de la commune et invitant les automobilistes à ralentir46.
24. Autrement, la police des autorisations de la présence d’animaux d’espèces non domestiques dans des établissements destinés à la présentation au public de spécimens vivants revient au préfet (articles L. 413-9 à L. 413-14 du Code de l’environnement). La police de la prévention de la destruction des oiseaux ou de toutes espèces de gibier est confiée au ministre chargé de la chasse, en vertu de l’article L. 424-1 du Code de l’environnement ; la police de la pêche est dévolue au préfet, en vertu des dispositions du titre III du livre IV du Code de l'environnement, et celle de la chasse est confiée au gouvernement, en vertu de l’article L. 420-2 du Code de l'environnement47.
25. À titre de comparaison, il existe plusieurs dizaines de polices spéciales en matière de santé et d'environnement, telles que la police des produits phytopharmaceutiques, de l'habitat insalubre, des produits de santé, etc., réparties dans les Codes de l'environnement, de la santé publique, de la construction et de l'habitation, et le Code général des collectivités territoriales48.
26. Le nombre modeste de polices spéciales portant spécifiquement sur la présence d’animaux et susceptibles de concerner le territoire communal permet, comme nous l’avons vu, au maire une large intervention en vertu de son pouvoir de police administrative générale pouvant s’appliquer par défaut à toutes les situations où le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques sont menacés. Cependant, le peu de polices spéciales dédiées illustre sans doute l’immaturité de cette matière, tant sur le plan juridique que politique.
27. Nous aborderons les possibilités d’intervention du maire face aux risques liés aux animaux dangereux et errants, prévues par les articles L. 211-11 à L. 211-2849 du Code rural et de la pêche maritime, en nous intéressant aux chiens (a) et aux chats (b) et nous constaterons que l’ordre public ici envisagé par ces polices spéciales ne se distingue pas intensément de l’ordre public général, mais vise surtout à confier au maire des pouvoirs particuliers.

a) Le chien errant ou dangereux saisi par l’ordre public communal

28. Afin de préserver la sécurité publique, le maire peut ordonner l’euthanasie d’un chien placé en fourrière par le biais d’un arrêté reposant sur le double fondement des pouvoirs de police générale reconnus au maire par le Code général des collectivités territoriales et des dispositions du Code rural relatives aux animaux dangereux50.
29. En effet, en vertu de l’article L. 211-11 du Code rural, « en cas de danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le maire ou à défaut le préfet peut ordonner par arrêté que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci et, le cas échéant, faire procéder à son euthanasie ». Un chien « est réputé présenter un danger grave et immédiat » lorsqu’il appartient à la première catégorie de l’article L. 211-12 du même code (les chiens d'attaque) ou à la seconde catégorie du même article (les chiens de garde et de défense), et qu’il est « détenu par une personne mentionnée à l'article L. 211-1351 ou qui se trouve dans un lieu où sa présence est interdite par le I de l'article L. 211-16 », par exemple les transports en commun, ou « qui circule sans être muselé et tenu en laisse dans les conditions prévues par le II du même article, ou dont le propriétaire ou le détenteur n'est pas titulaire de l'attestation d'aptitude prévue au I de l'article L. 211-13-1 ».
30. Le fait pour une autorité publique d'ordonner l'euthanasie d'un animal constitue pour son propriétaire ou son détenteur, par nature et quels que soient les motifs d'une telle mesure, une atteinte grave à son droit de propriété. Le juge concilie la protection de ce droit avec la nécessité de protéger autrui du danger présenté par les chiens concernés. Compte tenu du caractère irréversible des décisions d’euthanasie de chiens susceptibles d’être dangereux prises par le maire en sa qualité d’autorité de police spéciale, le juge des référés saisi sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative a reconnu à plusieurs reprises le caractère d’urgence de la suspension de l’arrêté d’euthanasie. Ainsi, dans une ordonnance rendue en 2008, le juge des référés du Conseil d’État a considéré que la condition d’urgence était remplie et que le fait que le chien ne relevait pas de la deuxième catégorie des chiens réputés dangereux au sens des articles L. 211-11 à L. 211-16 du Code rural, était susceptible, en l'état de l'instruction, de faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté d’euthanasie litigieux52.
31. Le juge administratif applique néanmoins une compréhension large du risque présenté par le chien mordeur, en vue d’assurer une pleine protection de la sécurité publique. On l’observe dans une autre affaire, où le juge des référés du Conseil d’État saisi cette fois sur le fondement de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative, a refusé de suspendre la décision d’euthanasier un chien dans les plus brefs délais, en tenant compte du fait qu’« il ressort des dispositions de l'article L. 211-14-2 du code rural et de la pêche maritime, éclairées par les travaux parlementaires préalables à l'adoption de l'article 7 de la loi du 20 juin 2008 renforçant les mesures de prévention et de protection des personnes contre les chiens dangereux dont elles sont issues, qu'elles s'appliquent à l'ensemble des chiens ayant mordu une personne et non uniquement aux types de chiens, réputés dangereux »53. Partant, il a jugé que le maire n'a pas excédé le champ des pouvoirs de police qu'il tient de ce texte. À ce titre, l’animal domestique ne bénéficie pas d’un traitement de faveur par rapport à l’animal d’élevage évoqué précédemment : pour le juge administratif, toute menace avérée pour l’ordre public matériel communal justifie la même approche précautionneuse.
32. Il est toutefois intéressant de noter que dans cette affaire, le juge concède « qu'il ressort du compte-rendu rédigé par le docteur vétérinaire ayant procédé, sur demande de la mairie, à l'évaluation comportementale de l'animal, que celle-ci s'est déroulée après plus d'un mois de captivité, sans contact direct avec l'animal et en l'absence de son maître, auquel il est lié par un attachement qualifié « d'exceptionnel » […] ; que de telles conditions d'évaluation, qui résultent au demeurant de la carence [du propriétaire] à y pourvoir antérieurement de sa propre initiative ainsi qu'il en avait l'obligation légale, ont pu conduire à surestimer la dangerosité de l'animal ». Il note également que le chien « n'a mordu, dans un but exclusivement défensif, que des personnes qui ont eu des gestes agressifs à l'égard de son propriétaire sans jamais se montrer menaçant pour de simples passants sur la voie publique » et que l’animal a ensuite été cédé à une autre personne, résidant en milieu rural, où la présence du chien n’aurait pas présenté de risque de danger pour l’ordre public. Selon le juge, « ces éléments apparaissent toutefois insuffisants, au regard de la réitération des cas de morsure et des appréciations portées successivement par deux docteurs vétérinaires sur la dangerosité de l'animal, pour permettre de regarder comme satisfaite la condition d'illégalité manifeste posée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative ».
33. Plus récemment, le juge des référés du Conseil d'État, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative, a, dans des conditions similaires, rejeté la demande de suspension d’une disposition d’un arrêté pris par un maire ordonnant l’euthanasie d’un chien54. La décision du maire n’était ici pas manifestement illégale, dans la mesure où le chien, qui avait déjà mordu par le passé, avait réussi à s'échapper de la propriété de ses maîtres et s'était retrouvé sur la voie publique, attaquant des voitures et demeurant impossible à maîtriser, jusqu’à mordre à nouveau une personne. Le juge a alors considéré que, malgré l’urgence de la situation, la violation du droit de propriété n’était pas manifestement illégale, la mesure du maire étant justifiée par le danger de l’espèce. Le juge n’a pas pris la peine d’étudier l’atteinte au « droit à la vie » de l'animal (mis entre guillemets dans l’ordonnance) également invoquée par les requérants55.

