Dossier thématique : Points de vue croisés

Le désenchantement du chat : deux romans fantastiques au seuil de la modernité féline

  • Tomohiro Kaibara
    Docteur en histoire et civilisations
    EHESS
    Chercheur postdoctoral, La société japonaise pour la promotion des sciences (JSPS)

1. On a longtemps cru que « le meilleur ami de l’homme » était le chien. Mais aujourd’hui, celui-ci est menacé par son vieux rival, le chat, qui s’impose depuis quelques années comme le roi des animaux de compagnie; selon les chiffres les foyers français comptaient quinze millions de chats contre sept millions de chiens en 2021. Nous autres, les modernes, sommes devenus tellement « fous de chats » qu’on peut se demander comment nos petits tigres « ont pris le pouvoir » 1.

2. Mais historiquement, le chat domestique n’a atteint son statut privilégié que récemment. Si cet animal, domestiqué en tant que destructeur d’animaux nuisibles, surtout des petits rongeurs, est jadis entré dans le panthéon des dieux égyptiens, il souffrit ensuite, pendant des siècles en Occident, d’une mauvaise réputation, accusé de paresse, de luxure et de perfidie. On sait qu’il était associé au diable au Moyen Âge tardif, même si, en réalité, une telle association ne se limitait guère au seul chat, car le peuple, les inquisiteurs et les démonologues se méfiaient aussi de beaucoup d’autres animaux. Objet d’« adoration » tombé en « abomination », le chat accomplit depuis la Renaissance une « ascension fulgurante », pour s’assurer le statut d’animal de compagnie 2.

3. Les historiens ont identifié deux étapes dans ce processus de réhabilitation : aux temps modernes, auteurs et artistes entreprennent de premières tentatives, les premiers en composant des poèmes à la gloire du chat et les seconds en dissociant celui-ci de la souris afin de l’opposer au chien dans certaines scènes domestiques 3. Puis, à l’époque contemporaine, les milieux culturels revendiquent ouvertement « l’amitié » de cette « bête philosophique » (Théophile Gautier), contribuant à la formation d’une culture bourgeoise caractérisée par la possession d’animaux de compagnie oisifs : le chien en premier lieu certes, mais aussi le chat. Émergent aussi l’industrie animalière et la clinique vétérinaire, servant non seulement les cynophiles, mais aussi les « félinophiles » – naissance, en somme, du monde tel que nous le connaissons 4.

4. Ce grand récit laisse plusieurs questions ouvertes, dont celle-ci : comment a-t-on exorcisé le chat dit diabolique ? Il est bien vrai qu’on a conjuré avec force la légende noire d’un Moyen Âge ignorant et brutal, perpétuée notamment par le critique Champfleury 5. La culture médiévale était beaucoup plus complexe, et de nombreuses sources suggèrent que les chats entraient souvent dans la proximité des hommes (et des femmes) médiévaux 6. Mais il est aussi vrai que le chat occupait une place importante dans l’imaginaire magique, populaire et savant, qui a après tout connu un important essor au XVIe siècle, période, rappelons-le, d’une intense chasse aux sorcières 7. Comment, alors, en est-il sorti ?

5. Le présent article se propose de remettre en question le rapport, souvent présumé, entre le déclin de la magie et l’émergence du chat de compagnie. Il s’agit d’une vieille thèse. Citons le grand historien Robert Delort, qui a écrit en 1984 : « L’époque des Lumières, en effet, en dédramatisant les débats sur la sorcellerie, “dédiabolise” le chat, raréfie son meurtre rituel et rend sa fréquentation moins suspecte. Ses qualités d’animal domestique, de compagnon doux [...] et tendre sont enfin reconnues de tous » 8. La culture félinophile découlerait alors du « désenchantement du monde », cette grande mutation de la vision du monde amorcé au XVIIe siècle et accéléré au siècle suivant chez les élites, sinon dans la population générale 9. Nous proposons de réexaminer cette idée, souvent reprise comme une évidence, à partir des premiers romans de chat situé en amont et en aval du siècle des Lumières 10. L’un est connu, l’autre beaucoup moins, mais tous les deux offrent un point d’observation particulièrement intéressant pour penser comment, concrètement, s’est produit le « désenchantement » du chat, et comment ce processus a contribué à la création du chat de compagnie qui « mérite d’être choyé » 11.

 

1. La métamorphose d’un chevalier musulman

 

6. Peu de monde connaît Le Chat d’Espagne, publié en 1669 et attribué à Jacques Alluis, avocat au Parlement de Grenoble. Il s’agit pourtant d’un des premiers romans à choisir un chat comme héros, peut-être même le premier, inspiré, selon la préface, du Chien de Boulogne ou l’Amant fidèle (1668) d’Antoine Torche 12. Dédié à la marquise de Virieu, c’est-à-dire à une femme aristocrate, Le Chat d’Espagne participe de la culture « galante », alors en pleine floraison dans la cour et les salons, caractérisée notamment par la promotion des femmes 13.