b) Le chat errant saisi par l’ordre public communal

34. Les articles L. 211-22 et suivants du Code rural et de la pêche maritime prévoient un régime de police spéciale du maire, détaillé comme suit : « les maires prennent toutes dispositions propres à empêcher la divagation des chiens et des chats […]. Ils prescrivent que les chiens et les chats errants et tous ceux qui seraient saisis sur le territoire de la commune soient conduits à la fourrière ». On considère qu’est en état de divagation « tout chat non identifié trouvé à plus de deux cents mètres des habitations ou tout chat trouvé à plus de mille mètres du domicile de son maître et qui n'est pas sous la surveillance immédiate de celui-ci, ainsi que tout chat dont le propriétaire n'est pas connu et qui est saisi sur la voie publique ou sur la propriété d'autrui » (art. L. 211-23 du Code rural et de la pêche maritime). Pour le maire, l'exercice de ce pouvoir de police suppose de mettre en œuvre la capacité d'accueillir les chats errants56.
35. Outre la lutte obligatoire contre la divagation des chats, le maire peut, à titre facultatif, « par arrêté, à son initiative ou à la demande d'une association de protection des animaux, faire procéder à la capture de chats non identifiés, sans propriétaire ou sans détenteur, vivant en groupe dans des lieux publics de la commune, afin de faire procéder à leur stérilisation et à leur identification […] préalablement à leur relâcher dans ces mêmes lieux. Cette identification doit être réalisée au nom de la commune ou de ladite association » (art. L. 211-27 du CRPM). Cela conduit à ce que le maire (ou l’association) devienne propriétaire du chat, et endosse dès lors la responsabilité du fait de ceux qui relèvent de la catégorie des « chats municipaux »57. Ces derniers pourront théoriquement circuler librement dans l’espace public, ouvrant la porte à l’engagement de la responsabilité du maire même sans qu’il ait eu connaissance des actes de chacun d’entre eux.
36. L’ordre public matériel communal englobe très naturellement l’animal par le biais de la préservation de la sécurité, de la sûreté, de la tranquillité ou de la salubrité publiques. Cela n’est pas étonnant car selon le professeur Jézougo, « la police générale est anthropomorphique », elle vise la protection de l’homme, et non celle de la nature et de la biodiversité58.
37. Au contraire, la dimension liée à la protection de l’animal échappe à cette conception traditionnelle de l’ordre public, le juge administratif ayant jugé que « les mauvais traitements envers les animaux ne relèvent ni du bon ordre ni de la sécurité ou de la salubrité publiques »59, et que « les conditions de vie des animaux ne relèvent ni de la sûreté, ni de la sécurité ou de la salubrité publiques »60. Notons quand même que dans des circonstances exceptionnelles régies par une police spéciale – non dévolue au maire –, les « besoins des animaux de compagnie » ont été inscrits dans le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, parmi les « activités sur la voie publique » prévues et autorisées pendant les périodes où les déplacements étaient interdits.
38. Nous verrons à présent que les composantes immatérielles de l’ordre public n’offrent guère plus de perspectives de protection à l’animal présent sur le territoire de la commune.

II. L’animal exclu de l’ordre public immatériel communal

39. La notion d’ordre public immatériel tranche avec la vision classique de l’ordre public, lequel, selon le Doyen Hauriou, « ne poursuit pas l’ordre moral dans les idées et dans les sentiments, ne pourchasse pas les désordres moraux », sinon « il verserait immédiatement dans l’inquisition et dans l’oppression des consciences »61. Comme le rappelle le professeur Chifflot, « le contenu de l'ordre public général varie [...] en fonction d'un certain “consensus”, interprété par les autorités publiques, dans une société donnée, à un moment particulier de son évolution »62. Et contrairement à une idée reçue, l’ordre public général comprend depuis longtemps une dimension immatérielle et spirituelle63.
40. On remarque que dans le cadre de son intégration dans l’ordre public matériel, l’animal est appréhendé comme une nuisance. Alors que dans le cadre des affaires contentieuses où une conception immatérielle de l’ordre public est invoquée, nous verrons qu’il s’agit là, dans la plupart des cas, de protéger l’animal.
41. L’évolution de la notion d’ordre public immatériel au profit par exemple du bien-être animal semble d’autant plus envisageable que, contrairement à l’ordre public matériel traditionnellement assez figé textuellement parlant64, la conception immatérielle de l’ordre public est sujette à des évolutions, à mesure que la société évolue. En effet, la notion de moralité publique n’est plus la même qu’il y a cent ans65. Celle de dignité fait l’objet de controverses sociétales et doctrinales dans son application en matière de mesures de police administrative66. Partant, il semble intéressant d’aborder la question de l’intégration de l’animal – en tant qu’être nécessitant une protection – dans les dimensions existantes de l’ordre public immatériel (A) mais aussi dans d’éventuelles futures et nouvelles composantes de l’ordre public imaginées par les premiers intéressés : les maires (B).

A. L’exclusion de la protection de l’animal des composantes existantes de l’ordre public immatériel

42. La moralité publique, reconnue comme étant une composante de l’ordre public, est tantôt conçue comme incluant la notion de dignité de la personne humaine67, tantôt présentée comme en étant distincte68. La question de l’insertion d’une éventuelle protection de l’animal dans l’une de ces composantes de l’ordre public se pose depuis quelques années devant le juge administratif. Mais ce dernier demeure intransigeant, tant sur l’incorporation d’une forme de protection de l’animal au sein de la notion de moralité publique (a), qu’à l’égard d’une hypothétique absorption de la considération animale au sein de la protection de la dignité humaine (b).

a) La moralité publique et l’animal

43. Alors qu’elle avait été introduite par le biais de la moralité publique, la protection de l'animal a finalement bénéficié, au XXème siècle, « d’une logique de protection […] pour lui-même comme être vivant et sensible »69. En effet, la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature prévoit en son article 9 que « tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce »70. Cette disposition n’obéit donc pas à la logique du général De Grammont qui, lors des travaux parlementaires sur la loi du 2 juillet 1850, défendait l’idée que « prévenir les mauvais traitements, c'est travailler à l'amélioration de la morale des hommes, à l'amélioration physique des animaux ; la douceur, la pitié à leur égard tient plus qu'on ne le pense à l'humanité, car l'homme dur et cruel envers les animaux le sera pour tous les êtres confiés à son autorité ou à sa protection »71.
44. Seuls les éléments les plus objectifs de la moralité publique, c'est-à-dire « les plus communément partagés par les membres d'une société », relèvent de l'ordre public, ce qui inclut la décence72. Ce terme correspond aux « bonnes mœurs ». Comme l’a rappelé la Cour de justice de l’Union européenne, la notion de « bonnes mœurs » est évolutive, et peut varier d’un État à l’autre73.
45. La moralité publique est majoritairement perçue comme entrant dans le champ de la police administrative si et seulement si une activité jugée immorale « a, dans le contexte particulier de temps ou de lieu où elle intervient, des répercussions sur l’une des composantes de l’ordre public »74. L'autorité de police peut donc potentiellement prendre en compte « les sentiments, les valeurs, les croyances qui dominent au sein de la population »75, au regard de circonstances locales particulières. Mais le fondement de la moralité publique est très difficilement invocable de nos jours76. Ainsi, le juge administratif a jugé par exemple qu’un arrêté municipal interdisant l'affichage d'une campagne de prévention contre le sida est illégal si l'atteinte à la moralité publique alléguée ne s'accompagne pas de circonstances locales particulières le justifiant77.
46. Cela explique en partie pourquoi, en matière de présence d’animaux d’espèces non domestiques dans des établissements destinés à la présentation au public de spécimens vivants – notamment les cirques itinérants –, le juge administratif annule les mesures d’interdiction prises par les autorités de police administrative municipales fondées sur la moralité publique. D’autant plus que les maires, nous le verrons dans les contentieux évoqués ici, fondent leurs mesures de police administrative générale sur la protection de la moralité publique, sans toujours faire état d’un trouble matériel à l’ordre public qui en serait la conséquence.
47. L’autre raison, qui est en fait la principale, à ces annulations par le juge administratif, est que la présence d’animaux d’espèces non domestiques dans des établissements destinés à la présentation au public de spécimens vivants est régie par une police administrative spéciale de l’État, ce qui exclut la compétence de police générale du maire78. En effet, l’article L. 413-3 du Code de l'environnement dispose que « l'ouverture des établissements destinés à la présentation au public de spécimens vivants de la faune locale ou étrangère, doi[t] faire l'objet d'une autorisation délivrée dans les conditions et selon les modalités fixées par un décret en Conseil d'État ». Ces établissements sont soumis au contrôle de l'autorité administrative lorsqu'ils détiennent des animaux d'espèces non domestiques (art. L. 413-4 Code de l'environnement). Ces dispositions sont précisées par l’arrêté du 18 mars 2011 fixant les conditions de détention et d'utilisation des animaux vivants d'espèces non domestiques dans les établissements de spectacles itinérants, lequel prévoit autant des mesures de protection de la sécurité des personnes, que de la santé et du bien-être des animaux utilisés. Cependant, au regard de l’état de certains de ces animaux captifs dans les affaires récemment portées devant le juge administratif, on peut douter de l’efficacité du contrôle opéré par l’autorité administrative79.
48. En tout état de cause, en raison de cette police spéciale dévolue au préfet, le juge s’appuie classiquement sur le principe d’exclusivité de la police administrative spéciale pour exclure toute compétence municipale en la matière80. Nonobstant l'adage specialia generalibus derogant, le juge prend souvent soin de vérifier, quand même, si la « police générale [peut] intervenir dans les interstices laissés vacants par la police spéciale »81. Cela correspond à la possibilité, quoique restreinte, du maire, « au nom de sa police générale », de « prendre des mesures plus rigoureuses, mais uniquement en invoquant l’existence de circonstances locales particulières, conformément à la célèbre jurisprudence Lutetia »82, ou alors aux cas de péril imminent.
49. Les règles liées au concours des mesures de police n’empêchent donc pas les maires, en attendant que ces spectacles présentant des animaux sauvages soient interdits, en 2028, en vertu de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021, de prendre des initiatives au niveau communal. Plusieurs d’entre eux ont tenté de justifier leurs interventions de police générale par des motifs liés à la protection de l’ordre public immatériel et en particulier de la moralité publique. Il a pu être avancé le fait que les cirques itinérants ne peuvent offrir aux animaux sauvages un espace et des conditions de détention adaptés à leurs exigences biologiques, à leurs aptitudes et à leurs mœurs et que leur mise en spectacle est, dans ces conditions, incompatible avec leurs besoins biologiques et leur habitat83.
50. À notre connaissance, l’existence de circonstances locales exigée pour justifier l’intervention de l’autorité de police administrative générale sur le fondement d’une atteinte à la moralité publique, dans les cas d’arrêtés pris par des maires interdisant l'installation de cirques et spectacles détenant des animaux en vue de leur présentation au public sur le territoire communal, n’est jamais reconnue. Ainsi, ne sont pas des circonstances locales justifiant une mesure de police d’interdiction le fait que des habitants aient saisi le maire de plaintes à propos « d'animaux confinés dans d'étroites cages sur des camions, ou attachés à un piquet sous la pluie, ou en plein soleil, certains ne paraissant même pas en très bonne santé », et qu'il y ait localement des militants associatifs ainsi qu’une pétition en ligne pour la protection des animaux présents dans le spectacle itinérant84.
51. De même, la seule présence de nombreuses familles et d'enfants sur le territoire communal, notamment en période estivale, ne suffit pas à caractériser ces circonstances85. Dans une autre de ces affaires, ni le fait que le maire de la commune de Bastia avait reçu, dans le fil d'un mouvement de contestation nationale et préalablement à l'édiction de l'arrêté attaqué, de nombreux courriers électroniques d'administrés, faisant part de leur hostilité aux spectacles itinérants faisant intervenir des animaux vivants, ni le fait que plusieurs manifestations d'opposition à de tels spectacles aient été organisées en Corse, ne permettent au juge de constater qu'un risque de débordement à l'entrée des cirques aurait existé, ou qu'un tel risque n'aurait pu être circonscrit par d'autres mesures que l'interdiction des spectacles en cause86.
52. La décision de la Cour européenne des droits de l’homme du 13 février 202487 dans laquelle elle a jugé que le bien-être animal est un élément de la « morale publique »88, amorcera peut-être un changement au niveau du juge national. Saisie d’une affaire concernant l’interdiction de l’abattage rituel des animaux sans étourdissement préalable, sauf à prévoir un étourdissement réversible, par deux décrets pris par deux régions du Royaume de la Belgique conformément à la législation en vigueur visant la protection et le bien-être des animaux en tant qu’être sensibles, la Cour a jugé qu’il n’y avait pas de violation des dispositions de l’article 9 relatif à la liberté de pensée, de conscience et de religion, de la Convention européenne des droits de l’homme invoqué par les requérants – les communautés musulmane et juive de la Belgique – dès lors que les autorités belges compétentes avaient pris une mesure « justifiée dans son principe et qui peut passer pour proportionnée au but poursuivi, à savoir la protection du bien-être animal en tant qu'élément de la “morale publique” »89.
53. À cette occasion, la Cour européenne des droits de l’homme a fait preuve d’une grande « ingéniosité technique »90, en rattachant de façon inédite la protection du bien-être animal à la protection de la morale publique au regard de l'article 9 de la convention, alors que la protection animale n’apparaît nulle part dans les droits inscrits dans cette convention et ses protocoles additionnels. Le juge national fera-t-il preuve d'un degré de créativité comparable, en intégrant la protection animale à la notion d’ordre public général ? Le professeur Marguénaud estime en tout cas que les considérations de la Cour EDH dans cet arrêt récent ont « vocation à rayonner dans un proche avenir sur l'ensemble du droit animalier »91.