7. L’histoire se situe dans une Séville médiévale islamisée, mais clairement modelée d’après la France mondaine du XVIIe siècle, car le narrateur déclare dès le début que « les Maures » y ont « apporté d’Afrique » non seulement « la Guerre et la désolation », mais aussi la « Galanterie » (p. 1). Le lecteur est invité à suivre les aventures d’Almanzor, chevalier hautement maniéré et capricieux. Le galant héros séduit à la fois la princesse Xerise et son amie Darache, faisant la cour à chacune à l’insu de l’autre, avant de se trouver dévoilé lorsque la mère de Darache, éveillée par son petit chien aboyant, repère Almanzor dans la chambre de sa fille. Le chevalier refuse d’épouser Darache, décevant celle-ci et indignant sa mère. Dans un crescendo d’émotions, tous les trois prient le Prophète : elles pour que le traître soit puni, et lui pour pouvoir sortir de cette chambre devenue sa prison. Alors, comme « Mahomet était trop juste pour différer le châtiment que méritait la méchanceté de ce Chevalier », il le transforme en chat (p. 71). Commence ainsi les errances d’Almanzor le chat, qui profite de son nouveau corps pour sortir de la chambre, divaguer dans la ville et découvrir les secrets des gens de la cour. Le héros s’attache la dame Hache, puis la tendre Zoroïde, mais s’attire enfin la colère de la sœur de cette dernière. Pourchassé, Almanzor finit ses jours « dans ces lieux qu’on ne sait point ». Le narrateur prétend à la fin que tout l’ouvrage est une traduction d’un mémoire authentique du chat, « écrit le moins mal qu’il lui fut possible », prétention assez étonnante, puisqu’une telle paternité du texte n’est jamais suggérée avant ces dernières lignes (p. 257-258).

8. Le Chat d’Espagne est un texte disparate où se succèdent des récits sans liens, mais les parties des aventures du chat ont un motif commun : chaque épisode est motivé par un proverbe, français ou espagnol, dans le sillage des jeux littéraires des salons 14. Almanzor est donc un chat littéralement proverbial : il déteste les chiens (« ils s’accordent comme chiens et chats », p. 127) ; il est un bon chasseur, mais rencontre parfois un rat capable de le contester, car, « à bon chat bon rat » (p. 219) ; il fréquente la cuisine et vole le fromage quand la cuisinière, qui, séduite par son amant, « a laissé aller le chat au fromage » (p. 254). Dans ces scènes, il ne s’agit pas d’un animal apprivoisé et choyé par son maître, mais d’un prédateur des rongeurs, d’un voleur de nourriture, d’un animal presque sauvage. Almanzor lui-même se dit qu’il est « sans Maître et sans Seigneur, sans lois et sans contrainte, obligé de n’obéir qu’à ce que sa volonté lui commanderait » (p. 78). On y voit l’héritage du chat stéréotypé des proverbes médiévaux 15.

9. Cependant, Jacques Alluis profite d’autres proverbes pour donner au chat un autre rôle, celui d’animal de compagnie. Un jour, Almanzor est attrapé par une femme domestique. Il est offert à la maîtresse de celle-ci, qui vient de perdre son chat favori, de couleur grise. La dame réalise immédiatement que ce n’est pas le sien, car Almanzor est tout noir. Elle gronde sa servante, et celle-ci s’excuse en disant : « la nuit tous les chats sont gris » (p. 128-130). Ce proverbe sert ici à faire du chat un objet d’investissement affectif, dont la mort représente une perte irréparable. En effet, il permet de différencier deux attitudes, celle de la maîtresse, qui individualise et affectionne son chat, et celle de la domestique, pour qui tous les chats sont interchangeables.

10. Trois proverbes espagnols occasionnent une réflexion sur la vie du chat favori de sa maîtresse, qui varie ses comportements face à d’autres personnes. Almanzor gagne le cœur de la tendre Zoroïde en lui procurant une lettre d’amour qu’elle pense avoir perdue. La femme, charmée par cet acte de gentillesse, conçoit « une amitié extraordinaire pour cet animal » et ordonne à ses gens « d’avoir un soin particulier de ce Chat ». Les domestiques aussi le trouvent charmant et veulent le « caresser, et faire amitié », mais le héros « ne la faisait pas avec chacun, il ne prenait pas sa patte de velours pour tout le monde, et quelquefois il égratignait sans y penser, ceux qui le flattaient sans qu’il s’en souciât ». Ainsi dit-on : « le Chat laissait toujours son Ami marqué » et « le Chat était bon ami, hormis qu’il égratignait » 16. Puis, Zoroïde porte Almanzor dans la cour, où « elle le flattait et le mignardait », alors que « le Chat se divertissait de son côté avec elle sans lui faire aucun mal ». La voyant, « tous les Chevaliers » de « la Compagnie admiraient la bonté et la belle humeur de son Chat, chacun lui donna une louange, et lui passa la main sur le dos, ou lui maniait la patte ». Leurs « petites caresses » ne plaisent au chat qu’au début, car :

11. quand il vit que ces jeunes Seigneurs abusaient de sa douceur, à mesure qu’ils l’admiraient il résolut de s’en défaire en leur jouant un tour de son métier. Il y en eut un qui lui reprit pour la troisième fois sa patte, et qui la lui serrait fort en signe d’amitié, s’imaginant peut-être qu’il n’avait point d’ongles, qu’on les lui avait coupées, qu’il ne s’en saurait point servir, ou qu’il ne l’oserait pas. Notre Chat résolut de le désabuser, et tirant sa patte de velours de la main de cet homme, il lui attacha sur le bras une griffe de Chat qui y laissa ses caractères vermeils et des marques vraiment sanglantes. Ce Chevalier fut plus étonné de ce que le Chat avec sa mine douce avait été capable de cette cruauté, que du coup même qu’il en reçut (p. 196-197).