b) La dignité humaine et l’animal

54. L’introduction de la notion de dignité humaine dans les systèmes juridiques internationaux et nationaux a été amorcée après la Seconde Guerre mondiale, en réaction aux atrocités commises par les nazis. En France, le Conseil constitutionnel a affirmé que « la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle »92. Le juge administratif suprême, dans son arrêt rendu en 1995, Commune de Morsang-sur-Orge, considère que la dignité humaine est une composante de l’ordre public, que le maire, sur le territoire de sa commune, doit donc protéger grâce à ses pouvoirs de police administrative générale93.
55. Même avant cela, le juge administratif s’était attaché au « respect dû aux morts » dans une décision où il avait confirmé la mesure d’interdiction prise par un maire qu’un animal de compagnie soit enterré dans le cimetière de la commune94. On peut peut-être y voir une prémisse de reconnaissance jurisprudentielle de la dignité de la personne humaine décédée, nécessitant de la maintenir strictement séparée du cadavre d’un animal95.
56. L’introduction de la dignité de la personne humaine – une notion pourtant fondamentale, qui correspond à une finalité en soi, « fondement éthique de la société contemporaine »96 – dans l’ordre public général avait annoncé, aux yeux de certains, le risque d'une « diversification sans fin des finalités en vue desquelles les autorités de police peuvent restreindre les libertés »97 et fait encore débat aujourd’hui98. Il y a donc fort à parier que l'ajout d'une composante de l'ordre public fondée sur la protection des animaux susciterait de vives réactions. Les tentatives sont pour l’instant restées infructueuses (voir infra).
57. Le commissaire du gouvernement Patrick Frydman, dans ses conclusions sur l'affaire « des lancers de nains », illustrait, à l'aide des réactions du corps social de l'époque, le caractère indigne et malsain de tels spectacles, ne pouvant pas trouver leur place dans une société civilisée. Il relevait par exemple que « l'Association nationale des personnes de petite taille a fait connaître publiquement son indignation à ce sujet, en soulignant – de manière effectivement frappante – que la protestation de l'opinion publique face à une telle attraction serait unanime si c'était à un animal qu'on infligeait le traitement ainsi subi par le nain »99.
58. Sur une autre question, le Conseil d’État a jugé en 2015 que si l'exposition, dans la vitrine d’une boulangerie, de pâtisseries obscènes et s'inscrivant délibérément dans l'iconographie colonialiste était de nature à choquer, aucune illégalité manifeste portant atteinte à une liberté fondamentale ne pouvait toutefois être constatée, nonobstant l'abstention puis le refus du maire de Grasse de faire usage de ses pouvoirs de police pour y mettre fin100. Le professeur Melleray soulignait alors que la sensibilité à l'égard d'une forme d'imaginaire colonialiste s'est sensiblement accrue ces dernières années et se demandait si elle ne finirait pas par atteindre le seuil justifiant que l'on considère qu'il y a dans une telle hypothèse une atteinte à la dignité de la personne humaine101.
59. Au regard du sujet qui nous intéresse ici, il convient d’interroger les contours de la notion de dignité de la personne humaine. Peut-on considérer qu’elle puisse être heurtée par la vue d’un traitement cruel envers un animal ? Et si oui, de quelle sorte de traitement parlerait-on ? Au niveau communal, est-ce que cela s’appliquerait à la présence d’un animal sauvage dans un cirque, ou alors, beaucoup plus largement, à la présence d’un abattoir ou d’un élevage intensif à proximité d’habitations ? Il ne serait pas étonnant que cette dernière question se pose prochainement devant le juge administratif, au vu des messages portés aujourd’hui par les associations de protection animale.
60. Saisi par l’association L214, le tribunal administratif de Paris, statuant sur une partie des activités d’une cellule de renseignement nommée Déméter mise en place au sein de la gendarmerie nationale par le ministère de l'Intérieur, dédiée aux « atteintes au monde agricole », a rappelé en 2022 que les missions de police administrative et de renseignement de la gendarmerie nationale ne pouvaient avoir pour but que de préserver l'ordre, la sécurité publique et de prévenir les infractions, ce qui signifie que la prévention des « actions de nature idéologique » (par exemple le dénigrement du monde agricole, les « actions anti-fourrures », etc.) ne se rattache pas aux missions de la gendarmerie nationale102.
61. À la question de savoir si l’ordre public immatériel peut évoluer dans le sens de la prise en compte de la condition animale, on peut avancer qu’il évolue constamment en fonction des mœurs de la société. Le commissaire du gouvernement Frydman, dans ses conclusions précédemment évoquées, soulignait que « nos ancêtres d'il y a un siècle étaient très certainement plus choqués par les spectacles d'inspiration érotique que par l'exhibition de phénomènes de foire, alors que l'ordre des valeurs à cet égard, dans la société contemporaine, nous paraît s'être très certainement inversé »103. Notons que la rapporteure publique, sur l'affaire Commune de Pessac104 susmentionnée, évoquait l'indignation d'une partie de la population face aux spectacles itinérants utilisant des animaux sauvages105. Ce n’était peut-être pas volontaire, mais l’utilisation du terme « indignation » renvoie à un « sentiment de colère et de révolte suscité par tout ce qui peut provoquer la réprobation et porter plus ou moins atteinte à la dignité de l'homme »106. Néanmoins, le rapporteur public, sur une affaire portant sur l'interdiction de l'installation d'un cirque présentant des animaux, tranchée en 2022 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, précise que le bien-être animal, qui n'est ni un principe de valeur constitutionnelle, ni un principe général du droit, ne fait pas partie de la notion de protection de la dignité de la personne humaine107.
62. En France et dans d’autres pays européens, ainsi qu’en Amérique latine, on semble évoluer vers une « culture qui répudie la violence à l’égard des animaux, en particulier celle qui semble inutile ou excessive, […] et qui semble découler de l’amélioration morale de la société elle-même, fondée sur le principe de la dignité de l’être humain »108. Il semble en effet y avoir un pont entre humanité et animalité à travers la notion de dignité : en traitant les animaux avec cruauté, l’humain dégrade sa propre dignité « et sa capacité de maîtrise de soi en s’abandonnant à ses impulsions »109.

B. La place théorique de la protection animale dans de nouvelles composantes de l’ordre public

63. La présence d’un animal sauvage dans un spectacle circassien a inspiré une réflexion sur l’insertion du bien-être animal dans l’ordre public (a) et sur celle de la dignité de l’animal (b). Ces revendications sont, sans surprise, restées lettre morte, car le juge administratif veille à ne pas excessivement élargir la notion d’ordre public général. Cela permet, d’une part, de ne pas augmenter les opportunités d’intervention de mesures de police administrative, par nature attentatoires aux libertés, et d’autre part, de ne pas augmenter déraisonnablement les possibilités d’engagement de la responsabilité du maire face à des obligations élargies.

a) Le bien-être animal

64. En plus de s’appuyer sur les composantes immatérielles de l’ordre public existantes, certains maires prennent l’initiative de fonder leurs interdictions d’installation de cirques avec animaux sauvages en vue de leur représentation au public sur le territoire communal sur la préservation du bien-être animal et de la dignité animale.
65. Dans le cadre de ces initiatives, ces éléments semblent parfois être appréhendés comme des sous-catégories de la moralité publique110. Dans d’autres cas, il semble au contraire que les fondements invoqués correspondent à des composantes innovantes de l’ordre public. Ainsi, le rapporteur public Barraud, dans ses conclusions sur une affaire concernant l'installation d'un cirque présentant des animaux, tranchée par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise en 2022111, soulignait que la commune en défense à l’origine d’un arrêté d’interdiction du spectacle envisagé, invitait le juge administratif à dégager un cinquième pilier de l'ordre public général, à savoir un principe de sauvegarde du bien-être animal. Selon le rapporteur public, « ni le Conseil constitutionnel, ni le Conseil d'État n'ont, à ce stade, dégagé un principe constitutionnel ou un principe général du droit de sauvegarde du bien-être animal. Et les dispositions précitées [la Charte de l’environnement, l'article 515-14 du Code civil et l’article L.214-1 du Code rural et de la pêche maritime] ne nous paraissent pas constituer une assise suffisante pour dégager un tel principe au niveau du tribunal »112. On peut toutefois penser qu’une lente évolution en ce sens est déjà en cours dans différents aspects du droit français et que cette dernière dépendra aussi de la prochaine révision des normes sur le bien-être animal en droit de l’Union européenne, prévue initialement en 2023 mais jusqu’à présent reportée.

b) Un principe équivalent à celui de la dignité humaine… au profit de l’animal

66. Dans une affaire aux faits similaires, le juge administratif a refusé de reconnaître « pour les animaux d'espèces non domestiques un principe équivalent à celui du respect de la dignité humaine justifiant que le maire puisse interdire de manière générale pour ce motif au nom de son pouvoir de police générale les spectacles présentant ces animaux, alors que de tels spectacles sont autorisés par la loi et que la protection du bien-être de ces animaux est par ailleurs strictement réglementée et contrôlée par les services de l'État »113.
67. Certes, le professeur Libchaber suggère que l'existence même d'incriminations liées aux atteintes portées aux animaux, prévues par le Code pénal, reconnaît implicitement leur dignité114. Mais il ne semble pas y avoir de volonté d’évolution actuellement, ni du côté du législateur115, ni du côté du juge administratif. La rapporteure publique, dans ses conclusions sur l’affaire Commune de Pessac116, estime que ni le respect du bien-être animal ni la « dignité de l'animal » – elle semble d'ailleurs appréhender les deux notions comme étant identiques – ne font partie des « idées morales naturellement admises dans la société française contemporaine ».
68. Cela étant dit, en élargissant ici un peu l’objectif, notons que selon le professeur Combaud, la mention explicite du droit à la vie d'un chien, par le juge administratif des référés, en 2020, à défaut d’être très lisible, « a au moins le mérite de montrer que l’évolution “mentale” du juge administratif est tout de même spectaculaire et que, même pour lui, le droit animalier ne relève plus de “l’anecdote” »117.

Conclusion

69. La présence des animaux sur les territoires des communes entre dans le champ d’intervention du maire, autorité de police administrative générale, par les biais de la protection des composantes traditionnelles et matérielles de l’ordre public, inscrites à l’article L. 2212-2 CGCT ainsi que par le biais de pouvoirs de police spéciale qui lui sont confiés.
70. L’ordre public communal inclut actuellement la protection de l’homme contre l’animal, mais n’inclut que très marginalement la protection de l’animal contre l’homme. Il semble que la prise en compte de l’animal dans l’espace public communal et dans l’ordre public qui s’y attache ne sera pas complète tant que la dimension immatérielle de l’ordre public ne lui ouvrira pas la porte. On ne parlera alors pas de lui comme un objet faisant partie d’un ensemble d’éléments à policer, mais comme un être sensible doué de sensibilité, débiteur d’un certain degré de protection.
71. Comment, alors, faire face aux nouveaux enjeux de réintroduction de la biodiversité en ville, à l’heure du réchauffement climatique ? Comment les maires vont-ils pouvoir faire entrer plus d’animalité sur leur territoire, sans que leurs obligations en tant que garants de l’ordre public municipal ne les freinent ?
72. Des sénateurs proposaient de compléter l'article L. 2212-2 du CGCT en faisant de la protection de l'environnement et du caractère des sites une nouvelle composante de l'ordre public général, consacrant ainsi la notion d'ordre public écologique118. Allant aussi dans le sens d’une cohabitation et d’une tolérance, la loi n° 2021-85 du 29 janvier 2021 consacre pour la première fois l'existence d'un patrimoine sensoriel constitué des sons et odeurs qui caractérisent les espaces, ressources et milieux naturels, ce qui inclut sans doute « les braiments et meuglements »119, mais il faudra attendre, pour en être sûr, l'inventaire du « patrimoine sensoriel et olfactif » censé être effectué par les régions.
73. L’intégration de nouveaux éléments de biodiversité – animale comme végétale d’ailleurs – dans la cité suscitera forcément des situations de potentiels troubles à l’ordre public. On peut donc se demander pendant encore combien de temps l'ordre public, ce « calme minimal » nécessaire pour que l'État puisse assurer ses missions visant la prospérité et le bien-être collectif120, pourra résister à ce nouveau modèle urbain121.