12. On en rit. Le jeune homme malchanceux ne peut que conseiller à la compagnie de se méfier de la bonté apparente de cet animal, comme on doit se méfier des dévots hypocrites : « Ongles de chat, et habit de Béat » 17.

13. Cette séquence motivée par des proverbes espagnols offre une rare explication du motif d’un chat qui égratigne ceux qui les caressent : il est à l’aise sous la main d’une personne aimée, mais il supporte mal la sollicitation des étrangers insensibles aux signes de ses embarras. À d’autres moments du texte, le narrateur décrit comment le chat exprime ses « joie » et « satisfaction » avec des détails également rares (p. 87-88, 192-193). L’auteur semble avoir prêté une véritable attention aux comportements des chats familiers, observés sans doute chez Mme de Virieu la dédicataire, qui avait un chat selon la préface, ou même chez lui-même. Il n’est peut-être pas anodin que le conte enchâssé occupant plus de trente pages, intitulé « Le langage des mains », concerne aussi l’expression corporelle des sentiments (p. 145-181). En tout cas, Alluis soutient une idée, assez audacieuse et paradoxale à son époque, selon laquelle le chat connaît l’affection et sait l’exprimer, tout comme le chien.

14. Ainsi, Le Chat d’Espagne annonce l’avènement de la modernité féline, dans la mesure où il redouble le statut du chat vivant au sein de la société humaine. Almanzor est un animal presque sauvage, libre et indépendant, guettant les rats et les souris et volant les nourritures de l’homme. Il est aux yeux de certains une franche peste, mais à d’autres moments, il gagne le cœur des femmes de condition et jouit de leur affection publiquement. Il apparaît comme un être charmant et aimable, capable de susciter un désir de « faire amitié » avec lui. Le Chat d’Espagne redouble « la situation humano-féline » 18 : il dépeint d’une part un rapport distant et méfiant entre le chat peu apprivoisé et l’homme qui le tolère mal ; et d’autre part un rapport proche et affectif entre le chat familiarisé, capable de contrôler sa férocité – car Almanzor n’égratigne jamais Zoroïde – et l’homme qui le cajole. Pour être plus précis, il diversifie les rapports entre le chat, ci-devant chevalier et adepte en galanterie, et les femmes, car, dans ce roman, ce sont toujours elles qui le protègent ou le persécutent.

15. Cette diversité des rapports humano-félins est cependant conditionnée par une importante absence : dans la Séville imaginaire d’Alluis, personne ne témoigne d’une croyance en la capacité surnaturelle des chats, chose d’autant plus remarquable qu’Almanzor est transformé en chat « noir par tout le corps » (p. 75), malgré le titre qui annonce un chat tricolore 19. Quand on menace le héros, c’est toujours en raison d’une faute qu’il a commise : il crève « les yeux à un petit Chien de Boulogne qu’il rencontra dans la maison d’une Dame » et celle-ci le « fait chercher par tous ses domestiques pour le tuer » (p. 127) ; ou, dans un violent combat contre un rat gigantesque, Almanzor casse les vases de la sœur de Zoroïde, qui entre « dans une furieuse colère » et se plaint « aux Domestiques, à son Mari, à ses Amis », voulant « absolument faire tuer le Chat » (p. 256). On le déteste non pas pour être un chat noir funeste, mais pour ses actes impardonnables.

16.À l’exception de ces moments, Almanzor rencontre un accueil favorable. Quand il entre chez Hache, sa première maîtresse : « Dès qu’il eut paru dans le logis, sa beauté attira l’admiration d’un chacun, qui fut bientôt suivie du dessein de le dérober ». On l’attrape et le donne à Hache, qui, ayant « une grande inclination pour ces sortes d’animaux », « l’accepta avec mille témoignages de joie, elle le mit sur ses genoux, elle le caressa ». Almanzor, par ses « adresse », « gentillesse » et « esprit », gagne « dans peu de jours l’amitié de tous les domestiques », et « la Maîtresse augmentait tellement la sienne pour lui, qu’elle l’avait toujours sur ses genoux tant qu’elle était dans le logis » (p. 85-89). Chez elle, personne, même parmi les ouvriers, ne craint l’entrée d’un chat noir inconnu.

17. Il est intéressant ici de comparer Le Chat d’Espagne avec les contes merveilleux d’origine orientale, qui n’étaient pas encore connus au temps d’Alluis, mais qui triompheront un demi-siècle plus tard dans toute l’Europe : les Mille et une nuits (1704-1717) d’Antoine Galland. Dans ce recueil, composé de traductions libres de manuscrits authentiques arabes, persans ou turcs, le chat n’intervient dans le récit qu’avec une capacité magique. Dans l’Histoire de Nourreddin Ali et de Bereddin Hassan, le palefrenier bossu du sultan d’Égypte rencontre un génie transformé en « gros chat noir », qui « se mit à miauler d’une manière épouvantable », « se raidit sur ses pattes, fit briller des yeux enflammés », et grandit « de manière qu’il parut bientôt gros comme un ânon », effrayant l’homme prodigieusement 20. Dans l’Histoire de l’Envieux et de l’Envié, le héros, chef des derviches, « a dans son couvent un chat noir, qui a une tache blanche au bout de la queue ». Il lui arrache « sept brins de poil de cette tache blanche », les brûle pour créer une fumée afin d’exorciser la princesse possédée d’un mauvais génie. Dans les deux cas, le chat, de couleur noire, est associé à une puissance merveilleuse. Le conte du derviche suggère certes un rapport familier, car le chat vient « lui faire des caresses à son ordinaire », mais ce détail n’invite aucun commentaire et peut donc bien passer inaperçu 21. Chez Galland, le chat est un animal fortement associé à la magie. Alluis imagine un autre monde, où le Prophète seul détient une capacité merveilleuse – celle de transformer le chevalier en chat – alors que le chat lui-même ne possède pas une telle propriété. Personne ne pense à la puissance surnaturelle, bénéfique ou maléfique, du chat noir.