  • 1 A. FORLEN, La dimension historique de la notion d’ordre public (XVIe-XIXe siècles), Thèse, Université de Strasbourg, 2016, p. 246.
  • 2 CE, sect., 18 décembre 1959, Société « Les films Lutetia », n° 36385, Rec. 693 ; AJDA, 1960.I.21, chr. COMBARNOUS et GALABERT ; D. 1960. 171, note WEIL ; S. 1960. 94, concl. MAYRAS ; GAJA, Dalloz, 23ème éd. 2021, n° 70.
  • 3 A. FORLEN, La dimension historique de la notion d’ordre public (XVIe-XIXe siècles), op. cit., p. 247.
  • 4 A. FORLEN, La dimension historique de la notion d’ordre public (XVIe-XIXe siècles), op. cit., p. 245.
  • 5 F. GOLIARD, « Activités touristiques – Tourisme et animaux – Une mise à l'épreuve des dispositifs de protection du bien-être animal », JT 2024, n° 270, p. 44.
  • 6 En vertu de l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), « la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. […] ». V. à ce sujet M. OLLIVIER, « Bien commun, intérêt général, ordre public », in Grandeur et servitudes du bien commun, Mélanges en l’honneur de Jean-Claude Ricci, Dalloz, 2023, p. 469.
  • 7 Concl. sur CE, Ass., 30 janvier 1980, Ministre de l’Intérieur contre SA Librairie Maspero, AJDA, 1980, p. 242. M. OLLIVIER s’appuie sur cette définition dans « Bien commun, intérêt général, ordre public », in Grandeur et servitudes du bien commun, Mélanges en l’honneur de Jean-Claude Ricci, op. cit., p. 459.
  • 8 CC, 27 juillet 1982, n° 82-141 DC, Loi sur la communication audiovisuelle.
  • 9 N. CHIFFLOT, in Mélanges en l'honneur de Patrick Wachsmann, Défendre les libertés publiques, Dalloz, 2021, p. 157.
  • 10 v. par exemple A. QUESNE (dir.), Quel(s) droit(s) pour les animaux ? Mare & Martin, 2023, 176 p.
  • 11 v. à ce sujet F. NICOUD, « Maltraitance à animaux et pouvoir de police du maire », AJDA 2011, p. 1446.
  • 12 v. à ce sujet F. MARCHADIER, « Le préjudice subi par l'animal », LCP 2002, vol. 1, n° 9.
  • 13 Selon les sondages IFOP 2024, « les Français se déclarent toujours massivement en faveur de l’interdiction de toute expérimentation animale (88%, stable), de l’élevage intensif (84%, +1), de la chasse à courre (79%, +2 et plus haut historique) et de la vente d’animaux de compagnie par petites annonces (76%, +2) ».
  • 14 v. notamment R. RADIGUET, « Grande-Synthe 3 et Affaire du siècle 3 : exécution climatique en vue », AJDA 2024, p. 731.
  • 15 Les PADD de plusieurs communes de France mentionnent la biodiversité en ville, et celui de la ville de Paris (2023) compte dans son axe « Donner sa place à la nature dans la ville » une orientation visant « La biodiversité et l’essor des vies végétale et animale », mentionnant notamment « le développement et l’accueil de la faune et de la flore ».
  • 16 Le maire exerce ce pouvoir seul, et non en exécution de délibérations du conseil municipal (art. L. 2212-24 CGCT), mais sous le contrôle du préfet. Voir aussi M. VERPEAUX, L. JANICOT, Droit des collectivités territoriales, LGDJ, 2ème édition, 2021, p. 400.
  • 17 Arrêté n° 2023/DDT/SEPR/313 portant autorisation d'introduction dans le milieu naturel des lapins de garenne.
  • 18 Loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature (introduisant l’article L. 214-1 dans le Code rural). Puis la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 permet de ne plus considérer les animaux comme des biens meubles ou comme des immeubles par destination, mais comme « des êtres vivants doués de sensibilité » (art. 515-14 du Code civil).
  • 19 H. RICCI, « Le pigeon et le droit administratif », in A. PECH, I. POIROT-MAZERES, M. TOUZEIL-DIVINA, M. AMILHAT (dir.), « L'animal et le droit administratif », JDA 2021, Art. 365.
  • 20 Plus de la moitié de la population mondiale vit dans des villes, proportion annoncée comme croissante jusqu’en 2050 (F. PANESE, « 5. Ville et environnementalisation de la santé. Brefs jalons d’une longue histoire », in N. SENN (dir.), Santé et environnement. Vers une nouvelle approche globale, Médecine & Hygiène, 2022, p. 70-76).
  • 21 M. DESROUSSEAUX, L. STAHL, « L’appréhension de l’agriculture urbaine par le droit français », Géocarrefour, 2014, 89/1-2, p. 65-73. Où il est fait référence sur ce point à THIEBAUT, 2001, et DOUSSAN, 2001.
  • 22 https://www.leparisien.fr/oise-60/les-sangliers-sinstallent-en-ville-et-il-faut-se-preparer-a-vivre-avec-22-03-2024-CZEZHPZG5ZCDPIRTFHBTH6G4Y4.php [consulté le 22/03/2024].
  • 23 CE, 5ème et 3ème SSR, 07 juillet 1997, n° 146581 (inédit).
  • 24 Conclusions sur CE, 5ème et 3ème SSR, 07 juillet 1997, n° 146581, p. 2 (auteur non identifié).
  • 25 CE, 25 juillet 2007, n° 293882 (tables).
  • 26 ibid.
  • 27 CE, 10 novembre 2021, n° 439350 (inédit).
  • 28 Le juge précise que cela se fait « sans préjudice des dispositions de l'article L. 211-1 du code rural et de la pêche qui ont pour seul objet de faciliter la mise en œuvre de la responsabilité du gardien de l'animal à l'égard des tiers, instituée par les dispositions de l'article 1385 du code civil, reprises à l'article 1243 du même code, dans le cas où l'animal a causé un dommage » et qui ne constituent pas un fondement légal de pouvoirs de police du maire.
  • 29 En effet, le 7° de l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales « a l'inconvénient d'être rédigé [ ] de manière trop restrictive en n'évoquant l'action du maire qu'à l'égard de la divagation d'animaux malfaisants ou féroces. Or, alors même qu'un animal n'est pas en lui-même malfaisant ou féroce, sa simple divagation peut mettre en danger la sécurité publique. Tel est par exemple le cas de la divagation de troupeaux, de chevaux ou de chiens sur la voie publique contre laquelle il convient également que le maire agisse. Aussi, plutôt de d'évoquer la divagation des animaux malfaisants ou féroces, le CGCT aurait sans doute mieux fait d'évoquer, de façon plus générale, la divagation des animaux errants même si la formule est quelque peu redondante » (coll. Encyclopédie des collectivités locales, Chapitre 3, folio n° 2530, Dalloz).
  • 30 À tel point qu’il a aussi reconnu l’existence d’« événements fâcheux » occasionnés par la divagation de pigeons sur le territoire d’une commune au sens de l’article L. 131-2 du Code des communes (aujourd’hui remplacé par l’article L. 2212-2 CGCT – 7°) : CE, 6ème et 2ème SSR, 04 décembre 1995, Delavallade, n° 133880 (tables).
  • 31 CE, juge des réf., 14 octobre 2022, Commune de Carlencas-et-Levas, n° 467956 (inédit).
  • 32 V. notamment Cass. civ., 11 octobre 1989, n° 88-15885 ; CA Pau, 29 septembre 2003, n° 01/03789 ; et plus récemment : CA Amiens, 1re ch. civ., 08 mars 2022, n° 18/04143 ; v. à ce sujet V. DOEBELIN, « Troubles anormaux de voisinage en milieu rural – L'appréciation du juge civil demeure face à la loi du 29 janvier 2021 », DR 2022, n° 505, comm. 111.
  • 33 B. GRIMONPREZ, « L’agriculture urbaine : une agriculture juridiquement comme les autres ? », RDR 2019, n° 475, étude 18.
  • 34 ibid.
  • 35 M. DESROUSSEAUX, L. STAHL, « L’appréhension de l’agriculture urbaine par le droit français », Géocarrefour 2014, 89/1-2, http://journals.openedition.org/geocarrefour/9475 [consulté le 01/03/2024].
  • 36 CE, 26 juin 1991, n° 78111 (inédit).
  • 37 CAA Nancy, 25 juin 1992, n° 90NC00240 (tables).
  • 38 CAA Nancy, 25 juin 1992, n° 90NC00240 (tables).
  • 39 CE, sect., 19 mai 1933, Benjamin, n° 17413, Lebon p. 541 ; le triple test de proportionnalité s’imposera à partir de la décision du CE, Ass., 26 octobre 2011, Association pour la promotion de l’image, n° 317827, Lebon.
  • 40 CE, 05 février 1960, Commune de Mougins, n° 42-735, Lebon p. 83.
  • 41 CE, 5/3 SSR, 31 mars 1999, n° 160880 (inédit).
  • 42 J.-B. VILA, « Ordre public – Composantes matérielles », in Répertoire de police administrative, Dalloz, 2023.
  • 43 V. notamment T. ROMBAUTS-CHABROL, « Une liberté fondamentale : une révolution ? », JCP A 2023, n° 28, 2231 ; T. JANICOT, D. PRADINES, « Environnement : une nouvelle liberté fondamentale en référé, pour quoi faire ? », AJDA 2022, p. 2002.
  • 44 CE, juge des réf., 29 mars 2023, n° 472424 (inédit).
  • 45 https://www.leparisien.fr/seine-et-marne-77/grenouilles-crapauds-tritons-et-salamandres-saint-jean-les-deux-jumeaux-ferme-une-rue-la-nuit-pour-proteger-les-amphibiens-09-03-2024-KMQLBUPLZRAKZD5NKFNZ75U3ZI.php [consulté le 22/03/2024].
  • 46 https://www.ouest-france.fr/bretagne/lamballe-armor-22400/dans-cette-commune-des-cotes-darmor-des-panneaux-installes-pour-signaler-le-passage-de-loutres-deb27a42-e6b7-11ee-95e5-de9a0852a727 [consulté le 22/03/2024].