18. Jacques Alluis vivait dans une France où la sorcellerie constituait encore, du moins en théorie, un crime punissable par la peine de mort. La mise à mort des sorciers était déjà devenue rare sous le règne de Louis XIV, mais en 1682 encore, le roi devait préciser par ordonnance que les sorciers ne sont que des « séducteurs » qui exploitent l’ignorance des autres, et c’est au XVIIIe siècle que la sorcellerie fut clairement redéfinie comme escroquerie 22. Le Parlement de Grenoble était relativement peu actif dans la lutte contre la sorcellerie, mais il s’y était néanmoins engagé dans certaines périodes, condamnant, par exemple, treize accusés de 1637 à 1653. Encore en 1672, c’est-à-dire trois ans après la parution du Chat d’Espagne, le Parlement du Dauphiné a condamné un curé pour ce motif, même si, dans ce cas-ci, le « sortilège » ne faisait qu’un élément des mœurs douteuses du prêtre condamné. En bref, la sorcellerie pouvait encore être un sujet sérieux au temps du Chat d’Espagne, même si, selon l’historien Bernard Romain, qui a étudié les dossiers du Parlement, les accusés provenaient pour la plupart des campagnes 23. Le refus d’Alluis d’associer le chat à la magie tenait peut-être à une volonté de marquer sa distance mentale vis-à-vis de la croyance du peuple agricole.

19. L’intention d’Alluis reste finalement insaisissable, mais on peut dire avec certitude que son roman contribuait à la création du chat moderne, dissocié de la magie et accepté en tant qu’animal de compagnie. En choisissant un chat noir pour son héros, mais lui dérobant toute capacité surnaturelle, l’auteur l’a transformé en simple animal, ennuyeux pour certains et aimable pour d’autres, capable de susciter l’amour et la colère, mais jamais la peur. Le Chat d’Espagne décrit, en somme, la diversité des rapports que les humains établissent avec les chats dans un monde désenchanté.

 

2. Le chat favori d’un maître cynique

 

20. Après Alluis viennent Perrault et Mme d’Aulnoy, qui ont lancé la vogue du genre merveilleux avec leurs recueils des années 1690. Selon le spécialiste du conte de fées Jean-Paul Sermain, il n’y a pas de coïncidence ni contradiction dans le fait que le genre merveilleux a triomphé au siècle des Lumières : alors que les premiers philosophes éclairés, comme Bayle, Fontenelle ou Malebranche, ont entamé une critique des superstitions, les contes de fées les ont secondés dans le combat, en faisant de la magie un sujet enfantin, source d’amusement, dissocié de la réalité 24.

21. Cette perspective permet d’élaborer une nouvelle interprétation d’un titre important du canon de la littérature féline : Le Chat Murr du polymathe prussien E. T. A. Hoffmann, publié de 1819 à 1821 et traduit en français en 1830 25. Dans le sillage de la tradition métafictionnelle du XVIIIe siècle, l’auteur a conçu un double roman, alternant entre l’autobiographie présumée du matou Murr et le récit du musicien mélancolique Johannes Kreisler. La partie féline parodie à la fois le roman de formation comme Wilhelm Meister de Goethe et l’autobiographie, genre en vogue depuis les Confessions de Rousseau. Chaton abandonné sauvé et nourri par Maître Abraham, Murr raconte comment il a découvert le monde extérieur dans sa jeunesse. Il rencontre d’abord sa mère Mina dans une maison voisine avant de développer une amitié avec Punto, chien du professeur Lothario, ami d’Abraham. Adolescent, Murr s’aventure dans la rue et découvre la cruauté des « barbares », battu par un garçon et poursuivi par des chiens. Il connaît l’amour, s’unissant avec la chatte Mimine, avant de quitter son « épouse », lorsqu’elle est éprise d’un autre matou. Dans ses « mois d’apprentissage », Murr se joint à une association des chats étudiants, jusqu’à ce qu’elle soit détruite par l’assaut des chiens. Murr retrouve dans son âge mûr Punto, qui sert maintenant un baron et introduit le matou à la très noble société des chiens. Une fois charmée par cette société, surtout de la chienne Minona, admiratrice de ses œuvres, Murr se guérit enfin de l’amour et abandonne le monde pour se consacrer aux sciences. À la fin du texte, on ajoute une note annonçant la mort du héros : « La mort a enlevé au milieu de sa belle carrière Murr, ce matou intelligent, cultivé, philosophe et poète. Il s’est éteint dans la nuit du 29 au 30 novembre [1821], après de brèves, mais pénibles souffrances, supportées avec le calme et la vaillance d’un sage » (p. 413).

22. On sait que cette autobiographie burlesque fait des animaux des « moyens de la critique sociale » : Murr est une caricature de l’écrivain romantique, se vantant de son aspiration aux valeurs sublimes de la poésie, mais toujours ramené au besoin du corps, à l’appétit et à la concupiscence. La société des chats représente la bourgeoisie instruite et sa dissolution évoque la répression des associations étudiantes par le roi de Prusse 26.

23. Mais il ne s’agit pas d’une simple satire de la société humaine. Car on sait, grâce à Hitzig, ami et biographe d’Hoffmann, qu’il a élevé chez lui un chat nommé Murr de 1818 à 1821, et qu’il s’est tellement attaché à cet animal qu’il s’est beaucoup attristé lors de sa mort, confessant que sa disparition a rendu « la maison vide pour moi et pour ma femme » 27. Le roman a donc été une manière de commémorer un chat de compagnie en le transformant en personnage littéraire. Hoffmann ne fait pas du chat un simple signifiant renvoyant à la société humaine, car il s’intéresse aussi à la description narrative du rapport qu’un chat de compagnie établit avec son maître et les autres humains. Quelle est alors la « situation humano-féline » que dépeint Le Chat Murr ?

24. Examinons d’abord la figure de Maître Abraham, qui se caractérise par sa grande générosité. Il affectionne son chat, lui donne libéralement du lait, du poisson, des rôtis de poulet. Murr est tellement bien nourri que, lorsqu’il tombe dans l’indolence après être quitté par la belle Mimine, Abraham s’étonne de son « extrême bien-être physique ». Le maître lui dit : « chat, tu n’es plus du tout le même, tu deviens de jour en jour plus paresseux. Je crois que tu manges et que tu dors trop » (p. 220-221) ; mais, ce constat ne change aucunement la bonne contenance du maître. Car, dès le début, Abraham n’attend aucun service de la part de Murr. Il se flatte même pour ses « pur désintéressement » et « sentiment humain » par lesquels il a sauvé le chaton, totalement inutile à la différence, selon lui, d’un chien (p. 36). Image de l’écrivain bourgeois, Murr est un véritable parasite, qui dédaigne le « vulgaire chat ratier » (p. 265).

25. Murr s’attire l’affection non seulement de son maître, mais, apparemment, des autres membres de la maison, notamment de la cuisinière, qui « paraissait aimer beaucoup mon espèce, et moi en particulier ». Cette « aimable personne » le salue amicalement, lui parle, et l’aide volontiers lorsqu’il vient demander de la nourriture pour un autre chat, son ami Puff (p. 316-317). Une telle bonté, partagée dans la maison de Maître Abraham, n’est pourtant pas universelle, car le héros rencontre des humains hostiles dans la rue. D’ailleurs, d’autres chats vivent dans la misère. Mina, mère et voisine de Murr, est très mal nourrie et traitée avec peu de ménagement. Elle dit :

26. Enfants et adultes ne cessent de passer leurs mains sur mon dos pour produire ce feu d’artifice, et lorsque, agacée par ce tourment continuel, je m’enfuis ou montre mes griffes, on m’appelle bête sauvage, ou on me bat ! (p. 55)

27. Mina est une ratière laissée affamée dans le grenier, obligée de chasser les souris. On la caresse, mais sans se soucier de ses peines, et sa moindre opposition rencontre une réaction scandalisée. Ainsi s’est-elle vu dérober la chattée, dont Murr, par « une vieille femme », pour la « jeter à l’eau » (p. 54).

28. Maître Abraham incarne une tout autre attitude, toujours sûr de la bonté de son chat. Quand un Murr couvert de cendres saute sur lui et gâte sa robe de chambre, l’homme rejette son matou « violemment ». « Louée soit pourtant la bonté de mon maître » :

29. Voyons, voyons, Murr, mon chat, me dit-il gentiment, tu ne pensais pas à mal. Je sais que ton intention était bonne, tu as voulu me prouver ta tendresse ; mais tu t’y es pris maladroitement et dans ce cas-là, on se soucie bien de l’intention !... mais viens, mon petit cendrillon, je vais faire ta toilette, afin que tu reprennes l’air d’un honnête matou (p. 294).

30. Maître Abraham croit en la bonté de son chat parce qu’il a lui-même discipliné ce dernier dès son enfance, à la différence de Mina, délaissée dans le grenier. Murr aussi était « farouche » comme sa mère au début : quand le maître l’a sauvé, « il [l’]en récompensa en [l’]égratignant si bien que [s]es cinq doigts en saignèrent ». Abraham fut alors « sur le point de le jeter par la fenêtre », mais se repent vite de sa « sotte mesquinerie », son « instinct de vengeance ». Il a plutôt élevé « ce chat avec toute la peine et le soin qui convenaient », le laissant se former lui-même suivant le principe rousseauiste de l’éducation négative et intervenant seulement pour corriger ses fautes (p. 36, 39-40). Abraham a réussi à faire de Murr « l’animal le plus gentil, le plus intelligent », « le plus drôle du monde », « bien élevé, ni insistant ni immodeste ». Le matou ne blesse personne, car, chez lui, grâce à l’éducation, « les idées d’“égratigner” et d’“être frappé” s’associaient étroitement » (p. 24, 36-38). C’est par le biais de l’éducation que le maître a acquis sa confiance en la bonté et l’affection de son chat, confiance qui fait éviter d’accuser celui-ci par ses erreurs occasionnelles indélibérées.