  • 47 Les mesures de police portant sur les activités cynégétiques seront exclues de cette étude car elles soulèvent en elles-mêmes des enjeux qui méritent des développements dédiés. Il y a dans ce cadre une police spéciale étatique, et des pouvoirs de police administrative générale partagés entre le préfet de département et le maire. De nombreuses thématiques sont attachées à la pratique cynégétique : « l'utilisation d'armes, la régulation des espèces animales, la préservation de la biodiversité ou encore l'utilisation du domaine public et l'intervention sur des propriétés privées » (F. ABOUADAOU, « Les fédérations des chasseurs et leurs missions de service public – Les fédérations des chasseurs et la police administrative de la chasse : l'ambiguïté de la sécurité à la chasse », RFDA 2023 p. 844).
  • 48 S. BRIMO, B. DEFOORT, « La police générale de la salubrité à l'épreuve de l'état d'urgence sanitaire : ou l'impossible disparition de la salubrité publique locale », RDSS 2020, p. 848.
  • 49 En vertu de l’article L. 211-22 du Code rural et de la pêche maritime, « les maires prennent toutes dispositions propres à empêcher la divagation des chiens et des chats. Ils peuvent ordonner que ces animaux soient tenus en laisse et que les chiens soient muselés. Ils prescrivent que les chiens et les chats errants et tous ceux qui seraient saisis sur le territoire de la commune sont conduits à la fourrière, où ils sont gardés pendant les délais fixés aux articles L. 211-25 et L. 211-26. Les propriétaires, locataires, fermiers ou métayers peuvent saisir ou faire saisir par un agent de la force publique, dans les propriétés dont ils ont l'usage, les chiens et les chats que leurs maîtres laissent divaguer. Les animaux saisis sont conduits à la fourrière ». Le maire doit également désigner un lieu de dépôt pour les animaux errants sans détenteur, ou dont le détenteur refuse de se faire connaître, qui sont trouvés pacageant sur des terrains appartenant à autrui, sur les accotements ou dépendances des routes, canaux, chemins ou sur des terrains communaux (art. L. 211-20 du Code rural et de la pêche maritime).
  • 50 CE, 08 février 2006, n° 276047 (inédit).
  • 51 Cet article dispose que : « Ne peuvent détenir les chiens mentionnés à l'article L. 211-12 : 1° Les personnes âgées de moins de dix-huit ans ; 2° Les majeurs en tutelle à moins qu'ils n'y aient été autorisés par le juge des tutelles ; 3° Les personnes condamnées pour crime ou à une peine d'emprisonnement avec ou sans sursis pour délit inscrit au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent ; 4° Les personnes auxquelles la propriété ou la garde d'un chien a été retirée en application de l'article L. 211-11. Le maire peut accorder une dérogation à l'interdiction en considération du comportement du demandeur depuis la décision de retrait, à condition que celle-ci ait été prononcée plus de dix ans avant le dépôt de la déclaration visée à l'article L. 211-14 ».
  • 52 CE, juge des réf., 06 août 2008, n° 313892 (inédit).
  • 53 CE, juge des réf., 11 décembre 2015, n° 395008 (inédit). Ce point est constant dans la jurisprudence administrative, voir notamment CE, 5ème ch., 24 mars 2023, n° 466442, à propos du retrait d’un chien dangereux.
  • 54 CE, juge des réf., 21 septembre 2022, n° 467514.
  • 55 ibid.
  • 56 C. VAYSSE, « Le chat municipal, complexité d'une notion en équilibre entre objet de polices et statut de bien communal », JCP A 2023, n° 7, 2071.
  • 57 ibid.
  • 58 Y. JEZOUGO, « Police générale et polices spéciales en matière environnementale », in C. VAUTROT-SCHWARZ (dir.), La police administrative, PUF, 2014, p. 151. Dans le même sens, la professeure Pauliat a souligné que « les relations entre le droit administratif et l’animal sont placées sous le signe de l’anthropocentrisme, tant il est vrai que l’animal n’est, le plus souvent, pas pris en compte en tant que doté d’un statut mais seulement par l’intermédiaire des activités de l’homme, qui, elles, sont saisies par le droit administratif » (H. PAULIAT, « Les animaux et le droit administratif », Pouvoirs 2009, vol. 4, n° 131).
  • 59 CAA Nancy, 15 novembre 2010, n° 09NC01433, v. note F. NICOUD, AJDA 2011. 1446.
  • 60 CAA Bordeaux, 20 mai 2021, Association Fédération des cirques de tradition et propriétaires d'animaux de spectacle et a., n° 19BX04491 (inédit).
  • 61 M. HAURIOU, Précis de droit administratif et de droit public, Dalloz, 12ème édition, 2002, 1 150 p.
  • 62 N. CHIFFLOT, in Mélanges en l'honneur de Patrick Wachsmann, Défendre les libertés publiques, op. cit., p. 157.
  • 63 B. PLESSIX, Droit administratif général, LexisNexis, 4ème édition, 2022, p. 895.
  • 64 La trilogie municipale telle que présentée dans l’article L. 2212-2 CGCT n’a pas sensiblement évolué depuis son inscription dans l’article 97 de la loi du 5 avril 1884 sur l’organisation municipale, qui était une reprise de l'article 50 de la loi du 14 décembre 1789 sur l'organisation communale. V. à ce sujet A. FORLEN, La dimension historique de la notion d’ordre public (XVIe-XIXe siècles), op. cit., p. 248.
  • 65 CE, 07 novembre 1924, Club indépendant sportif châlonnais, n° 78468, Lebon, p. 683, où le juge administratif a validé l’interdiction d’un match de boxe pour des raisons d’hygiène morale.
  • 66 D. LOCHAK, « On s'achemine vers une jurisprudence Dieudonné », Le Monde, 07 janvier 2014, https://www.lemonde.fr/societe/article/2014/01/07/on-s-achemine-vers-une-jurisprudence-dieudonne_4343753_3224.html [consulté le 28/03/2024] ; R. PIASTRA, « De l'ordre public », RD 2014, p. 155 ; E. SAILLANT-MARAGHNI, « Interrogations sur la nouvelle ordonnance Dieudonné », AJDA 2015, p. 1658.
  • 67 G. EVEILLARD, « Ordre public – Les limites de la moralité publique comme composante de l'ordre public », DA 2016, n° 11, comm. 59. Le bon ordre moral inclut la dignité de la personne humaine.
  • 68 R. CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, LGDJ, 15ème édition, 2001.
  • 69 L. BOISSEAU-SOWINSKI, « La consécration du droit animalier, complément utile au droit rural », DR 2019, n° 470, étude 5.
  • 70 Disposition codifiée à l'article L. 214-1 du Code rural et de la pêche maritime.
  • 71 Discours général du Général De Grammont, D. 1850, IV, p. 145, note 1, coll. 1. (cité dans L. BOISSEAU-SOWINSKI, « La consécration du droit animalier, complément utile au droit rural », op. cit.).
  • 72 G. EVEILLARD, « Ordre public – Les limites de la moralité publique comme composante de l'ordre public », op. cit. ; v. aussi P-H. TEITGEN, La police municipale générale, l’ordre public et les pouvoirs du maire, Thèse, Sirey, 1934, p. 35.
  • 73 Elle a précisé que « cette notion se réfère, dans son sens habituel, aux valeurs et aux normes morales fondamentales auxquelles une société adhère à un moment donné. Ces valeurs et ces normes, qui sont susceptibles d'évoluer au fil du temps et de varier dans l'espace, doivent être déterminées en fonction du consensus social prévalant dans cette société au moment de l'évaluation. Aux fins de cette détermination, il doit être tenu dûment compte du contexte social, y compris, le cas échéant, des diversités culturelles, religieuses ou philosophiques qui le caractérisent, afin d'évaluer, de manière objective, ce que ladite société considère à ce moment comme moralement acceptable » (CJUE, 5e ch., 27 février 2020, aff. C-240/18 P, Constantin Film Produktion GmbH / EUIPO).
  • 74 D. TRUCHET, Droit administratif, PUF, Thémis Droit, 10ème édition, 2023, p. 339.
  • 75 N. CHIFFLOT, in Mélanges en l'honneur de Patrick Wachsmann, Défendre les libertés publiques, op. cit., p. 157.
  • 76 M. TOUZEIL-DIVINA, « Concours des polices administratives générale et spéciale », JCP A 2020, n° 17, 2134.
  • 77 TA Montreuil, 09 novembre 2017, n° 1609168, Préfet de la Seine-Saint-Denis, Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen c/ Cne d'Aulnay-sous-Bois.
  • 78 Voir à ce sujet F. COLIN, « L'occupation du domaine public par les professions foraines et circassiennes », AJCT 2023, p. 559.
  • 79 On peut alors faire un parallèle avec la démarche pragmatique adoptée par le Conseil d’État dans l’affaire Commune de Morsang-sur-Orge où il n’a pas cherché à faire jurisprudence mais plutôt à combler les lacunes de la police spéciale des spectacles, en validant des mesures de police administrative fondées sur le respect de la dignité humaine (B. PLESSIX, Droit administratif général, LexisNexis, 4ème édition, 2022, p. 898).
  • 80 V. par exemple : CAA Versailles, 21 mars 2023, Fédération des cirques de tradition et propriétaires d'animaux de spectacles et a. c./ Commune de Viry-Châtillon, n° 20VE03238.
  • 81 P. COMBEAU, « L’impuissance des maires face à l’installation de cirques présentant des animaux sauvages », RSDA, 2023, n° 1.