31. Cette idée de conditionner l’affection sur le dressage (ou l’« éducation » selon l’expression du temps) relève de la nouveauté des Lumières. Car, en Occident, depuis le haut Moyen Âge, le chat se caractérisait par son attachement à la nature, c’est-à-dire à ses qualités innées, qu’on ne saurait enlever par l’intervention artificielle : chez le chat, « nature passe nourriture » 28. Ce n’est pas par hasard que La Fontaine a choisi une chatte (en occurrence métamorphosée en femme) pour illustrer la force de la nature chassée qui revient au galop. Si Jacques Alluis a accordé une pleine capacité affective au chat, soulignant qu’il n’égratigne pas par malice, il s’est néanmoins attaché à la conception traditionnelle de la félinité lorsqu’il a fait d’Almanzor un chat « sans Maître », divaguant dans la ville selon ses grés, chassant les rats et les souris suivant son instinct, et ennuyant les gens par le vol des denrées ou par la destruction de meubles.

32. Les philosophes du XVIIIe siècle, s’appuyant sur le sensualisme de Locke, insistaient plutôt sur la variabilité des caractères acquis et développaient l’idée de former les « mœurs » par la force de « l’éducation », non seulement chez l’enfant, mais aussi chez les animaux, y compris les espèces dites farouches comme le chat. Hoffmann est contemporain du naturaliste français Frédéric Cuvier, qui a théorisé la « sociabilité des animaux », c’est-à-dire leur capacité d’abandonner la férocité naturelle sous la direction d’un maître humain, acquérant la confiance et la douceur propres à l’état domestique. La traduction française du Chat Murr est précédée par quelques années d’un Traité raisonné de l’éducation du chat domestique, le premier manuel sérieux, en France et peut-être en Europe plus généralement, à expliquer les moyens de changer les comportements et les caractères du chat en le soumettant à un dressage systématique. Maître Abraham, n’était donc pas seul à croire en la possibilité de « corriger » son chat ; il incarnait plutôt la nouvelle conception de la félinité (et de l’animalité) répandue au début du XIXe siècle 29.

33. Or, le chat a cette particularité d’être apprécié pour son instinct. Car, si l’homme doit dresser et apprivoiser le cheval ou le chien pour le rendre obéissant et utile, il peut laisser le chat dans le grenier chasser les petits animaux nuisibles, sans lui apprendre les moyens. En effet, chez le chat, l’« éducation » pourrait même nuire à son utilité, comme le disaient certains agronomes de l’époque : pour éviter de rendre cet animal paresseux et inutile, il faut le tenir à distance et le laisser dans son « état primitif » 30. Hoffmann reprend parfaitement cette dichotomie dans Le Chat Murr : Mina, la mère de Murr persécutée, vit exactement cette situation, alors que Murr jouit de l’affection de son maître sans occuper aucune fonction utile.

34. Un épisode illustre bien la particularité du chat de compagnie. Mina recommande à son fils : « Si jamais Maître Abraham s’aperçoit que tu sais écrire, mon cher Murr, il fera de toi son secrétaire et on t’imposera comme un devoir ce que tu fais maintenant de toi-même et pour ton plaisir... » (p. 55). Le matou saura qu’elle a raison. Plus tard, le professeur Lothario, averti par son chien Punto, découvre les poèmes manuscrits de Murr et se convainc que celui-ci possède des capacités mentales extraordinaires. Lothario s’en inquiète extrêmement pour son professorat, menacé par ce rival épouvantable. Il essaie même de tuer Murr à l’insu d’Abraham.

35. Lothario a presque réussi à transmettre sa peur à son ami Abraham. Ce dernier, averti par le premier, constate l’absence de quelques volumes de sa bibliothèque et décide de barrer l’entrée à Murr. Il observe les gestes de son chat attentivement, méditant sur la possibilité de le mettre à profit, en l’employant comme secrétaire et en l’exhibant en public. Murr doit alors dissimuler son intelligence et n’écrit dorénavant que dans la nuit, sur les toits, sous la lumière de la lune. Le matou réussit enfin à dissiper le soupçon, qui a contaminé pendant quelque temps l’amour désintéressé de son maître. Ce petit épisode burlesque établit l’incompatibilité de l’affection et l’exploitation utilitaire.

36. On apprend dans les fragments sur la vie de Kreisler qu’Abraham Lostow est un charlatan, un « magicien ironique », infiltré dans la cour ducale de Sieghartsweiler (p. 48). Il possède des ouvrages magiques, que Murr lit par-dessus son épaule : un livre sur l’astrologie, un autre sur les talismans et Le Monde enchanté (1691) du théologien hollandais Baltazar Becker, grand critique de la chasse aux sorcières (p. 346). Comme le suggère ce dernier titre, Abraham est un mécanicien charlatan cynique, ne croyant pas en la magie mais capable de faire croire les autres. Il s’est enfin dévoilé en échouant d’empêcher la pluie de gâter une grande fête ducale, et fuit le palais, et se cache dans son petit appartement. Il se prépare en effet à quitter la ville en confiant Murr à Kreisler.

37. Le charlatan peut aimer son chat parce qu’il sait que l’animal est incapable de lui faire du mal. Il le sait non seulement parce qu’il croit avoir réussi à le dresser, mais parce qu’il ne croit pas aux phénomènes surnaturels. Le paradoxe du Chat Murr fait que le professeur Lothario a raison de voir en Murr un auteur, car on est censé lire l’autobiographie écrite par le matou lui-même. Avec une grande astuce, Hoffmann présente la position de Maître Abraham comme raisonnable selon le critère ordinaire de notre monde, mais erroné dans la logique interne de l’œuvre. C’est cette structure narrative paradoxale qui permet d’établir le nouveau rapport de l’homme et son chat, le premier cajolant le second en le considérant comme un être inoffensif, incapable de contester sa suprématie. Le Chat Murr décrit ainsi la condition moderne des animaux de compagnie, considérés comme impuissants et donc aimables. Le chat moderne qu’incarne Murr peut encore sortir de la maison librement, comme le faisait Almanzor, mais dans sa naïveté et son ignorance du monde extérieur, le matou ne peut enfin vivre que chez son « bienfaiteur », « Maître Abraham » (p. 25).

♦♦♦

38. Si la modernité occidentale s’est ouverte par un désenchantement du monde, ou par le recul du merveilleux chez les élites sociales appréciant le tangible et le palpable, ce processus s’est produit non seulement dans le discours « scientifique » des philosophes naturels, mais aussi dans les productions littéraires servant à l’amusement des lecteurs et lectrices profanes. Car la littérature merveilleuse, qui fait de la sorcellerie un élément de divertissement, les invitait à cultiver une attitude critique vis-à-vis de ce qu’on dénonçait comme des « superstitions » : dans un temps où la chasse aux sorcières se pratiquait encore dans certaines régions de l’Europe, Alluis, osant traiter de Mahomet comme un mage, a refusé de faire de son chat noir un animal magique ; un siècle et demi plus tard, Hoffmann choisi d’introduire un personnage qui craint le chat pour ses capacités surnaturelles, mais le confronte à la rationalité de Maître Abraham qui cajole son chat tout en refusant de lui attribuer des pouvoirs merveilleux. Cette lecture de leurs romans fantastiques suggère donc que la fiction constituait, du début du siècle des Lumières à l’aube de l’âge romantique, un important moyen d’apprivoiser la sorcellerie et, partant, de désenchanter le chat pour le rendre aimable.