  • 82 CE, sect., 18 décembre 1959, Société « Les films Lutetia », n° 36385, op. cit.
  • 83 Arrêté du maire de Pessac interdisant l'installation de cirques avec animaux sauvages en vue de leur représentation au public sur le territoire de la commune, 25 octobre 2016.
  • 84 CAA Bordeaux, 20 mai 2021, Commune de Pessac contre Association Fédération des cirques de tradition et propriétaires d'animaux de spectacle et a., n° 19BX04491 (inédit). V. à ce sujet A. CHAUVIN, « Le respect de la dignité animale n'est pas une composante de l'ordre public », JCP A 2021, n° 26, 2213.
  • 85 CAA Nantes, 08 avril 2022, Association de défense des cirques de famille, n° 21NT02553. Ici, le maire avait pris sa mesure d’interdiction de la présence des cirques présentant des animaux sauvages sur le fondement de « la préservation de la moralité publique et de la dignité de l'être vivant ».
  • 86 CAA Marseille, 30 novembre 2020, Préfet de Haute-Corse c./ Commune de Bastia, n° 19MA00047 (inédit), bien qu’il n’y soit pas fait une mention explicite de « circonstances locales » (les conclusions du rapporteur public n’étant pas disponibles, toute vérification plus poussée est impossible).
  • 87 Cour EDH, 13 février 2024, Van de Moslims van België et autres c. Belgique, n° 16760/22 et 10 autres.
  • 88 La morale se distingue de la moralité publique. La première « est communément appréhendée comme un ensemble de valeurs ou de principes majoritairement admis par un groupe social (dont les frontières peuvent être variables – cercle familial, amical, région, pays…) trouvant fréquemment leur origine dans des concepts soit cultuels, soit sociétaux érigés parfois en doctrine ou science », la seconde « s'appréhende plus comme une conséquence traduite juridiquement permettant de limiter/encadrer, par l'intermédiaire des mesures de police administrative, des actions pouvant porter atteinte aux valeurs du groupe social ou à certains de ses membres » (J.-B. VILA, « Ordre public – Composantes immatérielles », in Répertoire de police administrative, Dalloz, 2024).
  • 89 M.-C. DE MONTECLER, « La convention européenne des droits de l'homme... et de l'animal ? », AJDA 2024, p. 298.
  • 90 J.-P. MARGUENAUD, « L'abattage rituel avec étourdissement préalable réversible : une conquête du droit animalier européen », RD 2024, p. 711.
  • 91 ibid.
  • 92 CC, 27 juillet 1994, n° 94-343/344 DC.
  • 93 CE, ass., 27 octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge, n° 136727, Lebon p. 372.
  • 94 CE, 17 avril 1963, Blois, n° 36746.
  • 95 V. aussi à ce sujet C. BAHUREL, « Les dernières volontés funéraires », AJ Famille 2022, p. 68. Par ailleurs, en 2023, le ministre de l'Intérieur a rappelé, dans une réponse à une question parlementaire (n° 3370, JO AN 12 septembre 2023), que « la dignité des morts conduit à séparer les espaces dédiés à l'inhumation des animaux de compagnie et de leur maître, même si de nombreux propriétaires de chiens et de chats aimeraient être enterrés avec eux pour les garder à leur côté ».
  • 96 N. CHIFFLOT, in Mélanges en l'honneur de Patrick Wachsmann, Défendre les libertés publiques, op. cit., p. 157.
  • 97 ibid.
  • 98 Le professeur PLESSIX estime d’ailleurs que l’intégration des valeurs républicaines d’égalité, de fraternité et de laïcité dans la notion d’ordre public général, donnerait un fondement plus solide à certaines mesures de police administrative que celui de la dignité humaine (B. PLESSIX, Droit administratif général, LexisNexis, 4ème édition, 2022, p. 897).
  • 99 P. FRYDMAN, « L'atteinte à la dignité de la personne humaine et les pouvoirs de police municipale. À propos des “lancers de nains”, Conclusions sur Conseil d'État, Assemblée, 27 octobre 1995 (2 espèces), 1) Commune de Morsang- sur- Orge. 2) Ville d'Aix- en- Provence », RFDA 1995, p. 1204.
  • 100 CE, ord., 16 avril 2015, Société Grasse boulange, n° 389372, Lebon T.
  • 101 F. MELLERAY, « Relativité des exigences de la dignité de la personne humaine », AJDA 2024, p. 269.
  • 102 TA Paris, 01 février 2022, n° 2006530, v. note J.-D. DREYFUS, « La lutte contre l'“agribashing” n'entre pas dans les missions de la gendarmerie », AJCT 2022, p. 275.
  • 103 P. Frydman, « L'atteinte à la dignité de la personne humaine et les pouvoirs de police municipale. À propos des “lancers de nains”, Conclusions sur Conseil d'État, Assemblée, 27 octobre 1995 (2 espèces), 1) Commune de Morsang- sur- Orge. 2) Ville d'Aix- en- Provence », op. cit.
  • 104 CAA Bordeaux, 20 mai 2021, op. cit.
  • 105 A. CHAUVIN, « Le respect de la dignité animale n'est pas une composante de l'ordre public », op. cit.
  • 106 https://www.cnrtl.fr/definition/indignation.
  • 107 G. BARRAUD, « Un maire peut-il interdire l'installation d'un cirque présentant des animaux ? », AJDA 2023, p. 734, à propos de TA Cergy-Pontoise, 09 décembre 2022, n° 2007632.
  • 108 M. QUARESMA DOS REIS, L. VICENTE, in La sensibilité animale, Approches juridiques et enjeux transdisciplinaires, A. QUESNE (dir.), Mare & Martin, 2023, p. 146.
  • 109 Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, Avis relatif au « Bien-être animal : contexte, définition et évaluation », 2018. L’ANSES s’appuie ici sur la conception du philosophe Emmanuel Kant sur le lien entre la dignité humaine et le respect de l’animal.
  • 110 CAA Nantes, 08 avril 2022, Association de défense des cirques de famille, n° 21NT02553 ; CAA Marseille, 30 novembre 2020, Préfet de Haute-Corse c./ Commune de Bastia, n° 19MA00047.
  • 111 TA Cergy-Pontoise, 09 décembre 2022, n° 2007632.
  • 112 G. BARRAUD, « Un maire peut-il interdire l'installation d'un cirque présentant des animaux ? », op. cit.
  • 113 CAA Versailles, 21 mars 2023, Fédération des cirques de tradition et propriétaires d'animaux de spectacles et a. c./ Commune de Viry-Châtillon, n° 20VE03238. V. à ce sujet P. COMBEAU, « L’impuissance des maires face à l’installation de cirques présentant des animaux sauvages », RSDA, 2023, n° 1.
  • 114 R. LIBCHABER, « La souffrance et les droits – A propos d'un statut de l'animal », RD 2014, p. 380.
  • 115 Aucun des textes suivants n’envisage la dignité de l’animal : Proposition de loi n° 670 du 24 juin 2011 reconnaissant à l' animal sauvage le statut d' être vivant et sensible dans le code civil et le code de l'environnement (non adoptée) ; Proposition de loi n° 1903 du 29 avril 2014 visant à établir la cohérence des textes en accordant un statut juridique particulier à l’animal (non adoptée) ; Proposition de loi de n° 3293 du 25 août 2020 relative à de premières mesures d’interdiction de certaines pratiques génératrices de souffrances chez les animaux et d’amélioration des conditions de vie de ces derniers (non adoptée) ; Proposition de loi n° 3661 visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale ayant donné lieu à la loi n° 2121-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes ; Proposition de loi n° 4018 du 23 mars 2021 relative à l’interdiction des « fermes-usines » (non adoptée) ; Proposition de loi n° 549 du 29 novembre 2022 visant à aggraver les sanctions pénales applicables pour l’abandon d’animal, l’exercice de sévices graves sur les animaux et la commission d’actes de cruauté envers les animaux, et à favoriser l’adoption d’animaux recueillis (non adoptée) ; Proposition de loi n° 1463 du 04 juillet 2023 visant à faciliter la garde d’animaux de compagnie et à lutter contre leur abandon (en attente de l’étude par la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale).
  • 116 A. CHAUVIN, « Le respect de la dignité animale n'est pas une composante de l'ordre public », op. cit.
  • 117 P. COMBEAU, « Le Conseil d’État a-t-il vraiment consacré le “droit à la vie” d’un animal ? », note sous CE, ord., 01 décembre 2020, M. E… B… c./ Préfet de police de Paris », RSDA 2021, n° 1, p. 79.
  • 118 Proposition de loi n° 689 portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux, du 19 juillet 2019. V. à ce sujet V. DONIER, « La police administrative confrontée aux défis de la protection de l’environnement », in Le droit administratif aux défis du XXIème siècle, Institut francophone pour la justice et la démocratie, 2022, p. 111.
  • 119 J.-M. PONTIER, « Chant du coq et autres », AJDA, 2019, p. 1777 ; J.-M. PONTIER, « Sons et effluves », AJDA 2021, p. 649.
  • 120 N. CHIFFLOT, in Mélanges en l'honneur de Patrick Wachsmann, Défendre les libertés publiques, op. cit.
  • 121 J’adresse mes remerciements à Adélie Cunéo et Kim-Khanh Pham pour leur relecture.
 

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