  • 1 Abigail Tucker, Un Lion sur le canapé. Comment les chats ont pris le pouvoir, Paris, Albin Michel, 2019 ; Philippe Villemus, Fous de chats ! Enquête sur une passion française, Caen, Éditions EMS, 2021.
  • 2 Éric Baratay, Et l’homme créa l’animal. Histoire d’une condition, Paris, Odile Jacob, 2003, p. 343-351.
  • 3 Laurence Bobis, Le Chat. Histoire et légendes, Paris, Fayard, 2000 (réédité comme Une histoire du chat de l’Antiquité à nos jours, Paris, Seuil, 2006), ch. 26, 28 ; Stefano Zuffi, Les Chats dans l’art, traduit par Denis-Armand Canal, Paris, La Martinière, 2007.
  • 4 Théophile Gautier, Ménagerie intime, Paris, Alphonse Lemerre, 1869, p. 22 ; Kathleen Kete, The Beast in the Boudoir : Petkeeping in Nineteenth-Century Paris, Berkeley, University of California Press, 1994 ; Ronald Hubscher, Les Maîtres des bêtes. Les vétérinaires dans la société française, XVIIIe-XXe siècles, Paris, Odile Jacob, 1999, ch. 11; Jane Hamlett et Julie-Marie Strange, Pet Revolution : Animals and the Making of Modern British Life, Londres, Reaktion Books, 2023. Le mot « félinophile » s’employait à la fin du XIXe siècle pour désigner l’amateur des chats, avant d’être concurrencé par son équivalent davantage pédant, « ailurophile », tiré du mot grec ailuros (chat). Les deux mots se retrouvent dans Carl Van Vechten, The Tiger in the House, New York, Alfred A. Knopf, 1920.
  • 5 Champfleury, Les Chats. Histoire, mœurs, observations, anecdotes, Paris, J. Rothschild, 1869, p. 53 : « Le moyen âge qui brûlait les sorcières et quelquefois les savants, devait brûler les chats ».
  • 6 Bobis, Le Chat, op. cit., ch. 5-7 ; Kathleen Walker-Meikle, Medieval Pets, Woodbridge, Boydell Press, 2012.
  • 7 Sur le chat diabolique, voir Bobis, Le Chat, op. cit., ch. 20-23. Sur la magie et la démonologie de la Renaissance, voir par exemple Julian Goodare, The European Witch-Hunt, Londres, Routledge, 2016.
  • 8 Robert Delort, Les Animaux ont une histoire, Paris, Seuil, 1984, p. 348.
  • 9 Marcel Gauchet, Le Désenchantement du monde. Une histoire politique de la religion, Paris, Gallimard, 1994. Sur la question du « déclin de la magie », posée par Keith Thomas en 1971, voir par exemple Michael R. Lynn (éd.), Magic, Witchcraft, and Ghosts in the Enlightenment, Londres, Routledge, 2022.
  • 10 Cet article est tiré de notre thèse : Tomohiro Kaibara, « Le grand sacre des chats. L’invention d’un animal de compagnie en France (1670-1830) », thèse de l’EHESS, dirigée par Antoine Lilti et soutenue le 17 mars 2023.
  • 11 Delort, Les Animaux ont une histoire, op. cit., p. 348.
  • 12 [Jacques Alluis], Le Chat d’Espagne, nouvelle, Cologne, Pierre du Marteau, 1669. Nous employons cette édition pirate, publiée sans doute à Paris et plus accessible que l’édition originale rarissime (Grenoble, Jean Nicolas, 1669). Pour le citer, nous indiquerons le nombre de pages entre parenthèses dans le corps du texte. L’orthographe des citations est modernisée.
  • 13 Alain Viala, La France galante. Essai historique sur une catégorie culturelle, de ses origines jusqu’à la Révolution, Paris, PUF, 2008.
  • 14 Cf. Constance Cagnat-Debœuf, « Du jeu des proverbes dans les Histoires ou Contes du temps passé : “Cendrillon ou la petite pantoufle de verre” », Dix-Septième Siècle, no 277, 2017, p. 631‑644.
  • 15 Emmanuelle Rassart-Eeckhout, « Le chat, animal de compagnie à la fin du Moyen Âge ? L’éclairage de la langue imagée » dans Liliane Bodson (éd.), L’Animal de compagnie. Ses rôles et leurs motivations au regard de l’histoire, Liège, Université de Liège, 1997, p. 95‑118.
  • 16 Alluis traduit ici les proverbes espagnols qu’il présente aussi dans la langue originale : « A su Amigo, el Gato siempre le dexa señalado » ; « Buen amigo es el Gato, sino que rascuña » (p. 194).
  • 17 « Uñas de gato, y habitos de beato » (p. 198).
  • 18 Nous empruntons cette expression à Éric Baratay, Cultures félines (XVIIe-XXIe siècle). Les chats créent leur histoire, Paris, Seuil, 2021.
  • 19 Au Moyen Âge et à l’époque moderne, « le chat d’Espagne » désignait le chat « calico » ou « isabelle », c’est-à-dire tricolore (blanc, orange et noir).
  • 20 Antoine Galland, Les Mille et une nuits, éd. Manuel Couvreur, Paris, Honoré Champion, « Bibliothèque des génies et des fées », 2016, tome 1, p. 497-498.
  • 21 Ibid., tome 1, p. 323. Nous soulignons.
  • 22 Alfred Soman, « La décriminalisation de la sorcellerie en France », Histoire, économie et société, 1985, vol. 4, no 2, p. 179‑203 ; Ulrike Krampl, Les Secrets des faux sorciers. Police, magie et escroquerie à Paris au XVIIIe siècle, Paris, Éditions de l’EHESS, 2012.
  • 23 Bernard Romain, « Le Parlement de Grenoble face à la sorcellerie aux XVIe et XVIIe siècle », dans Olivier Cogne (dir.), Rendre la justice en Dauphiné, Presses universitaires de Grenoble, 2013, p. 191-196.
  • 24 Jean-Paul Sermain, Le Conte de fées, du classicisme aux Lumières, Paris, Desjonquères, 2005, p. 45-52. Voir aussi Goodare, The European Witch-Hunt, op. cit., p. 345-347. Nous avons analysé La Chatte blanche (1698) de Mme d’Aulnoy en poursuivant cette piste dans Kaibara, « Le grand sacre des chats », thèse citée, p. 287-290.
  • 25 La première traduction de Loève-Veimars parue en 1830 étant moins précise, nous employons Ernst Theodor Amadeus Hoffmann, Le Chat Murr, trad. Albert Béguin, Paris, Gallimard, 1943. Pour le citer, nous indiquerons le nombre de page entre parenthèses dans le corps du texte.
  • 26 Christa-Maria Beardsley, E.T.A. Hoffmanns Tierfiguren im Kontext der Romantik: die poetisch-ästhetische und die gesellschaftliche Funktion der Tiere bei Hoffmann und in der Romantik, Bonn, Bouvier, 1985, partie D, « Das Tier als Medium der Gesellschaftskritik ».
  • 27 Voir le commentaire de Hartmut Steinecke dans E. T. A. Hoffmann, Lebens-Ansichten des Katers Murr. Werke 1820-1821, Frankfurt am Main, Deutscher Klassiker Verlag, 1992, p. 932-938 (citation p. 937).
  • 28 Bobis, Le Chat, op. cit., p. 130.
  • 29  [Jean-M.-M. Rédarès], Traité raisonné sur l’éducation du chat domestique, Paris, Raynal 1828. La question de l’éducation occupe une place centrale dans l’histoire culturelle du chat au XVIIIe siècle, discutée dans la 3e partie de notre thèse (Kaibara, « Le grand sacre des chats », ch. 6-8). Pour un précis, voir Tomohiro Kaibara, « Le Chat : l’invention du chat moderne », dans Pierre Serna, Véronique Le Ru, Malik Mellah et Benedetta Piazzesi (éds.), Dictionnaire historique et critique des animaux, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2024, p. 160-164.
  • 30 Alexandre-Henri Tessier, « Chat », dans Alexandre-Henri Tessier et André Thouin, Encyclopédie méthodique. Agriculture, tome 3, Paris, Panckoucke, 1793, p. 78.
  •  
 

RSDA 1-2024

Dernières revues

Titre / Dossier thématique
Le chat
Une seule violence
Le soin
Les frontières de l’animalité
Le lapin